Un dîner aux chandelles ?

Ma vie, c’était à n’y rien comprendre. Moi qui m’étais juré de ne plus retomber dans le piège des sentiments, me voilà en train de penser à un homme sans cesse, et pas n’importe lequel… Bobby Arrow. Le père biologique de Lynaya. Là, j’étais mal. Si l’un ou l’autre apprenait la vérité… C’était peut-être ça qui me faisait y penser sans cesse… Ou peut-être l’incroyable profondeur de l’océan de ses yeux, ou encore son corps si bien dessiné…
Je m’égare.

Depuis ce petit déjeuner qui avait terminé dans mon lit, Bobby me rendait fréquemment visite au Poisonned Apple. Le pauvre était encore convalescent suite à cette balle qu’il avait reçu dans l’épaule… alors qu’il m’avait invitée à déguster un chocolat chaud dans son salon de thé préféré.
J’avais ouvert le bar et j’attendais désespérément que la clientèle afflue. Je songeais à ces deux adolescents qui étaient venus me voir à quelques jours d’intervalle, la jeune fille, CJ et le jeune garçon, Henry. Chacun semblait avoir des histoires familiales compliquées, et j’étais loin de me douter qu’ils étaient frère et sœur d’adoption, et plus encore qu’ils étaient mes enfants.
Quelques clients étaient venus commander des bières, et j’étais finalement là à essuyer des verres propres quand je reçus un SMS de Bobby. Moi qui m’attendais à le voir débarquer d’une minute à l’autre, vu qu’il avait pris cette habitude de passer me voir au moins une fois par jour, je fus surprise de lire qu’il ne viendrait pas… mais qu’il m’invitait à passer chez lui après mon quart de travail. Cela me fit sourire.


Tel fut le SMS que j’envoyai à Bobby. J’envoyai aussi un message à ma fille pour la prévenir que je rentrerais plus tard. Elle me répondit que de toute façon elle restait chez une amie. Je soupirai. J’espérais que c’était vrai.
L’heure de la fermeture sonna. Je n’avais pas fait une recette incroyable, j’avais d’ailleurs demandé à Elle de ne pas venir. La pauvre, plus ça allait et plus je diminuais ses heures, mais la réalité était que je ne pouvais pas la payer si je n’avais pas assez de clients.
Me voilà garée devant chez Bobby, à l’adresse qu’il m’avait envoyée dans le Bronx. J’avais hâte de le retrouver, et cette sensation me faisait bizarre… Qu’est-ce qui m’arrivait ? Est-ce que j’étais en train  de me transformer en une grosse guimauve comme ma copine Mary ?
J’arrivai finalement devant la porte de mon charmant flic et sonnai. Quand il m’ouvrit, je fus stupéfaite de… tout ! L’effort vestimentaire, la délicieuse odeur qui émanait de chez lui, sans parler de la sienne bien sûr… J’avais déjà envie de lui sauter dessus, mais ça sentait bon la cuisine et cela me donnait faim.

- Salut !

Il me laissa entrer et là… Je restai bouche bée quelques secondes. Est-ce que c’était des chandelles que je voyais sur la table ? Je le regardai de nouveau et il était plutôt bien habillé… Je me sentis un peu idiote pour le coup… Un dîner aux chandelles ? J’aurais dû rentrer chez moi me changer peut-être… J’étais en jeans, avec un T-shirt et un blouson en simili cuir, loin de la classe qui émanait de Bobby…

- Euh… tu m’avais pas dit que c’était une soirée formelle...

Un dîner aux chandelles ?

M a vie était étrange ces derniers temps. « Etrange » bien que le mot puisse paraître péjoratif, il n’en était rien. J’irais même jusqu’à dire que c’était une douce étrangeté si l’on omettait les séances de rééducation auxquelles je me rendais encore plus pour rassurer Mery que par conviction. Mais ça allait mieux dans l’ensemble et j’avais gagné en mobilité, assez pour ranger mon appartement. Pourquoi, me direz-vous ? Comme si j’avais une idée en tête. Ne peut-on pas ranger son appartement quand l’envie nous prend ? Je me fourvoie ? Décidément, l’on ne peut décemment vous tromper. J’avais bien quelque chose en tête et je me surprenais à y penser, moi qui d’ordinaire ne recevais jamais personne ici, encore moins une femme autre que Mery. Mais Roni était tout sauf une femme comme les autres et rien que pour ça, elle méritait que je prenne le temps d’arranger mon appartement pour la recevoir. Car oui, j’avais la ferme intention de la recevoir et pas juste pour siroter un café et manger une viennoiserie sur le pouce, ni même pour ne se résoudre à prendre qu’un verre. Non, je voulais faire les choses bien cette fois, mettre les petits plats dans les grands et sortir de ma zone de confort.

J’entrepris donc de pianoter avec habileté sur mon écran numérique pour rédiger un SMS que j’envoyais dans la foulée à Roni ; sans même prendre le temps de me relire tant, j’étais pressé de mener à bien toutes les tâches que je m’étais imposées.

