Je ne te reconnais plus

Atterré à se demander quand est ce qu’il trouverait ce dont il avait besoin, Ilan était là, à se dire qu’il voulait retourner à New York, et ce, même si au fond, Storybrooke était moins pire qu’il le pensait. Mais il savait que ce n’était pas tout à fait là qu’il voulait être, du moins pas comme ça, et lui, qui aimait les situations faciles avait l’impression que depuis qu’il était là, tout était compliqué.
Surtout entre son père et lui.

Mains dans les poches, alors qu’il sortait d’un cours, il avait le nez plongé dans ses pensées, qu’il ressassait beaucoup trop à son goût au lieu de se consacrer à autre chose….Comme sa dernière lecture. Le dernier Isaac Asimov qu’il avait dévoré lui avait fait du bien, surtout qu’il aimait bien cet auteur – peut-être parce qu’il avait le nom de son père, qui sait ?
Repensant à ce bouquin, il songea au prochain qu’il lirait, quand il leva la tête et eut une vision qu’il aurait préféré éviter.
Mais elle exista, était devant lui, et Ilan ne pouvait pas faire comme s’il n’avait rien vu.
Certains diraient que son père était un adulte, qu’il faisait bien ce qu’il voulait de sa vie. Que même Ilan était un adulte maintenant – ce qui lui faisait toujours bizarre, lui qui avait vécu au pays imaginaire en restant cet enfant qu’il avait longtemps été -.
Disons juste que… Il ne put pas supporter de voir son propre père rentrer dans un endroit nommé « Libertease ».
Et que sans attendre, se renfrognant un peu, il entra à son tour, peu content de constater des fréquentations de son père. Etait-il ainsi à New York, sans qu’Ilan le sache ? A aller dans des endroits aux noms douteux, et, qui vu leur intérieur était de plus en plus louche ?
Il ne pouvait pas vraiment le laisser faire sans rien dire.
Et il ne pouvait pas attendre qu’Isaac retourne à la maison pour lui en parler.
Ilan était trop impulsif pour ça. Alors, il l’affronterait directement dans le lieu du méfait.

Si méfait il y avait, mais méfait semblait-il y avoir.
Restant un instant debout, il vit le dit méfait. Il fronça les sourcils, et alors que la serveuse venait à le servir, il s’approcha de lui, comme un bélier furieux.
Mais avant d’arriver à sa banquette, il décida que juste se mettre en colère serait futile, et soufflant un coup, et s’assit à côté de son très cher papa.

- Je croyais qu’on était ici parce que c’était une rousse qui te faisait tourner la tête. Je pensais pas que d’autres… Chevelures te faisaient effet, papa.

Son dernier mot avait été prononcé avec dureté, alors que ses yeux flamboyaient quand même de colère. Il fixait son père, et en même temps il se sentit trahi, et déçu, aussi. Il ne savait même pas laquelle de ses deux émotions prenait le pas sur lui. Toujours est-il qu’il n’était pas content du tout.

Se saisissant d’un des verres d’Isaac, il le but d’une traite. Ilan n’avait pas réfléchi, et il aurait sûrement dû. Malgré toutes ses années à passer à côtoyer les gosses de riche, et les fêtes, et les trucs du genre, il était évident qu’Ilan… N’aimait pas boire et ne buvait que rarement.
Alors non seulement l’alcool lui brûla la gorge, mais en prime, il n’apprécia pas son verre.

Mais maintenant, il attendait quand même des réponses à ses questions non posées. Et borné comme il était… Il ne quitterait certainement pas la banquette aussi facilement.

feat. Ilan et son papounet

Je ne te reconnais plus

En fait, Ilan fut assez intelligent pour vite comprendre que son père était dans un état suffisant pour ne même pas… Retenir éventuellement tout ce que son fils lui disait. Il puait l’alcool à plein nez. C’était aussi pour ça qu’Ilan avait bu le verre. Eviter à son père de continuer dans sa lancée.
Lancée qui commença mal, quand son père fit « Bang, droit dans le mille ».
Ilan se sentit grimacer, et il entendit ensuite son père lui reprocher son acte de vol vis-à-vis de son verre. Il leva un sourcil. Ouais. Son père était bien atteint par l’alcool, ce qui continua de le décevoir.

- Je picole pas, c’toi qui picole, fit alors le fils, d’un air légèrement las et un peu grognon.

Ah, Ilan était un gentil garçon, mais il avait aussi un brin son caractère, c’était un fait.
Il vit son père remplir son verre par la magie, et il se sentit jaloux. Comme chaque fois qu’Isaac utilisait son don devant lui.
Ilan voulu en placer une, mais son père fut plus rapide.
Et voilà qu’il parla de façon assez décousue, parlant de faire une pause, et de mater les filles sans les toucher. Ca n’arrangeait pas sa façon de voir les choses, à Ilan, qui ne pu s’empêcher de se sentir toujours plus en colère. Toujours plus déterminé à arrêter son père dans son action.
Il faisait une pause ? C’était une blague ? Après tout ce qu’il avait fait ?! Il pensait se rattraper comme ça ?
Jamais, Ilan ne pouvait pas laisser passer ça.

