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Nouvelles têtes
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Le retour de Carrie
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La conversation se faisait finalement plus calme et détendue que je ne l’aurais cru. En effet, le beau monsieur de l’aquarium se montrait finalement plutôt respectueux de mon avis et semblait essayer de comprendre. J’appréciais quand les gens ne restaient pas enfermés dans leurs idées reçues d’un autre âge comme le fait que les autres animaux que les humains étaient inférieurs et n’étaient que des objets. Les animaux ont tous une âme, des sentiments et éprouvent la peur, l’angoisse, l’amour, l’amusement… Et donc tous aspirent à vivre. J’essayais de faire comprendre cela à mon client qui travaillait dans une prison malgré qu’il disait les aimer. Je commençais à un peu mieux comprendre son point de vue et cela me touchait un peu.
- Je vois. Si je comprends bien, vous espérez préserver des espèces et l’aquarium vous paraît être le seul moyen, c’est ça ? En fait vous n’êtes pas un sale type, vous êtes juste démuni, dans le sens où vous n’entrevoyez pas d’autres perspectives.
J’étais sincèrement touchée de l’entendre me dire qu’il aimait sincèrement les créatures dont il s’occupait. J’en aurais presque pleuré. Tout ce que je voulais, moi, c’était que tout être vivant soit respecté. Mais l’être humain était destructeur et pour moi, il fallait impérativement faire de la prévention dès le plus jeune âge, et essayer de faire entendre raison aux adultes, parce que dans le lot, je restais convaincue que certains n’avaient pas forcément de mauvaises intentions, ils étaient juste mal informés et vivaient par habitude, mais en leur montrant une manière différente d’agir, alors tout pourrait être plus simple pour ceux qui avaient le réel désir de changer pour le mieux.
- Pourquoi n’essayez-vous pas d’orienter votre travail vers une réserve naturelle ? Si l’aquarium transférait ses animaux dans des sites naturels protégés, nos deux idées se rejoindraient, les animaux seraient dans leur habitat et ils seraient protégés des braconniers, de la pollution et de tout autre méfait dont est capable l’être humain.
Pour une raison que j’ignorais, sentir que nous avions peut-être un terrain d’entente me faisait chaud au coeur. Je me sentais bizarre, était-ce le champagne ? Cet homme ne m’inspirait pas la même chose que mes autres clients. Lui, il était différent. Mine de rien, l’heure tournait et il y avait des chances pour que d’une minute à l’autre, l’un des vigiles ne vienne annoncer la fin du temps qu’il avait payé.
Je suis surpris de la voir se calmer, de voir qu'elle n'a pas l'air de me juger plus que cela... Les choses ont l'air de bien se passer et c'est assez agréable je dois bien l'avouer... Je ne regrette pas au final d'avoir payé pour un show privé. J'apprécie écouter son point de vue, de voir que je me trompe sûrement sur la façon de faire correctement les choses pour aider les créatures marines. Elle arrive même à comprendre mon point de vue, qui l'aurait cru ? Et qui aurait cru que nous arriverions à parler sans se crier dessus ? Pas moi en tout cas...
- Oui et non. Pour moi il y a également des lieux protégés, des réserves, enfin j'ignore si cela s'appelle également comme cela pour les créatures marines. Et dans les aquariums cela permet aux gens de les voir et de mieux comprendre combien ils peuvent être importants. Je dois me répéter... Désolé. C'est la première fois que je parle ouvertement de tout cela.
Je souris lorsqu'elle dit que je ne suis pas un sale type. J'en rigole même.
- Un sale type ? C'est vraiment comme cela que vous m'avez jugée ? Je peux vous comprendre... Mais en effet je n'en suis pas un. Je suis juste un type qui aime sincèrement les créatures marines et qui ne sait plus comment leur venir en aide et qui est trop lâche pour quitter son travail... Parce que je sais que même si je le quitte quelqu'un d'autre me remplacera et ne s'occupera sans doute pas aussi bien que moi des animaux...
Et que je ne saurais pas quoi faire d'autres de ma vie... Je suis né pour vivre entouré de ces merveilles, pour les soigner et les protéger... Même si je n'ai jamais su pourquoi... Je me ressers un verre de champagne et en bois une gorgée. Je suis bien plus détendu qu'au début. Et j'avoue, je passe un très agréable moment avec cette femme...
Elle m'indique que je pourrais travailler dans une réserve naturelle, et qu'on pourrait faire transférer les animaux... Mais cela est impossible... Jamais nous ne pourrons le faire fermer...