« Salut belle inconnue. Je ne passerai pas aujourd’hui, mais rassure-toi, c’est pour la bonne cause. Ce soir, après ton quart de travail, rendez-vous dans ma garçonnière et c’est moi qui invite-régale. »


Une fois envoyé, j’enfilais — non sans mal – ma veste ; direction sur la galerie commerciale pour quelques « courses. » En fait de vous à moi, c’est relatif. J’avais prévu un repas sans chichi ; traduction un bon vieux Burger King avec une bonne décoration quand même. Preuve que l’on peut mettre les petits plats dans les grands malgré le menu. Et puis j’avais bien l’intention de surprendre — en bien j’espère — Roni en jouant sur les codes. J’avais donc opté en priorité pour de la décoration et de quoi faire une jolie table. Par chance, j’avais dans mes tiroirs de la bonne vaisselle, ce qui m’exemptait ici, de folles dépenses, inutiles qui plus est. Enfin, c’est relatif, car je venais de m’enquérir d’une vingtaine de bougies, de toute taille, d’une nappe rouge, puis d’une blanche (dans le doute.) Avant d’enfin regagner le Burger King du coin pour récupérer l’imposante commande passait quelques minutes auparavant avec mon cellulaire. N’étant sûr de rien, j’avais vu large pour que Roni ait le plus de choix possible.

J’avais donc les bras chargés en regagnant ma voiture, mais j’étais satisfait d’avoir pris le temps de faire quelques « courses. » Et en moins de temps qu’il faut pour le dire, j’avais regagné ma garçonnière pour en achever son rangement et le ménage qui allait avec. J’abusais éhontément du Febreeze et de l’ouverture des fenêtres pour une aération optimale avant d’aménager mon salon pour y installer une table sur laquelle je déposais ma belle nappe rouge et quelques futiles décorations. Le moins que l’on puisse dire, c’est que je ne ménageais pas mes efforts pour tout rendre présentable, à commencer par moi. Dans ma chambre, parfaitement rangée, se trouvait une tenue que je ne sortais que pour les grandes occasions. Celle-ci en étant une, je me voyais mal omettre le bel habit.

Les minutes passèrent — trop rapidement à mon goût — avant qu’enfin j’achève de tout installer. À n’en pas douter, jamais personne n’avait mangé un Burker King de cette façon et je n’étais pas peu fier du résultat. Il me restait à présent à me changer et peut-être prendre une douche. Tant qu’à être présentable, autant l’être jusqu’au bout non ? Cela me permettait de laisser le temps filer et puis je n’avais rien à préparer si ce n’est réchauffer les plats et les mettre sous cloche pour se donner l’illusion d’un repas digne de ce nom. La douche éclair expédiée, je pus ensuite regagner ma chambre pour m’habiller avant de retourner dans la cuisine pour réchauffer la nourriture et ainsi embaumer cette même cuisine d’une odeur exquise. J’eus à peine le temps de m’avancer davantage qu’on sonna à ma porte.

— J’arrive ! laissais-je échappé en achevant mes petits préparatifs avant de bondir jusqu’à la porte pour l’ouvrir et ainsi faire face, tout sourire à celle pour qui j’étais près à tous ces efforts. — Salut ! ne puis je m’empêcher de répondre en me décalant pour qu’elle puisse entrer et ainsi découvrir la petite ambiance romantique que j’avais mise en œuvre. Je la sentis tout d’un coup légèrement gênée par tant de formalités de la présentation.

 — Alors non, je ne te l’ai pas dit parce que ce n’est pas une soirée formelle. Tu verras, il ne faut pas se fier aux apparences. En attendant, puis-je prendre votre veste ? Je lui laissais le temps de me répondre et d’accepter cette étrange proposition digne d’un jeu de rôle tout aussi étrange. « — En fait ce soir madame, je suis à votre service ! » À l’approche du salon, je pris soin de lui décaler la chaise pour qu’elle puisse s’assoir plus facilement.  — Je m’éclipse quelques secondes très chère. Juste le temps de vous apportez un grand cru et de quelques petites choses à grignoter. Le sourire aux lèvres et fier de mon petit effet, je regagnais la cuisine, ouverte de surcroit avant de verser le soda dans les verres à champagne. Je lançais ensuite le micro-ondes pour réchauffer l’assortiment de tenders de poulets ainsi que la barquette de frites nappées de bacon et de cheddar.

— N’hésite pas à faire comme chez toi ! Je revenais ensuite avec le tout, mimant la gestuelle d’un serveur. — Alors nous avons un grand cru coca cola light et quelques magnifiques morceaux de poulets fris avec en guise d’accompagnement des frites nappées de cheddar. Et tu n’as pas vu la suite, j’ai même prévu des cloches. C’est du sans chi chi de luxe avec des chandelles. Je ne pouvais m’empêcher de lui sourire, parce que j’étais bien, assez pour ne plus me sentir gêné de ressentir un tel état. — J’ai voulu te sortir le grand jeu, en restant raisonnable, parce que je sais que tu es comme moi, du genre sans chi-chi. Ca te plaît ?

