Nous étions de retour dans la Forêt Enchantée. Retrouvailles remplies de soulagement pour moi. Je me sentais heureux de revoir ma famille, mais je grondais fortement de l'intérieur. Une sorte de combat que je menais avec moi-même sans me poser la moindre question en fait. Je prenais une profonde inspiration et je restais silencieux. Même ma jumelle avait remarqué le changement. Je ne restais pas avec eux à la fin des repas et j'allais marcher sur le terrain environnant le château de ma mère. Je me rendais souvent au pied de ce pommier et je le regardais en mettant mes mains dans mes poches. Prince Richard Mills de Locksley. Le pirate était bien loin quelque part au final.

Je m'étais levé comme tous les matins. J'avais mangé dans mon coin légèrement avant de regarder à l'extérieur. J'avais envie de m'entrainer à l'épée. J'avais besoin de discuter avec mon père. J'avais besoin de comprendre des choses et je savais qu'il me voyait complètement perdu. Pourtant, j'étais davantage dans mon univers ici qu'à Storybrooke. Je m'approchais de lui après avoir terminé mon repas. Je me raclais la gorge en cognant légèrement avec mes jointures sur l'immense table de bois.

- Père ... J'aimerais m'entrainer avec vous à l'épée dans la cour si vous avez du temps à m'accorder.

Oui, j'étais redevenu un peu trop protocolaire. J'étais comme ça même avec ma mère. Je ne demandais jamais rien au final et là, j'avais ce besoin de percer un peu ma coquille. Ma relation avec Amy s'était terminée abruptement. J'en souffrais profondément aussi. Je prenais une inspiration en plantant mon regard bleu dans le sien.

- S'il vous plaît ...

Je n'avais pas envie d'avoir quelqu'un d'autre avec nous. Je n'avais pas envie que Lina soit des nôtres pour une fois. J'avais vraiment besoin de ce moment au même titre que je savais que j'avais besoin d'un moment semblable avec ma mère. Je ressemblais beaucoup plus à cette dernière au niveau de mon caractère que je ne l'aurais cru. Je ravalais ma salive et je savais que ma patience n'était pas réellement là. Je continuais de taper doucement avec mes jointures en l'attente d'une réponse de sa part. Nerveux ? Sans aucun doute. Je n'avais jamais été le plus doué avec les mots et je ne voulais pas qu'il prenne mal les choses. J'évitais de regarder les autres autour. Je ne voulais pas répondre aux questionnements des uns et des autres. C'était déjà assez compliqué comme ça.

Tout était encore flou dans la tête de Robin qui continuait à cohabiter avec Bobby. Et ce n’était pas aisé de devoir gérer deux personnalités aussi différentes. Cependant, l’archer émérite de Sherwood avait relégué ce petit souci au second plan, le plus important étant sa famille qu’il venait enfin de retrouver après un temps indéfini de séparation. Ils avaient donc tous regagné la Forêt Enchanté et plus encore le palais de la reine ; accessoirement l’épouse de Robin. Et parmi ses retrouvailles, celle avec Richard occupait une place importante dans le demi cœur de l’archer, qui avait eu l’occasion de passer beaucoup de temps non pas avec Richard, mais avec Dean lorsque lui-même était Bobby. C’était étrange et frustrant à la fois. Il demeurait ce goût d’inachevé mêlé à la joie d’avoir malgré tout pu passer du temps avec son fils ; une expérience que Robin voulait réitérer avec les bonnes cartes cette fois. D’autant plus que l’intrépide Richard semblait s’effacer progressivement, ne se mêlant que très rarement aux autres. Robin voulait donc en profiter pour être seul avec son cadet et mieux bénéficier de ces retrouvailles qui n’avaient pas vraiment eu lieu.  

Attablés, tous jouirent du copieux petit-déjeuner qui venait de leur être servi. Robin échanger avec tout le monde comme toujours, laissant son regard se poser sur Richard de temps à autre. Le jeune homme s’était encore isolé et semblait comme à l’accoutumée, un peu perdu. L’archer fit mine de ne rien voir à nouveau, il ne voulait pas inquiéter Regina. Toutefois, il avait bien l’intention de prendre son fils à part pour échanger avec lui. Par chance, ce fut Richard qui fit le premier pas à la fin du petit-déjeuner à la grande joie de Robin.