- Vous êtes bien trop idéaliste je ne le crains... L'aquarium ne fera jamais ça... Transférer les animaux et fermer ? Vous ne connaissez pas ma patronne... Cela ne pourra jamais avoir lieu... C'est impossible...
Mais cela aurait été une magnifique idée... Les relâcher dans un endroit protéger, leur rendre une liberté et leur donner une vraie sécurité... Ce serait idéal... Mais impossible...
Soudain un truc me passe dans la tête de complètement hors sujet. J'ignore le prénom de la jeune femme à qui je parle, et bizarrement cela me perturbe. J'aimerais connaître son nom, en savoir plus sur elle... Oui cela me prend comme cela d'un seul coup. Sans doute l'effet de l'alcool, ou de l'ambiance intimiste...
- Au fait, je m'appelle Sebastien et vous ?
Voilà c'est demandé. Cela vient de nul part mais ce n'est pas grave. Il fallait que je sache son prénom... J'en avais besoin.
Aquaman c'est moi ! Je me sens mieux en présence des créatures marines que des humains parfois.
Je n’en revenais pas que le dialogue ait fini par se faire, de un, aussi facilement, et de deux, aussi calmement. J’aurais aimé dire que c’était parce que je prenais sur moi, mais non en fait, cet homme attisait réellement la sympathie. Lentement mais sûrement, je commençais à changer d’avis sur sa personne. Je restais néanmoins sur mes gardes, après tout je ne le connaissais pas et il travaillait pour « l’ennemi ». J’esquissai un sourire en l’entendant dire que c’était la première fois qu’il parlait ouvertement de tout cela.
- Peut-être que ça vous ferait du bien d’en discuter avec des personnes de l’association dans laquelle je suis.
Je me mis à rire avec lui, un peu gênée malgré tout de lui dire si franchement que je le prenais pour un sale type.
- Je mentirais si je disais non… Comprenez-moi, je vous ai vu sortant de cette prison, et vous m’avez fait comprendre que vous y travailliez… Mais je suis ravie d’apprendre que vous aimez vos pensionnaires et que malgré tout vous aimeriez qu’ils soient libres.
Il marquait un point en ce sens que s’il n’y était pas, quelqu’un d’autre ferait son travail et peut-être que cette personne y mettrait moins de bienveillance. Néanmoins , pour moi, la seule vraie solution était de faire fermer tous les établissements qui maintiennent les animaux loin de leur habitat naturel, les empêchant d’avoir une vie normale dans la nature. Les protéger, oui, mais pas au prix de leur liberté. Je hochai la tête aux dires de mon interlocuteur.
- Bien sûr que l’aquarium ne le fera pas de son plein gré, les gérants préfèrent s’en mettre plein les poches. C’est pour ça que des gens comme moi, qui ont ouvert les yeux, manifestent, dans le but d’ouvrir les yeux d’un maximum de personnes pour pouvoir faire changer les choses. Rome ne s’est pas faite en un jour, il paraît, mais en avançant pas à pas, on arrive forcément à quelque chose.
Soudain, j’eus l’impression de voir son regard changer, je cherchai à comprendre quand la réponse se dévoila d’elle-même : il voulait connaître mon nom, et il venait de me donner le sien. Pour la première fois, je me sentis un peu gênée.
- Oh, enchantée Sebatien. Moi c’est Aria.
Je me sentais finalement bien en sa présence, c’était bien la première fois que j’étais si à l’aise dans ce salon privé avec un client. Il fallait dire que c’était la première fois qu’un client voulait autre chose qu’une danse lascive et que ce autre chose n’incluait rien de nature charnelle.
Elle pense que je pourrais discuter avec des gens qui pensent comme elle. Cela pourrait être une bonne idée mais je sens que je vais être jugé dès que je parlerais de moi. Je travaille dans un endroit qu'ils ont en horreur... Mais ils seront peut être aussi compréhensifs qu'elle...
- J'essayerais de trouver le temps d'aller les voir, cela pourrait être bien effectivement. Il faudra me donner un contact...
Son rire me transperce soudainement. Mon cœur a un raté. Je n'arrive pas à comprendre ce qui se passe mais je me rends compte que ce son est magnifique et qu'il me fait ressentir tout un tas d'émotions positives. Mon corps a réagi immédiatement, comme si ce son était une madeleine de Proust, un souvenir de quelque chose qui m'a un jour fait du bien. Mais je n'avais encore jamais entendu ce rire... J'espère juste que j'aurais un jour la chance de l'entendre à nouveau car elle a un rire merveilleux.