Un dîner aux chandelles ?

Mais qu’est-ce qui se passait ? Bobby, d’ordinaire, c’était plutôt le genre relax, jeans basket et hamburger, alors pourquoi soudain il me recevais chez lui vêtu comme pour un foutu mariage, avec une tale dressée digne d’un restaurant quatre étoiles ?

- C’est des bougies que je vois ?!

Je me sentais un peu mal, parce que je n’avais fait aucun effort particulier, je crois même que je n’étais même pas coiffée, j’étais venue directement après avoir fermé le bar, en jeans, blouson en cuir et bottines… Je me mordillai la lèvre inférieure, me maudissant de ne pas avoir songé à au moins rentrer me changer au profit de quelque chose de moins… de plus… Je soupirai. Il voulut prendre ma veste. J’hésitai l’espace d’une seconde. Je portais un crop-top à l’effigie du nom du groupe AC/DC. Qu’est-ce qui était le moins pire ? Un dîner aux chandelles avec un blouson en cuir ou avec un T-shirt d’ado ? Je me décidai finalement à lui laisser prendre mon blouson, peu convaincue par son « ne pas se fier aux apparences ».

- Tu m’en diras tant… marmonnai-je.

J’esquissai néanmoins un sourire quand il déclara être à mon service, en faisant des tonnes. J’étais presque surprise de ne pas me sentir gênée d’être traitée comme une reine, une chose qui pourtant, à ma connaissance, ne m’était jamais arrivé…
Le temps de son absence, j’avançai un peu dans son intérieur, observant chaque détail. Lui qui avait si peur de me laisser venir avant un brin de ménage, en fait c’était plutôt clean chez lui. Puis il revint, et l’annonce de ce qu’il apportait me soulagea, me faisant rire.

- Tu m’as bien eue ! Fais plus jamais ça !

Je me saisis d’une des deux coupes pour trinquer avec lui.

- Merci, c’est adorable.

Son sourire me faisait fondre et était communicatif. Je dégustai une gorgée de soda avant de poser ma coupe pour venir l’embrasser. Ses lèvres m’avaient manqué, je devais le reconnaître.

- Oui, ça me plaît beaucoup, tu as de superbes idées, monsieur le flic. Que nous réserve cette soirée comme autre surprise ? Est-ce que je vais avoir le droit de visiter d’autres pièces de ton château ?

L’odeur du poulet frit et des frites au cheddar me chatouilla les narines et réveilla mon estomac. Je réalisai que je n’avais rien dans le ventre depuis mon café de ce matin.

- Mais la visite attendra la dégustation, tes frites au cheddar me font de l’oeil.

Je m’assis en face de lui, amusée à présent de voir la disposition de sa table dressée comme dans un grand restaurant, mais avec un plat de poulet frit au milieu. Bobby avait de la suite dans les idées, c’était remarquable.

- Je meurs de faim, merci beaucoup pour tout ça. Le luxe sans chichi, il fallait y penser.

Je remplis son assiette avant de faire de même pour la mienne et nous pûmes commencer à manger. Rien de tel qu’un peu de junk food après une grosse journée, c’était réconfortant. Et puis vu comment c’était parti, j’étais quasiment certaine que nous ferions un peu de sport après pour éliminer.

Un dîner aux chandelles ?

Elle était mal à l’aise, je pouvais le sentir à des kilomètres à la ronde, et ce malgré le fait qu’on ne se connaisse pas encore suffisamment pour avoir ce genre d’automatisme. À ma décharge, je peux prétendre assez bien cerner les gens. Toujours est-il que j’étais habillé un peu plus également qu’à l’ordinaire et que de toute évidence cette initiative mettait mon invitée mal à l’aise ; assez pour que je m’en veuille un peu sur le coup. — Des bougies ? Ah oui vraiment ? tentais-je avec humour pour essayer de dédramatiser la situation. — Non mais ce n’est pas grand-chose hein. Elles étaient soldées. De l’humour encore de l’humour. Ça va finir par se voir que je rame.

À présent, j’en étais à lui demander sa veste, comme il est d’usage chez les gens bien élevés ; enfin, je crois. Une initiative qui n’aidait pas Roni à se sentir plus à l’aise pour autant. — Ça va aller, ne t’inquiète pas ! Il ne fallait pas se fier aux apparences, cela sonnait comme une thématique pourrie dans laquelle j’étais en train de m’embourber. — Sympa le t-shirt ! Pas sûr que ça passe cette fois, mais il fallait le tenter histoire de crever un abcès qui n’avait pas lieu d’être. — Je t’assure que tu n’as pas à te sentir mal à l’aise et tu vas vite comprendre pourquoi. En attendant madame, je suis entièrement dévoué à vous. Un sourire prit vie sur son visage alors que je déposais sa veste sur le porte-manteau. Ainsi, je lui laissais un peu d’espace pour prendre ses marques, tandis que « j’œuvrais » en cuisine à l’abri des regards.