— J’ai tout le temps qu’il faut mon grand. C’est donc avec plaisir que j’accepte de venir m’entrainer avec toi à l’épée.  Il tâchait toutefois de réfréner sa joie pour ne pas effrayer son fils. — Tu n’as pas besoin d’insister Richard.  Il esquissa un sourire tout en observant le jeune homme qui jouait de ses points sur la table. Il n’était pas patient, tout comme sa mère, ce qui incita l’archer à se redresser presque aussitôt. — Eh bien, allons y !  Et ce sont sur ces belles paroles que Robin entraina Richard hors des murs de la grande salle de réception. — Tu sais, nul besoin d’être protocolaire avec moi. Je sais que ce n’est pas facile pour toi, autant que pour Lina, mais tu peux me tutoyer, comme Dean le faisait avec Bobby.  Il l’affubla d’un clin d’œil, espérant ainsi le mettre un peu plus à l’aise.

— Je te propose de quitter le château. Rien de mieux que la forêt pour entrainer le corps et l’esprit. Et puis j’ose espérer que nous serons plus en paix en pleine nature. Qu’en dis-tu ? 

Dean avait été mon bon côté. J’oserais même dire, qu’il avait été le meilleur. Désormais, il n’y avait que le négatif ou presque qui prenait le dessus. Je n’arrivais pas à faire ressortir le bon après toute la souffrance que j’avais à l’intérieur de mon corps. Souffrance que j’avais refoulé au maximum. Ma rupture violente avec Amy n’aidait pas. Je n’avais pas vu le coup venir et je ne savais même pas comment en parler au final. J’étais pris dans ce tourbillon difficile et je cherchais comment m’en sortir. J’avais besoin de ma famille plus que jamais. J’avais besoin de mon père plus que je ne voulais le croire. Un entraînement ensemble serait la meilleure option dans mon cas. Je ne voyais pas comment faire les choses autrement en fait. Je ne voulais pas parler devant la famille. Mon père me disait que je n’avais pas besoin d’insister, mais je ne savais pas comment lui dire à quel point c’était important pour moi d’être seul avec ce dernier. Maladroit dans mon vouvoiement car je ne savais plus du tout comment me comporter avec tout un chacun. Avais-je l’âme d’un prince seulement ?

Je suivais mon père en dehors des murs de la salle de réception. Je marchais au même rythme que ce dernier en l’écoutant. Je tournais la tête vers lui légèrement. Je poussais un soupir et je me passais une main sur la nuque.

- Dean … J’ai l’impression que ce n’était pas réellement moi alors que ça l’était … Un peu comme toi avec Bobby au final j’imagine.

Léger sourire en coin. Bobby avait un sacré caractère et j’avais été loin de le détester. Le destin avait voulu que je passe du temps avec mon père plus que je ne l’aurais cru. Mon père me faisait finalement une proposition qui me plaisait. L’idée de sortir des murs du château et d’aller nous entraîner dans la nature. J’espérais que je n’aurais pas le plaisir de tirer à l’arc. Ce n’était, clairement, pas mon point fort en combat. J’étais un homme de corps à corps. Un homme de terrain qui aimait sentir le danger à quelques mètres. Un guerrier en pleine formation ou un chevalier que sais-je ? J’avais l’impression de perdre mon identité et de devoir la retrouver. Une croisade que je devrais affronter seule malheureusement.

- Je suis d’accord. Je crois que j’ai suffisamment vu les murs du château dans l’immédiat. J’ai légèrement exploré autour sans oser trop m’aventurer seul. Je ne voudrais pas me perdre une fois de plus.

J’allais aux écuries et je m’approchais de mon cheval. J’aimais bien cette bête et j’en prenais soins. Je le scellais comme si de rien n’était. Mouvements naturels alors que je grimpais sur le dos de ce dernier ensuite. Étalon à la robe noire comme la nuit. J’attendais mon père avant de le suivre dans la forêt une fois sorti de l’enceinte du château.

- Papa … Comment sait-on que l’on croise le véritable amour ?

J’aurais dû me taire …

Il était encore difficile pour Robin d’être totalement lui-même ; si bien que parfois il venait à se demandait comment son alter ego new-yorkais se serait comporté dans telle ou telle situation. Bobby était plus fougueux et sûrement moins enclin à faire preuve de retenue ; en clair, le flic n’avait aucun tact à l’inverse de Robin qui savait arrondir les angles. Mais il fallait bien reconnaître à Bobby une plus grande liberté que l’archer en venait à lui envier parfois ; une de celle qui avait au moins eu l’avantage, après des débuts laborieux, de faciliter la relation avec Dean. Ainsi, le jeune homme était redevenu Richard et semblait lui aussi éprouver de grandes difficultés quant au fait de savoir comment se conduire en public. Robin ne s’en formalisa point, mais il fallait bien reconnaître au vouvoiement une désagréable distance. Richard avait besoin de temps tout comme sa jumelle pour pleinement apprivoiser cette nouvelle vie. Dès lors, leur archer de père préférait relativiser, ne doutant point du fait qu’un jour ou l’autre le jeune et intrépide pirate serait prêt à se rapprocher de son illustre paternel.