- Je peux comprendre. Je devais vraiment avoir l'air d'un sale type... Mais je vous le promets, je n'en suis pas un, enfin j'espère... Par contre j'ai eu une bonne impression de vous lors de notre première rencontre...
La jeune danseuse est du même avis que moi, l'aquarium ne fermera jamais facilement. Mais je ne suis pas du même avis qu'elle... Les manifestations n'y changeront rien... Tant qu'il y aura des gens pour visiter cet endroit il ne fermera jamais...
- Je ne sais pas si je suis du même avis que vous... Les gens qui viennent visiter l'aquarium aiment cet endroit, et tant qu'ils seront demandeurs, l'aquarium continuera de vivre... Les manifestations devant servent vraiment à quelque chose selon vous ? Il est vrai que vous êtes entrain de me faire réfléchir, de me faire changer d'avis sur le métier que je fais mais... Je ne sais pas...
Je change soudain de sujet dans un virage à cent quatre vingt degré. J'avais tellement envie de savoir comment elle s'appelle. Et elle me le dit... Aria... Elle s'appelle Aria. Quel joli prénom... J'aime beaucoup. Il sonne bien.
- Je suis ravi moi aussi de faire votre connaissance officiellement Aria.
Le prononcer est fort agréable. Mais ce plaisir est de bien courte durée. Quelqu'un frappe à la porte et l'ouvre rapidement. Mon temps est écoulé... Oh non... Pas déjà... Et je n'ai pas les moyens de payer pour un second tour... Je n'ai pourtant pas envie de partir déjà... J'aurais pu continuer à parler avec Aria des heures durant...
Aquaman c'est moi ! Je me sens mieux en présence des créatures marines que des humains parfois.
Jamais je n’aurais cru qu’il me serait aussi plaisant de converser avec cet homme, et pourtant ! Comme quoi, la vie était capable de réserver de jolies surprises. Il venait même d’accepter d’aller discuter avec des gens de l’association dont je faisais partie, et en ayant cette attitude, la mienne changea du tout au tout, j’étais désormais beaucoup moins hostile et même carrément amicale. Il m’était de plus en plus sympathique. Je m’approchai alors pour lui donner le nom de l’association à l’oreille avant de me remettre bien droite assise à ma place. Je fus surprise de l’entendre me dire qu’a contrario, moi je lui avais fait bonne impression. J’éclatai une nouvelle fois de rire.
- Vraiment ?
J’avais du mal à le croire, et pourtant j’étais incapable d’imaginer cet homme mentir. Non, il me paraissait sincère et c’en était touchant. Nous pouvions échanger librement et malgré les divergences d’opinion, il restait ouvert, et j’appréciais cela.
- Justement, Sebastien, en faisant des manifestations, c’est un moyen de faire de la prévention. Les gens qui se rendent dans les aquariums ou les parcs zoologiques, au même titre que ceux qui mangent du poisson ou d’autres créatures, le font la plupart du temps sans se douter qu’ils font du mal ou qu’ils cautionnent le mal fait aux animaux. Ils ne le réalisent pas. Il faut donc les informer, les interpeller pour qu’ils fassent leur choix en toute connaissance de cause. Si personne ne les informe, ils ne peuvent pas deviner.
Je venais d’utiliser pour la première fois son prénom, et j’en aurais presque rougi, ce qui ne me ressemblait pas. En plus, ce prénom me semblait familier, mais étrangement, pas sur son visage. C’était bizarre, mais j’étais heureuse de connaître son nom et qu’il connaisse le mien. Le sourire ne quittait plus mes lèvres, le temps était passé si vite et soudain, on toqua à la porte. J’en sursautai presque tant je ne m’y attendais pas.
- Déjà, murmurai-je.
Je me levai du canapé alors que le vigile ouvrait la porte. Je lançai un dernier regard à Sebastien en murmurant un « au revoir ». Il savait où je travaillais et je savais aussi pour lui. Et maintenant, il avait aussi le nom de l’association. Il y avait donc divers moyens de se revoir. J’étais encore loin de me douter que d’ici quelques semaines, je me laisserais tenter par la soirée à l’aquarium et ce dans l’unique but de le revoir. Cette rencontre m’avait fait une drôle d’impression et il me faudrait en discuter avec mes collègues qui étaient sans doute plus expertes que moi.
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Lun 18 Jan - 21:31
