Oui, la question avait été certes un peu ridicule mais en même temps, je ne savais pas vraiment quoi dire d’autre une fois entrée dans la chambre. J’avais vraiment eu peur pour lui et je n’avais encore jamais vécu quelque chose comme ça. J’espérais que ce serait la dernière fois en tout cas. Je souriais en secouant négativement la tête. Même dans les pires situations, Harry faisait tout pour dédramatiser. Mais il avait quand même faillit mourir, ce n’était pas rien. En revanche, je ne savais pas s’il s’agissait de sa première tentative ou non. Je n’étais pas ici pour le juger de toute façon.

« Je vois ça, je suis ravie que tu reprennes du poiles de la bête en tout cas. Je n’ai pas vraiment pensé à ça pour tout te dire et oui, tu étais nu quand tu es parti dans la salle de bain. Ma robe ce n’est qu’un détail tu sais. »

Harry me faisait signe de venir m’assoir à côté de lui. Je décroisais mes jambes et je me levais pour m’y rendre. Je retirai mes chaussures et je m’allongeais à côté de lui en prenant soin de ne pas me prendre dans les fils. Je posais doucement ma tête contre son torse et je fermais les yeux. Mon Dieu, c’est fou à quel point j’avais eu peur de le perdre. Je n’avais plus envie de le quitter mais je savais que j’allais me prendre un vent si j’abordais ce sujet. Je me contentais simplement de rester contre lui et d’écouter son coeur qui était si fragile.

Quelque chose m’attirait chez lui, quelque chose que je ne savais pas expliquer. J’avais l’impression de le connaître et d’avoir déjà vécu une situation similaire. J’avais peut-être rêvé de quelque chose comme ça et j’avais l’impression que ça se réalisait ? Je ne savais pas vraiment comment je devais interpréter tout ça. Tout ce que je voulais pour le moment, c’était prendre soin de lui et rester avec lui le plus longtemps possible. Mais le connaissant, il me dirait certainement de m’en aller. Il faisait toujours ça quand je me rapprochais trop de lui. Il faisait peut-être ça pour se protéger ? Il avait peut-être souffert en amour. Je ne le connaissais pas encore assez pour répondre à cette question. Je me sentais bien contre lui et je souriais en gardant mes yeux fermés. Il ne devait plus recommencer.
 

Mon propre enfer dans mon propre monde. Une déchéance qui était la mienne et qui me tirait vers le fond. Je ne cherchais rien ou peut-être que je cherchais tout en fait ? Je voulais Kelly soit près de moi. Je tentais de banaliser les choses comme je le faisais tout le temps. C’était la beauté de la chose. Cette fâcheuse tendance que j’avais à prendre les choses à la légère. Je laissais la femme s’installer près de moi et je passais mon bras autour de son épaule délicate. Je fermais les yeux en sentant sa chaleur réchauffer mon corps. J’étais bien en ce moment, mais je savais que ce n’était que temporaire. Je savais que mon overdose allait faire la une des journaux à nouveau et que mon avocat allait se rappeler pourquoi je le payais si cher. L’argent n’achetait clairement pas le bonheur, j’en étais la preuve vivante.

- Super, les ambulanciers ont pu se rincer l’oeil sur mon anatomie divine.

Je souriais en coin en gardant les yeux fermés. Mon coeur battait à un rythme régulier et j’avais un peu mal à la tête. J’avais envie que Kelly reste et en même temps, je voulais qu’elle fiche le camp. Je devrais peut-être lui signer un rapport de confidentialité ? Comme ça, je serais certain qu’elle ferme sa grande gueule ? Je portais une main à ma tête en poussant un soupir. J’avais besoin d’une dose merde ! Je voulais me faire un rail ou un shoot le plus rapidement possible.

- Je veux partir de ce putain d’hôpital … Fais-moi sortir Kelly.

Un ordre plutôt qu’une suggestion. Je ne voulais pas et je n’allais certainement pas rester ici. Je regardais la jeune femme dans les yeux. Elle allait clairement vouloir me tuer sur place. J’avais besoin d’aller dans mon bar. J’avais besoin de me défoncer encore plus pour profiter de la vie ou étais-ce plutôt pour creuser plus profondément ma tombe ? Je grognais un peu en me raclant la gorge.

- S’il te plaît bébé. Fais ça pour moi ok ? Je ferais ce que tu veux, mais tu me sors d’ici le plus rapidement possible.

Oh, j’allais probablement refaire une overdose dans les semaines à venir. J’allais sombrer dans les enfers le plus profondément possible et le pire … J’adorais ça. J’adorais la sensation que ça me donnait de quitter le monde des vivants pour atteindre celui des morts. Cette sensation de flotter et de partir. Putain, j’en étais complètement accro ! Je voulais crever ! Je devais crever …
 

Je désirais une seule chose : sortir de ce putain de lit et rentrer chez moi. Je m’en foutais d’elle au fond. Je m’en foutais de ma putain de vie. Je tentais de regagner mon monde comme je le pouvais au fond sans vraiment le savoir. Kelly me regardait dans les yeux en me disant qu’elle ne pouvait pas. On ne pouvait pas envoyer quelqu’un en désintoxication comme ça. Je n’avais commis aucun crime en dehors de pousser trop de bouchons. Je la laissais parler en la regardant dans les yeux.