En attendant, les deux hommes avaient prévu de s’octroyer un peu de temps hors des murs du château. Robin ne cherchait pas à comprendre cet empressement si soudain, il sentait bien que le blondinet n’était pas à l’aise de lui demander cette faveur. Peut-être prenait-il sur lui et suivait d’hypothétiques conseils. L’archer préféra toutefois laisser ses réflexions de côté et osa lancer un semblant de conversation en évoquant New York. Cependant, il comprit bien rapidement que ce pan de l’histoire mettait mal à l’aise son fils autant qu’il pouvait l’être parfois en songeant à son double.  — C’est une expérience peu commune n’est-ce pas ? Certains habitants de Storybrooke l’ont déjà vécu et je n’ose imaginer le bazar qu’il y a dans leur tête présentement. Toujours est-il que je dois reconnaître quelques qualités à Bobby et je suis certain qu’en creusant un peu, tu en trouveras à Dean. 

L’époux de Regina proposa ensuite de quitter le château pour regagner son domaine, la forêt. Il espérait aussi décrisper Richard, assez pour que ce dernier soit un peu plus à l’aise avec son père. Et quoi de mieux qu’un entrainement en bon et due forme pour se faire ? Il pourrait aussi furtivement jauger les capacités de son fils au combat ; un domaine qu’il maitrisait contrairement à la magie exclusivement dédiée à Regina.

— La vie de château ne peut pas plaire à tout le monde et il est vrai que pour un homme de terrain, il est difficile de réprimer l’appel de l’aventure.  Il s’approcha des écuries entretenues avec soin par quelques palefreniers qui mettaient du cœur à l’ouvrage en cette journée pluvieuse. — Je connais la Forêt comme ma poche, assez pour jouer les guides.  Il attrapa tout ce qu’il fallait pour monter à cheval non sans hésitation, lui qui n’avait pas pratiqué l’équitation depuis longtemps. — J’ose espérer que comme la bicyclette, cela ne s’oublie pas. Dis-moi, as-tu déjà fait de la moto ?  lança-t-il une fois le cheval monté. La légèreté était de mise, plus encore lorsque Richard s’autorisa à appeler Robin « papa » avant de lui poser une question qu’il n’avait pas vue venir et qui le désarçonna l’espace d’un instant ; assez pour instaurer le silence durant un court moment.

— Je suis à peu près sûr que tu regrettes déjà de m’avoir posé la question. Je me trompe ?  Ils commencèrent à s’éloigner des écuries, puis du château. Robin songea alors à sa première rencontre avec Regina ; un souvenir qui laissa paraître un léger sourire sur son visage. — Il y a des signes, comme les battements de ton cœur qui s’enrayent lorsque tu croises son regard. Il arrive aussi d’avoir le souffle coupé ou de se retrouver à dire des choses idiotes sans raison. Mais ça, c’est de l’ordre de l’anecdotique, car dans le fond cela ne s’explique pas. Lorsque tu plonges ton regard dans le sien, sans même avoir besoin de comprendre c’est évident, autant que cela puisse paraître absurde ; car comment peut-on dire que cela relève de l’évidence alors que nous n’avons aucune explication censée à fournir ? Quand j’ai vu ta mère pour la toute première fois, outre la situation problématique pour elle, j’ai senti comme une décharge électrique m’assaillir le corps. Je ne la connaissais pas et sans réfléchir, j’ai pris tous les risques pour elle. S’il fallait recommencé, nul doute que je ferais exactement la même chose, sans me poser la moindre question. Alors à mon humble avis, je pense que tu le sauras, lorsque le grand amour se présentera à toi ; là-dessus, je n’en ai pas le moindre doute.