Vint ensuite l’heure de la révélation et je n’étais pas peu fier de mon petit effet en déposant ce qui faisait office de repas sur la table. — Ne pas se fier aux apparences, très chère. Mais si vraiment tu n’es pas une adoratrice de surprises, promis je ne recommencerai pas. Nous en vîmes à trinquer avant de déguster ce grand cru de coca light. — Eh bien je suis ravi que ça te plaise et plus encore t’entendre le mot “adorable” dans ta bouche. Elle me sourit, je lui souris en retard, puis elle déposa sa coupe et se rapprocha de moi pour venir presque aussitôt m’embrasser ce que j’appréciais particulièrement.

—Ah ça c’est une agréable récompense. Je l’incitais à venir s’asseoir sur mes genoux pour mieux passer mes bras autour de sa taille et savourer davantage cette délicieuse proximité qui nous était offerte. —Monsieur le flic est ravi d’entendre qu’il a de superbes idées madame la barmaid. Pour ce qui est de la suite, si tout se passe bien il se pourrait que je te fasse visiter mes appartements privés si tu vois ce que je veux dire. Ma bouche se rapprocha dangereusement de la sienne avant qu’un bruit étrange ne mette à mal notre rapprochement. —On dirait que ton estomac crie famine. Ne le faisons pas attendre alors. La visite pour plus tard, va donc déguster mes frites au cheddar avant qu’elles arrêtent de te faire de l’œil. Et ce sont sur ces mots pleins de sagesse que chacun reprit la place qui lui était allouée.

— Je t’avoue que tout ça me fait saliver aussi. Ce n’est pas tous les jours qu’on s’offre une part de luxe sans chichi, autant en profiter.  Roni assura le service avant de reprendre sa place. Je ne la quittais pas du regard tant elle me subjuguer.  — Tu veux rester dormir ? lançais-je presque innocemment en croquant dans une frite.

Un dîner aux chandelles ?

Je ne savais pas Bobby de nature aussi taquine, un vrai petit farceur. Il m'avait bien eue, je devais le reconnaître, moi qui avais commencé à stresser comme une malade en voyant l'exc`s de classe dans laquelle il me recevais alors quie j'étais en jeans et blouson de cuir...
Heureusement, le plus sexy des plaisantins de New York ne tarda pas à me rassurer en me faisant comprendre que tout ce luxe et ces chichis n'étaient que mascarade.
Je n'avais su résister à l'envie de laisser mes lèvres retrouver les siennes après une délicieuse et salvatrice gorgée de sorda dans une flûte à champagne. J'aurais pu le dévorer de baiser, assise sur lui à califourchon, mais il entendit l'appel criant de mon pauvre estomac délaissé depuis trop longtemps aujourd'hui. Alors, j'entrepris de servir nos assiettes respectives avant de m'asseoir à la place qui m'était assignée et de déguster des frites au cheddar.

- T'habitue pas trop, je dis jamais le mot adorable d'habitude, sauf quand c'est ironique, déclarai-je avec un clin d'oeil. Et j'ai vraiment hâte de faire la suite de la visite.

C'était délicieux, et pas seulement parce que je mourais de faim. C'était l'ensemble: partager un repas avec Bobby qui faisait l'effort de me recevoir chez lui, en plus il avait préparé des choses que j'aimais... Tout était parfait, tout simplement. Je dégustai ces frites dégoulinantes de fromage comme si c'était le meilleur met du monde, quand soudain Bobby me proposa de rester dormir chez lui. Je le regardai avec des yeux ronds, la bouche pleine, avalant tout rond ma bouchée.

- Oh euh... je m'y attendais pas... Si tu veux, enfin si c'est pas trop dur de me supporter, ironisai-je.

Après tout, ma grande fille était chez une amie ce soir et elle y passait deux nuits. Je pouvais donc moi aussi m'amuser un peu.

- C'est gentil de proposer.

Pour tout dire, je n'étais pas habituée à cela... Mes relations n'allaient jamais aussi loin que cela. Un dîner aux chandelles, c'était déjà un record pour moi, mais alors rester dormir chez un mec... Mais quelque part, j'en avais envie, et ce serait un peu comme boucler la boucle... Je m'étais fermée à cause de Bobby, j'allais sans doute me rouvrir à la confiance avec lui.

- Je vais plutôt te répondre que oui, ça me fera très plaisir de rester dormir chez toi.

Je me sentis idiote d'avoir buggué de la sorte, mais bon, on n'allait pas me refaire. Je continuai à déguster ce repas non gastronomique mais qui suffisait à faire le bonheur de mes papilles et de mon estomac. Bien vite, il ne resta plus rien.

