J’avais eu de nombreuses discussion avec de nombreuses personnes. Robin m’avait ramené à la raison du mieux qu’il le pouvait et j’avais retrouvé l’espoir que ma fille prenne le dessus sur les ténèbres qui envahissait son âme. Je respirais difficilement dans mes appartements. Ce château me pesait plus que jamais, à mon plus grand étonnement. J’enfilais mes vieux vêtements de lorsque j’étais en fuite. Blanche Neige était de retour dans la Forêt Enchantée et cette fois, elle allait aidé celle qui lui avait causé mille et un tourment : Regina Mills, la méchante reine. Elle agissait comme la mère que l’on m’avait retiré trop rapidement, même si elle ne s’en rendait pas compte. Nous n’avions pas un si grand écart d’âge en bout de ligne, mais je ressentais le besoin d’avoir son approbation.

Je prenais mon arc et mes flèches. J’avais envie de me détendre et de me promener dans la forêt. J’avais besoin de sentir l’air pur, l’humidité, le chant des oiseaux ainsi que le craquement du bois sous mes pas. Je cachais le haricot magique précieusement dans une pochette près de mon coeur. C’était mon seul moyen de regagner Storybrooke et je comptais bien le faire rapidement. David n’était toujours pas rentré de Camelot. Nous nous étions fortement brouillé à cause de Emma et je m’en voulais pour ça. Si ce dernier avait été présent, il aurait fait la même chose que moi. Il aurait sauvé notre fille peu importe les conséquences.

Je faisais résonner mes bottes sur le plancher du palais de ma belle-mère pour aller à l’écurie. Je ne parlais à personne et je remontais la capuche de ma cape sur ma tête. Une fine pluie tombait en ce moment, rien d’extrême simplement agaçante à mon goût. Ma cape saurait me protéger. Une fois dans les écuries, je montais mon cheval et me mettais en route tranquillement pour la forêt. Un petit trot pas trop rapide. Je n’étais pas pressée, j’avais simplement besoin de respirer et de me sentir moi-même. Je tirais les rênes de l’animal pour le mettre au pas lorsque nous arrivions à l’orée de cette fameuse forêt. Les arbres avaient tellement grandis. Je me sentais nostalgique. Cet endroit était devenu ma maison en quelque sorte durant bien des années.

Je descendais de mon cheval et l’attachais près d’un petit étang. Il pourrait manger, se reposer et s’abreuver en toute tranquillité. Je sortais mon arc et préparais une flèche au cas où. J’avançais lentement en écoutant les oiseaux chanter. Je m’arrêtais pour savourer ce moment en fermant les yeux. Que c’était paisible et doux. L’espoir en moi n’avait d’égal que ma naïveté. Je m’en voulais de l’avoir autant été avec Rumple… Il allait me le payer dans la mesure du possible. J’entendais un bruissement sur ma gauche et je me tournais, prête à décocher ma flèche dans l’animal, mais ce n’en étais pas un. Je baissais lentement mon arme.

- Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous faire peur.

Est-ce que j’avais vraiment fait peur à cet homme ou bien étais-ce moi qui avais eu peur? Je sentais mon coeur battre la chamade comme jamais. J’aurais pus tuer cet homme, car oui, je savais qu’il s’agissait d’un homme même si je ne le voyais pas bien. Ce genre de silhouette ne trompait personne.

Je ne supportais plus de rester dans mon manoir, aussi beau, spacieux et luxueux fut-il. J’avais passé les vingt-huit dernières années à observer les habitants de Storybrooke revivre sans cesse la même journée, comme autant de damnés dans les plus basses strates des Enfers. Pas qu’ils en aient souffert le moins du monde, non, aucun d’eux n’avaient la plus petite idée du calvaire qu’il vivait. Moi si. J’avais été puni très durement d’avoir participé à la descente aux enfers de Regina Mills.

J’avais fait la paix avec la mairesse de Storybrooke, j’avais même accepté d’espionner Frollo et ses alliés pour elle, pour qu’elle puisse reprendre la ville dans griffes du juge et de Cora. J’avait été plus convaincu par la perspective de mettre des bâtons dans les roues de mon ancienne tortionnaire et d’un juge pour lequel je n’avais jamais ressenti autre chose qu’une grande méfiance – appelez ça l’instinct du voleur, si vous voulez – que par l’envie impérieuse et vertueuse de simplement aider mon prochain. Et puis, je n’aimais pas vraiment savoir Cora dans le cercle rapproché du chef de la ville, après tout, si elle apprenait l’existence de Grace et sa parenté avec moi, ma fille serait en grand danger. À cause de moi, à cause de ce que j’avais fait, me murmurait une voix perfide dans mon esprit.