Quelle part de Dean était la mienne ? Quelle part de cet homme était ma personnalité ? Il semblait tellement être mon propre jumeau. Il semblait être le gentil et le rigolo. Le meilleur de ma personne dans un certain sens. Je n’osais pas réellement dire ce genre de choses de peur de perturber ma jumelle. Elle était tellement plus adaptée que moi aux changements. Moi, j’aimais ma petite routine. Je n’aimais pas quand les choses changeaient. Je prenais une profonde inspiration alors que nous sellions nos chevaux pour partir mon père et moi. J’avais sans aucun doute trop tardé à discuter avec ce dernier. J’avais besoin de passer du temps avec lui pour réapprendre à le connaître. Je n’avais que de vagues souvenirs de Bobby. J’avais surtout connu le mauvais au final.

- Dean avait toutes les qualités au final si tu veux mon humble avis. Il était bien trop naïf et trop sure de lui. Je ne suis pas comme ça.

Un regard dur, mais pas envers lui. Un regard que je portais envers moi-même. Je me mettais à rigoler alors que mon père me parlait. Il avait de l’humour quand même et je l’appréciais. Je ne voulais pas être en mauvais terme avec lui. Je le regardais en caressant mon cheval avec douceur.

- Dean faisait de la moto. J’imagine que je saurais en faire si j’en avais une, mais je crains que nous n’ayons que nos amis ferrés pour l’occasion. Ce n’est pas plus mal… Mais arrête de me pousser toi ! On va partir je te le promets !

Ma langue se déliait ensuite et je détournais la tête. J’aurais dû me taire plutôt que de parler de l’amour. Je tenais ça de qui cet espèce de romantisme que j’avais d’enfoui au fond de moi ? Je prenais une profonde inspiration en levant les yeux vers lui à sa question. J’étais son fils, il savait forcément que je regrettais la question que je venais de lui poser. Mon père se mettait ensuite à sourire et je l’écoutais avec attention alors que le cheval me taquinait en tentant de mordiller ma chemise. Je poussais sa grosse tête.

- Hum …

Silencieux pas possible alors que je montais mon étalon. J’y allais doucement en attendant mon père. Je pensais et étrangement, ce n’était pas Amy qui me venait en tête mais bien cette femme magnifique et ses cheveux blonds. Je restais de marbre comme jamais en regardant l’horizon avant de finalement me mettre en route. Un trot alors que je regardais autour. J’avais toujours été un bon cavalier. Je venais finalement me mettre à la hauteur de mon père après de longues minutes.

- Et si j’ai besoin de changer de monde pour la retrouver ? …

Mon regard qui se levait vers lui avec le plus grand sérieux du monde. Si j’avais la chance de revoir Raiponce, je le ferais quitte à me reprendre un coup de poêle en pleine gueule. Justement, cette pensée me faisait faire un sourire en coin et je me mettais à rire comme un pauvre idiot tout seul. Il allait tellement me trouver bizarre, mais moi, je continuais de rire. J’étais réellement une cause perdue.

Les débuts ne furent pas simples, il fallait encore s’apprivoiser, mais Robin ne désespérait pas de mettre à l’aise Richard, assez pour qu’il amoindrisse un tant soit peu l’armure qu’il portait même en sa compagnie. Robin savait malgré tout, qu’il faudrait bien plus qu’une balade à cheval, mais il ne désespérait pas de passer un bon moment avec son fils cadet qui consentait déjà à s’exprimer, lui qui n’était jusqu’alors pas très loquace.

— Ah non, Dean n’avait pas toutes les qualités du monde. C’était une tête brûlée, un petit trou de cul si je puis me permettre, mais je crois qu’une part de Bobby se reconnaissait en lui, tout comme une part de moi se reconnait en toi mon grand. Je sais que tout n’est pas facile à vivre. Après tout, ça n’est pas très agréable d’avoir deux personnalités qui se côtoient dans ta tête au jour le jour. Ni d’essayer d’apprivoiser une vie qui nous échappe. Il marqua un silence, caressant à son tour sa monture pour lui faire comprendre qu’il n’était pas apeuré. Richard demeurait sur la défensive, ses mâchoires étaient serrées et son regard dur, ce qui n’empêcha point son archer de père de redoubler d’humour et de parler mécanique. Et comme une éclaircie en pleine tempête, Richard laissa paraître un léger sourire sur son visage. C’était une première victoire pour Robin, qui satisfait, renchérie sans attendre.

— Ta mère m’en a offert une quand nous vivions à Storybrooke. Elle l’a même fait ensorceler pour que je ne me prenne pas un royal gadin. Si je la retrouve un jour, je serai ravi de te laisser en faire.  Il le pensait sincèrement, autant qu’il s’imaginait sans mal en faire avec lui. — Mais tu as raison, faute de mieux, nous allons devoir nous contenter de nos amis ferrés pour l’instant.  Et poussés par l’impatience des chevaux, père et fils levèrent le camp, avides peut-être de nouvelles aventures loin du château.