- C'était délicieux. Je devrais peut-être t'embaucher pour faire les frites au cheddar au bar, qu'est-ce que tu en dis ?

Un dîner aux chandelles ?

J ’avais mis les petits plats dans les grands, chose que je ne faisais jamais d’ordinaire ; ou à quelques rares exceptions. Toujours est-il qu’avec Roni je sortais de ma zone de confort, je prenais donc quelques risques, mais sans que cela ne m’ébranle davantage. Pour être honnête, je me sentais à l’aise avec tout ça, j’étais même parvenu à faire taire l’odieuse petite voix dans ma tête. Oserais-je dire que c’était parfait ? J’en ai bien l’impression et un regard sur Roni suffisait bien plus que des mots. Un regard et des gestes, car là voilà assise sur moi à califourchon, m’offrant un baiser loin de me laisser indifférent, tout comme sa position. Je me surpris d’ailleurs à y prendre goût jusqu’à entendre son estomac crier famine et ainsi nous rappeler à l’ordre. Je la regardais donc remettre de la distance entre nous pour que nous puissions déguster plus confortablement le semblant de repas que j’avais préparé rien que pour elle.

— Ne t’habitue pas trop non plus, je ne cuisine jamais d’habitude, sauf pour la bonne cause  , déclarais-je en lui rendant son clin d’œil. — Mais si j’ai le droit au mot adorable et sans ironie qui plus est, je veux bien préparer des petits repas plus souvent.   J’avais tout aussi hâte de lui faire visiter le reste des lieux et plus particulièrement ma chambre ; mais il nous faudrait faire preuve de patience.

J’avais faim, mais certainement pas autant qu’elle à en juger par son empressement à dévorer ce qui était à portée de main. Le sourire rieur je l’observais, enivré par sa présence et par ce petit moment que nous partagions. J’en arrivais à me dire que cela serait sympa de réitérer l’expérience. J’exploitais donc l’accalmie en cours pour l’inviter à rester dormir ce soir, histoire de profiter le plus possible. Mais de toute évidence, Roni ne s’était pas préparée à une telle perspective à en juger par sa réaction. — Si je n’arrivais pas à te supporter, je ne me serais jamais risqué à te faire cette proposition. Sa fille était une adolescente, nul doute qu’elle parviendrait à se débrouiller sans sa mère l’espace d’une nuit. Et puis, de ce que j’avais compris, l’ado semblait valider le fait que sa chère et tendre maman voit quelqu’un ; moi qui plus est. J’en étais plutôt fière d’ailleurs, comme si tout d’un coup l’avis de la blondinette demeurait primordial.

— Ce n’est pas gentil, mais normal. Tu viens de terminer ton service et tu as eu la gentillesse de venir jusqu’ici. Il me paraissait donc normal de te proposer de rester dormir, pour en théorie te reposer un peu.  Je n’en demeurais pas moins certain que nous ferions tout, sauf nous reposer. Toujours est-il que ma belle Roni, le regard un peu dans le vide, semblait en pleine réflexion. — Ma question t’a fait bugger ? Après si tu ne veux pas, je peux comprendre. C’est comme tu le sens. Par chance, l’invitation lui avait fait plaisir, autant que la perspective de rester avec moi cette nuit. L’entendre de sa bouche acheva de me rassurer, car je ne voulais pas la voir partir, du moins pas ce soir.

— Loin de moi l’idée de m’immiscer dans ton job, mais avoue que ça pourrait être pas mal ce petit encas frites au cheddar ? Je me laisserai bien tenter par ta proposition, cela dit. Mais pas sûr que tu arrives à me supporter tous les jours. Qu’est-ce que tu en penses ? Inconsciemment (ou peut-être pas), je venais de tendre une perche ; pourvu qu’elle ne me revienne pas en pleine poire.

Un dîner aux chandelles ?

JJe commençais à m’habituer à l’étrange sensation que déjà-vu que j’avais en présence de Bobby, j’avais décidé d’arrêter de me poser tout un tas de questions, puisque de toute façon, j’étais bien en sa présence, et tant que le sujet de Lynaya n’était pas abordé, je ne risquais pas de commettre de boulette. Bon, je culpabilisais un peu d’ainsi cacher la vérité, mais après tout, il avait déjà manqué vingt ans de sa vie, en aucun cas il ne pouvait se revendiquer être son père. Non, je préférais largement profiter d’une bonne soirée avec cette homme qui me plaisait énormément physiquement et dont je découvrais une toute autre personnalité que celle qui m’avait laissée un goût amer deux décennies auparavant.
Il avait préparé un repas hautement non-gastronomique en me faisant cette petite farce en mettant les petits plats dans les grands, je n’avais pas marché, j’avais couru, mais à présent le subterfuge révélé, j’étais plus détendue, et aussi moins affamée après quelques bouchées. Un peu de malbouffe, ça faisait du bien, c’était réconfortant, et je pouvais me targuer de n’avoir jamais eu de problème d’excédant de poids, aussi n’allais-je pas culpabiliser… D’autant qu’il semblait évident qu’un peu de sport matelas suivrait pour dessert. Ce qui me déstabilisa, ce fut de l’entendre me proposer de rester dormir chez lui… C’était comme si notre relation passait un cap, comme si ce n’était plus seulement pour passer du bon temps et s’amuser, mais que ça devenait sérieux… Et qui dit relation sérieuse, dit vérité. Je revenais indéniablement à son lien de paternité biologique pour Lyna.