Malgré la fin de la Malédiction et la preuve que ma fille voulait me voir, je n’avais toujours pas le courage d’aller la voir. J’étais absolument terrifié de sa réaction, de ce qu’elle dirait sur le fait que je l’avais abandonnée, de peut-être me rendre compte qu’elle préfèrerait rester avec ses parents adoptifs. Ou au contraire, de me rendre compte que j’aurais dû aller la trouver dès que les habitants avaient retrouvé la mémoire, qu’elle n’attendait que moi et que je la faisais souffrir en restant éloigné d’elle.

Toutes ces questions me tournaient dans la tête sans relâche, j’avais toujours dans ma poche le dessin qu’elle avait fait de moi pour me retrouver. J’avais recommencé à l’observer de loin avec mon télescope, je tournais en rond, j’étouffais, j’étais de nouveau au bord de la folie. Cette fois, il n’y avait pas de Malédiction pour me tenir éloigné de ma fille et pourtant, je ne pouvais pas dépasser cette peur viscérale que j’avais développée pendant près de trente ans.

J’avais donc pris le Chapeau Express que je me plaisais à l’appeler depuis quelques temps pour aller faire mon rapport à Regina. Il fallait de toute manière que je quitte Storybrooke, même seulement quelques heures. Prendre un peu d’air, me ressourcer, faire taire ces pensées qui m’empêchaient parfois de trouver le sommeil.

Je marchai donc depuis un moment dans la forêt dense quand le bruit d’un arc tendu me mit instantanément sur mes gardes. Mon premier réflexe fut de porter ma main à l’une de mes dagues, mais que je reconnus la silhouette qui me braquait de son arc, je me contentai de sourire aimablement.

« - Il n’y a pas de mal, votre Altesse. Et puis, après la manière dont je vous ai traitée à notre première rencontre, vous seriez tout à fait dans le droit de m’abattre. Cela m’arrangerait que vous vous en absteniez, mais je ne vous blâmerais pas de le faire… »

Je poussais un soupir de soulagement en levant la tête vers le ciel. Ce n’était que le Chapelier de Regina comme j’aimais l’appeler. Il travaillait pour elle, c’était une chose plus que claire. Je secouais un peu la tête avant de ranger mon arme dans mon dos ainsi que ma flèche dans mon carquois. Je ne voulais pas le tuer, ce n’était pas mon genre de tuer les gens comme ça. J’avais même renoncer à tuer Regina et pourtant j’en avais eu l’occasion une fois et je ne l’avais pas fait. Je pensais que chaque personne méritais une seconde chance et une sorte de rédemption. Je gardais toujours espoir que les plus vilains et méchants d’entre-nous deviendraient bon un jour et qu’ils auraient leur fin heureuse. C’était sans aucun doute une utopie de ma part et de la naïveté, mais j’étais fondamentalement certaine que le bonheur attendais chacun de nous quelque part dans ce monde.

Je m’approchais lentement de Jefferson Stewart avec mon sourire habituel. Un sourire rempli de bonté et d’espoir qui me collait à la peau comme la sueur après un long combat. J’attendais d’être à sa hauteur avant d’ouvrir la bouche pour parler. J’étais calme en apparence même si, à l’intérieur de moi, se tenait une joute encore difficile à assumer. J’avais de plus en plus de doute qu’en au fait de me venger de Rumple. La vie se chargerait sans aucun doute de cet homme diabolique au coeur de pierre. Il ne semblait jamais ressentir de culpabilité face à ses agissements contrairement à moi.

- Je ne garde aucune rancune de notre première rencontre. Vous aviez vos raisons d’agir ainsi même si ces dernières ne justifiaient pas une séquestration de votre part. J’étais simplement en train de faire une partie de chasse pour me vider l’esprit. Je croyais être seule dans cette partie de la forêt, mais visiblement je me trompais.

J’allais m’asseoir sur un tronc d’arbre, couché au sol, pour me remettre un peu de mes émotions. Je rigolais un peu nerveusement et levais la tête pour regarder la cime des arbres. Mon regard se portait sur les milliers de feuilles au-dessus de nos têtes. Mes yeux se fermaient alors que je prenais une grande inspiration. L’air de la forêt était si pur et le bruit de la nature tellement apaisant.

- Que faites-vous dans la forêt monsieur Stewart? Cela fait un long moment que je ne vous ai pas vue dans les environs. J’imagine que ma belle-mère vous avait mandaté pour une quelconque tâche. Peu importe, je suis contente de voir un visage familier. Assoyez-vous. Ce n’est pas tous les jours que nous pouvons savourer un moment de calme et de répit.

En effet, de nombreuses choses se tramaient. Nous ne resterions pas longtemps dans l’ombre. La reprise de Storybrooke approchait et je devais me rendre avant sur place pour évaluer les dégâts.