Et sa gueule de bois, quand son père en aurait une jolie, il s’arrangerait pour lui faire comprendre sa douleur.
Ca n’était pas très gentil, d’autant qu’Ilan adorait Isaac, mais pour le coup, il se sentait plus désireux de vengeance, que d’être tout mignon et attentionné envers Isaac. Même s’il le savait… Il prendrait quand même sûrement soin de son père.
Parce qu’il ne pourrait pas s’en empêcher.
Quel maudit fils à papa faisait-il à agir de cette façon…

Mais déjà Isaac partait dans son délire, attrapant même son fils, lui contant Agrabah.
Son fils se dégagea, le fusillant un peu du regard :

- Agrabah, j’te rappelle que j’y suis jamais allé, alors t’as pas besoin de m’en parler, je peux pas imaginer.

Et voilà, il craquait et continuait de parler sur un ton froid, sur le ton de celui qui n’était pas content.

- Et comment je pourrais ne pas te reprocher d’agir comme un imbécile, alors que j’attends mieux de toi ? Te fous pas de ma gueule, papa. Et ta future gueule de bois tu vas la sentir passer, c’est moi qui te le dis. Si y faut, j’fais que Diaval redevienne un piaf, j’le choppe, et j’fais qu’il te tape la tête en permanence avec ton bec.

C’était très cruel, mais plutôt imaginatif comme torture.
Ilan tenta pourtant de se reprendre, après avoir lâché un long soupir :

- Si t’es pas content d’être ici, si ça te rend alcoolo, on peut rentrer tu sais. Rentrer à New York. On aura la paix, et tout…

Même si ça n’aiderait pas les envies qu’Ilan avait quant à posséder un tant soit peu de capacité magique.

- Et tu t’amuses vraiment, franchement ? Tu bois. C’est tout. Ca sert à que dal, de boire. Et crois moi, je le sais plus que tu ne le penses.

Bien qu’il n’ait jamais « picolé », en vérité. Mais des abrutis à des fêtes qui buvaient trop et qui en payaient le prix, il en avait vu des nombreux.

feat. Ilan et son papounet

Je ne te reconnais plus

Il était évident que leur conversation avait mal commencé, et qu’elle ne faisait que s’envenimer au fur et à mesure. Ilan supposait que le fait que son père soit bien saoul n’aidait pas à la paix et à la réconciliation. Et de fait, il n’avait pas tort.
Il entendit Isaac pourtant, lui dire qu’il aurait préféré que son fils ne le voie pas ainsi. En un sens, qu’il l’avoue calma légèrement l’étudiant. Mais pas assez pour qu’il lui foute la paix. En un sens, il était heureux d’avoir assisté à ça, pour pouvoir réprimander son père. Il imaginait que ça lui ferait éviter de recommencer.
Mais s’il était comme ça avant, si c’était une facette qu’Ilan n’avait alors jamais vu avant, que pouvait-il faire réellement ?

Et de toute façon, le garçon se sentit énervé un peu plus quand son père fut clair avec lui. A nouveau il voulait retrouver Noa, et surtout… Il ne voulait pas rester ici. Parce que « lui et Ilan n’étaient pas de ce monde ».
C’était peut-être vrai.
Ilan venait d’un monde qu’il n’avait jamais trop connu sinon pour le pays imaginaire.
Mais n’avait-il pas été assez balloté ? Il avait été emmené dans le monde réel, puis le monde imaginaire, puis le monde réel, puis Storybrooke… Toute sa vie n’avait été que ballotement. Inconstance suprême qui commençait clairement à le fatiguer. Encore plus maintenant qu’il était adulte.

Alors qu’il allait lâcher une bombe, sous la colère, fulminant, son père l’interrompit.
Pour lui dire que rien ne l’amusait en ce moment. Et si l’inquiétude gratouilla le fils, il n’empêche que la colère qu’il ressentait à cet instant était trop large pour qu’il la laisse simplement passer.
Pire encore au vu des dernières paroles de son père.

Alors que son père se levait lentement, lui, Ilan se leva comme un ressort.
Attrapant Isaac par les épaules, il lui fit face, avec toute la colère qui pouvait se permettre de traverser son visage. La colère. Le mépris. Sourcils froncés, yeux brillants, souffle lent.
Cette fois, c’était trop. C’était la goutte d’eau. Et Ilan savait qu’il ne pourrait plus se retenir, au fond de lui.

- Te fous pas de ma gueule, papa.

Sa voix était rauque, et son air énervé. Il fulminait.

- Tu crois que je connais rien à la vie ? Je veux dire, j’ai peut-être une apparence de vingt et ans, mais je sais parfaitement avoir vécu plus que ça. Tu sais pas non plus ce que j’ai traversé. J’ai accepté de te suivre parce que j’avais besoin de toi. J’avais besoin de ce qu’on a partagé.

Ilan avait parlé au passé, parce qu’il avait l’impression que tout ça était révolu.
Il le tenait bien, fermement, il ne voulait pas le laisser s’échapper comme ça.

- Et maintenant, tu décides de papillonner avec une fée, et tu m’annonces qu’on va encore bouger ? Te fous pas de ma gueule, putain.

La vulgarité traversa sa bouche sans attendre, à vrai dire.

- On n’était pas bien à New York ? Tu t’amusais pas là-bas ? Pourquoi on est venu là au final ? Pour que tu tournes autour d’une fée ?! Pour « rentrer chez nous » ?! En quoi c’est chez moi ?! J’y ai jamais vécu je te rappelle ! J’en ai assez de bouger, et d’être oublié ensuite ! J’en ai assez de faire ce que tu veux, pour que dal !

Il avait crié. Et malgré les bruits environnants, comme la musique ou les nombreuses discussions, il était évident que sa voix avait traversé toute la pièce. Mais Ilan se fichait bien d’être remarqué, vu comment il fatiguait.

feat. Ilan et son papounet