- Oh euh… oui, répondis-je en riant, ça m’a fait bugguer effectivement, j’ai… pas trop l’habitude on va dire. Mais ça va, je vais rester, merci.

Il était tellement craquant, ce sourire qui faisait naître une fossette sur ses joues, ce regard bleuté dans lequel j’avais l’impression de pouvoir me noyer pour le restant de mes jours en m’y sentant chez moi… C’était étrange. Mary me dirait que c’était ça le coup de foudre, j’en étais sure.
Au vu de l‘idée géniale de ses frites au cheddar, j’en vins à lui proposer de venir en faire au Poisoned Apple. C’était sorti tout seul, comme si je ne pouvais déjà plus me passer de lui. J’essayais cependant de ne pas trop lui montrer cet état de fait en simplement haussant les épaules.

- C’est vachement bon, si j’aime, les clients aimeront. Alors oui, je crois que ce serait pas mal, et comme tu es arrêté pour un moment côté police, peut-être que tu as envie de t’occuper un peu, non ?

J’eus un petit rire à sa dernière phrase.

- On peut déjà partir sur les fins de semaine et on verra si je te supporte, mais tant que tu tapes pas dans le stock de bière, ça devrait aller.

Je lui assenai un clin d’oeil. Le plateau de frites fut bientôt englouti et j'étais littéralement au bord de l'explosion, il nous fallait une petite pause digestive.

- Merci encore, ça a fait un bien fou !

Un dîner aux chandelles ?

J ’entendais comme une sorte de douce mélodie résonner à mes oreilles ; une de celle qui vous réchauffe le cœur allant même jusqu’à le désarmer. À cela s’ajoutait ma récente conversation avec Mery. Tout s’était passé si vite que cela semblait absurde ; à peine ai-je eu le temps de dire « ouf » que déjà je m’employais à faire quelques efforts, moi qui d’ordinaire en faisais si peu. Pourtant, à bien y réfléchir cela me semblait si peu que j’en arrivais à me demander pourquoi je ne l’avais pas fait avant ? Un regard, bien que furtif sur Roni, me permit de mettre un terme à mon questionnement. Jamais encore une femme ne m’avait fait ressentir de telles choses ; d’ailleurs à bien y réfléchir jamais encore une femme ne m’avait fait autant ramer. Elle avait du caractère assez pour s’opposer au mien, doublé d’une beauté sans pareille dont elle ignorait la puissance ; ou peut-être n’était-elle pas assez prétentieuse pour le revendiquer. Toujours est-il que je semblais bien incapable de me lasser de la contempler plus encore lorsqu’elle se laissait aller à quelques sourires tout en prenant grand plaisir à dévorer ce repas hautement non gastronomique que je m’étais risqué à préparer.

Tout roulait, enfin presque. Emporté dans un élan me dépassant à plus d’un titre, je saisis après coup le malaise résultant de ma proposition. Pourtant, je ne pensais pas à mal et je venais accessoirement d’inviter pour la toute première fois, une femme à passer la nuit ici avec moi. Il est clair qu’elle était à présent aussi déstabilisée que ma petite personne, mais certainement pas pour les mêmes raisons. Ai-je merdé ? Était-ce trop tôt ? Dis quelque chose espèce de crétin ! Tu vois bien qu’elle n’est pas à l’aise et qu’elle va finir par se décomposer.

— Non mais après si tu ne veux pas je peux comprendre. Si ça va trop vite, dis-le-moi , tentais-je en essayant d’être le plus diplomate possible. Pour se faire quoi de mieux que mon sourire, qui m’avait, je l’avoue, sauvé à bien des reprises. — Je ne voulais pas te mettre mal à l’aise…  commençais-je en plongeant mon regard dans le sien. À nouveau, je fus saisi par une étrange familiarité, vous savez, cette impression de déjà-vu qu’il vous laisse croire l’espace d’un instant que tout est possible, même l’omniscience. Quoique, à bien y réfléchir, je me demande si ce n’est pas plus profond ; comme si finalement ce regard insondable m’était familier depuis longtemps. Me revoilà en train de partir dans un délire mystique. Je devrais m’arrêter là avant de déblatérer mes conneries à voix haute. Et pourtant… Et si c’était elle ?