Les minutes s’égrenèrent, le temps demeurait agréable, assez pour sentir le vent léger caresser avec tout autant de bienveillance, le visage marqué de Robin. Les oiseaux quant à eux, gazouillaient à tout va sans se soucier de la présence des deux hommes. Tout semblait si paisible et pourtant prévisible, du moins ça l’était avant que Richard ne se lance sur un sujet délicat, l’amour.

— Je vois !  lança l’archer avant de se laisser emporter par son expérience du romantisme et cette histoire qu’il partageait avec Regina. Richard semblait se décrisper et écoutait avec grande attention les paroles de son père, loin de s’imaginer toutefois qu’ils allaient causer romantisme aujourd’hui. Mais force est de constater que Richard était plus loquace à présent et curieux d’avoir l’avis de Robin à en juger par l’interrogation qu’il venait de formuler avant de se fendre d’un éclat de rire.

— Si tu es sûr que c’est l’amour de ta vie, changer de monde c’est bien peu de choses.  À son tour, l’archer se mit à rire avant d’imposer un autre rythme à son cheval pour prendre l’ascendant sur son fils et introduire les prémisses d’une course.

[b — L’amour est un grand voyage ! [/b] lança-t-il avec quelques foulées d’avance. — Et une course que je te défie de gagner gamin ! 

Passer du temps avec Richard était salvateur à bien des égards. Bien sûr, Robin n’était certainement pas assez naïf pour se dire qu’une ou deux rencontres suffiraient à gommer tout ce qui s’était passé en amont. Il en faudrait bien plus et ce temps, l’archer était prêt à l’allouer à son fils cadet. La balade à cheval à travers la forêt tombait à point nommé et mettait les deux hommes dans de très bonnes dispositions. Le palais avait beau gagner en chaleur humaine, l’affut de réfugiés en tout genre et les multiples demandes accaparaient le temps de Robin, assez pour que l’envie de liberté se fasse ressentir de temps à autre.

Ils avaient donc quitté le château, presque au triple galop pour mieux se repaitre de cette petite liberté qui leur était accordée. Robin ne boudait pas son plaisir de se répandre en paroles, plus encore lorsqu’il fut question de parler de l’amour de sa vie. Il est vrai que le simple fait d’évoquer Regina ravivait bien des émotions dans le regard de l’archer qui sentait son fils se détendre à mesure qu’ils progressaient.

— Ta mère est très protectrice effectivement, mais avec tout ce que la vie lui a réservé par le passé, je ne peux lui en tenir rigueur. Ceci dit, je suis d’accord avec toi. Le roi Richard, celui à qui tu dois ton prénom, disait à ses soldats après une défaite, aussi minime soit-elle qu’il faut d’abord savoir tomber, avant de pouvoir se relever. Malheureusement pour moi, je n’ai pas eu l’occasion de voir ce que cela faisait sur une moto. Il affubla son fils d’un clin d’œil. — Ta mère est… très peut-être trop protectrice avec toi et Lina, mais c’est normal après tout ce qui vous ait arrivé. Mais je suis sûr que si tu te décides à changer le monde, elle n’en sera que plus fière encore, autant que je pourrais l’être. Changer le monde est un beau projet d’avenir. Mais promis, je ne dirais rien à ta mère, du moins pour l’instant.

Les deux hommes s’apprivoisaient sans cesse, se jaugeant avec bienveillance et une fois n’est pas coutume c’est sur le terrain de la rivalité qu’ils se rencontraient par le biais d’une course à cheval instiguée par Robin en personne. — Moi tricher ? Jamais ! Aussitôt, il ordonna à sa monture d’accélérer alors que Richard, derrière, tâchait de ne pas se faire distancer ; il parvint même, l’espace d’un instant, à passer devant avant que son archer de père reprenne la tête de la course.

— Tu feras mieux la prochaine fois hein ?

Les deux montures, de concert, ralentirent progressivement à l’approche du lac. Robin fut le premier à fouler la terre pour inciter son destrier à le suivre. — On va laisser les chevaux se désaltérer un peu ; on leur doit bien ça après la course qu’ils viennent de faire. C’est un coin que j’aime beaucoup et je trouve ça chouette de te le faire découvrir. Ensuite, si tu veux, je pourrais t’enseigner quelques petits trucs. Sauf si tu veux me parler de quelques sujets en particulier.