— Hum…  ruminais-je à sa suite, pas certain d’avoir tout suivi tant j’étais à des années lumières avec cette histoire de destiné. — Ah oui les frites au cheddar.  Je me raccrochais comme je pouvais aux branches, histoire de ne pas lui montrer que sa simple présence m’amener à me questionner sur des choses bien trop profondes pour moi.  — Tout le monde aime les frites au cheddar, du moins les personnes normales et saines d’esprit. En tout cas, je suis rassuré de savoir que tu l’es. Quoique, tu viens de me proposer un poste. Rien que pour ça je peux me poser la question de savoir si oui ou non tu es saine d’esprit ; ou alors peut-être est-ce pour toi la meilleure des excuses pour…  Je fis mine de réfléchir sans quitter son regard. — … pour m’avoir pas très loin ; parce qu’il est évident que tu ne peux déjà plus te passer de mes frites au cheddar.  Je jouais sur l’humour, mais c’était aussi une façon pour moi de la jauger sans mettre trop directement les pieds dans le plat comme je le faisais d’ordinaire.  — Pour ce qui est du stock de bière, sois tranquille, il n’a rien à craindre.  À mon tour je lui assenai un clin d’œil pour dédramatiser la situation.

— Roni, pour en revenir à tout à l’heure, je ne veux pas que tu te sentes mal à l’aise et si tu ne veux pas rester, je comprendrai. Bon, je ne te cache pas que je serais un tantinet bougon, parce que je pensais d’avoir conquis avec les frites au cheddar. La main vint saisir la sienne avec douceur. — Je ne veux rien brusquer parce que pour la première fois depuis longtemps, j’ai l’impression d’être enfin à ma place, comme si dans ton regard je retrouvais un peu de chez moi… C’est très niais ce que je viens de dire. À n’en pas douter, ça mérite un coup de batte dans les rotules.

Un dîner aux chandelles ?

Bobby se rendait-il compte du bien qu'il me faisait ? J'avais rarement été aussi détendue que ce soir, et ce depuis bien longtemps. Pourquoi et comment, avec cet homme, j'avais l'impression d'être une autre personne, comme si nous nous connaissions depuis des années, cette impression de valoir plus que ce que j'étais présentement... Malgré tout, les anciens réflexes étaient bien ancrés, voilà pourquoi j'avais un peu tiqué à sa proposition de rester cheez lui. Pour ça et aussi pour cette vérité inavouable à propos de son lien avec ma fille. Et pourtant, pour la première fois, je me laissais tenter à envisager une vraie relation de couple, un truc vrai et sérieux avec des sentiments et tout. Oh putain, je venais vraiment ne serait-ce que de penser au mot "sentiments" ? Waow, le charmant policier opérait réellement un sacré changement sur moi ! Et voilà donc qu'il s'excusait... À cause de moi, de ma réaction. Ce que j'étais conne parfois !

- Non, mais non ! Eh, arrête, écoute-moi. Ca va, OK ? Ca ne va pas trop vite ou que sais-je. C'est très mignon de ta part de me le proposer, et j'ai accepté parce que ça me fait plaisir de rester avec toi, OK ? dis-je en me penchant pour poser une main sur sa joue.

Pourquoi avais-je fait ça ? Il sortait d'où ce réflexe ? Aucune idée.

- Et ouim j'ai redit le mot "mignon", m'amusai-je. Comme quoi, tu es en train de me changer. Peut-être que je resterai pas une mégère acariâtre toute ma vie finalement, ajoutai-je avec un petit rire.

Je venais aussi carrément de lui proposer un poste de friteur au bar. Pourtant il n'y avait pas d'alcool sur la table. À croire que j'étais vraiment détendue du bulbe.

- Il me semble évident qu'il faut être fou pour ne pas aimer les frites, encore plus celles au cheddar. Et je crois qu'effectivement j'ai complètement perdu la boule en voulant te proposer ce poste, mais ce qui est dit est dit, il est trop tard à présent. Bon allez j'avoue, tu as raison, je ne peux plus me passer de tes frites aux cheddar, voilà, j'ai tout avoué ! ajoutai-je de façon faussement théâtrale avant de me mettre à rire.

Cependant, il redevint sérieux pour me redire que je pouvais encore refuser sa proposition. À mon tour, j'arborai mon air sérieux.

- Bobby... commençai-je en me levant pour faire le tour de la table et m'approcher de lui.

Là, je l'attrapai par les poignet pour l'obliger à se lever et me faire face, et dans la seconde qui suivit, ma bouche vint se plaquer contre la sienne. Je lui offris alors un baiser de quelques minutes avant de finalement me détacher.

- C'est la seule chose que j'ai trouvée pour te faire taire. Et si on passait au dessert ?

Ne quittant pas ses mains ancrées dans les miennes, je marchai à reculon, le regard plongé dans le sien, en direction du seul couloir présent qui donc devait mener à sa chambre.

Un dîner aux chandelles ?

J e riais, je souriais, j’étais sociable au possible, tellement que j’en étais le premier surpris ; et rien que pour ça, cette femme était incroyable à bien des égards. Avec elle, plus rien n’avait la même saveur et mon quotidien d’ordinaire si terne se trouvait pourvu de nouvelles couleurs. Je me languissais de chacune de nos rencontres et ce qu’importe l’endroit où elles devaient avoir lieu. Avec cette femme, je redécouvrais les plaisirs de la vie sans me sentir mal à l’aise, coupable ou débile ; ma fierté elle-même avait cessé de jouer les petits diables sur mon épaule encore endolorie. J’avais changé, assez pour prétendre être une autre personne ; une de celle que l’on apprécie et je le sentais avec mes rares interlocuteurs du moment. « Ah, Roni, te rends-tu compte du bien que tu me fais ? » Probablement pas encore, mais j’étais à peu près certain de ne pas être le seul à me poser des questions dans cette pièce. Nous étions deux âmes solitaires découvrant le grand frisson à bien des égards ; et pourtant ce n’est pas la nouveauté qui m’habitait, mais un sentiment de déjà-vu qui persistait ; comme si finalement les deux âmes solitaires ne l’étaient pas vraiment, comme si tout n’était qu’une illusion, une couverture.

J’étais bien, mais perdu à la fois. D’un côté, je me sentais pressé de passer plus de temps avec elle quitte à griller les étapes et tout d’un coup la réalité me rattrapait pour me faire insidieusement comprendre que je n’étais pas le seul dans cette histoire. Ce que je pouvais être con parfois ; assez pour me sentir obligé de m’excuser de m’être si vite emporté. Je ne voulais pas la mettre mal à l’aise et encore moins qu’elle se sente forcé de quoique ce soit pour que moi-même je ne me sente pas mal à l’aise. Décidément, ça m’a l’air bien compliqué tout ça, mais pas assez pour Roni qui ne me laissa pas le temps de me répandre davantage en excuses. Sa main sur ma joue, son regard plein de compassion et non de pitié ; son sourire et chacun de ses mots ; d’ordinaire, ça n’aurait pas marché et pourtant je me sentais moins coupable et moins con de surcroit.

— Oui, je n’osais pas de le dire, mais tu as bel et bien répété le mot “mignon” qui n’est pas désagréable dans ta bouche. En tout cas, je suis content que tu restes et que ça te fasse plaisir. En revanche “mégère acariâtre”, ça sonne si mal dans ta bouche. Briseuse de rotules, ça sonne mieux ; quoique tout dépend pour qui. Non plus sérieusement et au risque de paraître un tantinet cul-cul, je te trouve tellement sexy et mignonne dans une certaine mesure. Je me retenais d’en dire plus pour ne pas l’effrayer, mais j’aurais si facilement pu lui dire que son sourire à lui seul suffisait à illuminer cette pièce et mon quotidien, autant que sa présence qui me laissait croire que finalement tout était possible, même de tomber amoureux. Et quand on est amoureux (oui, j’ose le dire), on se plaît à rire de tout, à imaginer des plans d’avenir invraisemblable ; chose que nous étions en train de faire présentement en plaisantant de plus belle.

— Fou ? Non c’est pire ! C’est tout bonnement inconcevable de n’avoir, au cours de sa vie, pas eu la chance de goûter des frites au cheddar ; c’est carrément un crime de lèse-majesté à ce stade. De ce fait, je me dois d’accepter de venir répandre la parole sacrée de la frite au cheddar dans ton établissement. À mon tour je riais de bon cœur, m’imaginant pourvu d’un costume autre que celui de justifier du crime.  — Tu devrais en proposer de temps en temps avec des happy-hour, ça cartonnerait. Chassez le naturel, il revient au galop ; au triple galop même. Ainsi, malgré la légèreté et le plaisir d’être ensemble, je ne pus m’empêcher de laisser mon sérieux reprendre le dessus ; me maudissant au passage de potentiellement mettre à mal un aussi doux moment. Mon prénom résonna à nouveau dans sa bouche et sans que je m’y attende, elle quitta sa place, contourna la table pour s’approcher de moi et me saisir les poignets m’obligeant à me redresser pour lui faire face. J’eus à peine le temps d’ajouter quoi que ce soit, que déjà ses lèvres s’écrasaient contre les miennes. J’en eus le souffle coupé, car jamais encore aucune femme ne m’avait embrassé ainsi ; c’était intense, puissant, troublant même, assez pour me faire taire tout en me faisant sentir complètement désarmé lorsqu’au moment de se détacher nos regards se croisèrent à nouveau. Avalant ma salive bruyamment, je l’observais subjuguer avant de redevenir joueur.

— Peut-être que je devrais continuer à parler pour que tu me fasses taire alors…  Nous entamions un nouveau jeu, elle, avançant à reculons, moi suivant sans me poser de question. — Je n’ai jamais autant aimé les desserts que maintenant !  J’en profitais pour me ruer sur ses lèvres et lui offrir au centuple le baiser que nous venions d’échanger tout en la soulevant pour que nous regagnions plus rapidement ma chambre pour lui offrir le plus exquis des desserts.