- Je n’irai pas dans une putain de cure de désintoxication. Je n’ai pas envie d’y aller et je n’ai pas envie d’être sobre ! Quand comprendras-tu que je ne changerais pas hein ? J’ai peut-être bien envie de crever au sommet de ma putain de gloire Kelly alors trouves le moyen de me faire sortir d’ici… Si tu tiens à moi, même si c’est juste un peu, tu vas faire ce que je te demande.

J’avais parlé calmement, mais j’étais hautement sérieux. Je prenais sa main et j’y posais un baiser. Mon assistante entrait au même moment et je lui lançais un regard qui en disait long.

- Hum c’est que j’ai un attaché de presse qui voudrait savoir ce qu’on va dire aux médias.

- Dites que je vais parfaitement bien. Que ce n’était qu’un malaise de surmenage. Je sors dans quelques heures et putain de merde trouver moi un médecin que je signe ce refus de traitement !

Mon assistante partait immédiatement. Je me redressais avec la tête dans le cul. J’avais vachement mal comme toujours et je poussais un soupir. Je retirais moi-même ma perfusion et mes électrodes pour le coeur. Rien à foutre. Je n’avais pas envie d’avoir cette conversation avec Kelly. Déjà, je lui en avais dit trop. Je lui avais dit que je voulais crever et partir de ce putain de monde infâme dans lequel j’évoluais. Les machines bipaient comme jamais et je m’en foutais. Je regardais Kelly dans les yeux.

- Donne-moi mes vêtements s’il te plaît Kelly. Je ne vais pas sortir de ce trou cul nue …

Mon choix était fait. Je ressentais quelque chose pour la rousse, mais c’était minime. Déjà, je lui avais fait confiance en lui parlant ainsi et en m’ouvrant à elle. Je portais une main à ma poitrine. Mon coeur n’aimait clairement pas l’effort que je faisais en ce moment. Je grimaçais en me massant et en respirant profondément. J’étais en sueur.
 

Madame n’était certainement pas femme. Je n’aurais jamais pris pour épouse une fille aussi casse-couilles qu’elle! Je levais les yeux au ciel et je soupirais alors qu’elle refusait de m’aider. Heureusement, mon assistante arrivait au même moment et je lui faisais mes demandes de manière plus que claires. Elle avait tout intérêt à ne pas me faire chier et à obéir. Je voulais sortir de cet endroit qui sentait la merde et les médicaments. Kelly me jetait mes vêtements sur le lit et je lui faisais un petit sourire avec un rire.

J’avais beau ne pas me sentir au top de ma forme, elle obéissait tout de même à ce que je lui demandais au final. Mon coeur n’appréciait pas les efforts que j’étais en train de faire. J’avais l’impression de sauter des battements et je fronçais les sourcils en fermant les yeux. Bordel que j’avais mal à la poitrine et à la tête. Je tentais de me concentrer sur ma respiration au maximum. J’avais l’impression de manquer d’air. Kelly s’approchait avec douceur en posant sa main sur mon coeur. Le sentait-elle débattre dans ma poitrine alors que j’étais de plus en plus en sueur ? Probablement. J’avais l’impression qu’il allait me sortir de la poitrine merde.

- J’ai deux entreprises à faire tourner Kelly. Je n’ai pas le temps de rester dans un putain de lit d’hôpital en attendant que l’on me charcute comme si j’étais un vulgaire morceau de viande et que l’on vienne me déranger à n’importe quelle heure.

Têtu ? Totalement. Je baissais la tête. Si seulement je pouvais crever sérieusement. Il y avait peut-être quelque chose de mieux qui m’attendait ailleurs. Je n’étais pas un saint et je n’irais pas au paradis. C’était un truc clair. J’étais destiné à la débauche et aux enfers. Je me passais une main dans le visage en soupirant. Le médecin entrait au même moment et une joute verbale commençait à se jouer. Il refusait de me laisser sortir pour le restant de la semaine. Moi, je voulais partir maintenant.

- Vous allez me filer les pompes de nitroglycérine comme la dernière fois et je retourne dans mon putain de penthouse.

- Très bien monsieur Olympus … Mais vous risquez fortement de ne pas vous réveiller la prochaine fois. Vous en avez conscience j’espère ?

- J’ai signé ton putain de papier alors tu vas me donner les pompes de merde avant que je m’énerve vraiment !

Le médecin partait en soupirant avec les documents légaux. J’enfilais un chandail et un pantalon difficilement. Je me mettais debout avant de m’approcher de Kelly. Je posais une main sur sa hanche en la regardant dans les yeux.

- Tu dors à la maison cette nuit ?
 

Cette envie de déchéance était la mienne. Mon enfer sur Terre alors que je régnais sur la drogue dans cette ville et les environs. Un immense plaisir de masquer mes activités comme jamais. Je filais entre les doigts de la police à chaque fois. Ce foutu Bobby m’avait dans le collimateur et pourtant, il n’arrivait pas à avoir la moindre preuve sur moi. J’étais simplement un chef cuisinier qui avait un club de striptease. J’adorais mon bar et mon restaurant, mais ce qui me plaisait le plus c’était de faire vivre un véritable calvaire à mes employés. Bosser une année pour moi était l’équivalent d’un véritable supplice. Si l’on réussissait à s’en sortir alors la personne pouvait bosser n’importe où et plus l’on bossait longtemps pour moi et plus les bénéfices étaient grands.

J’avais juste fait un signe de tête à Kelly alors qu’elle me disait de me ménager. Foutaise ! Je n’allais pas me ménager. Je ne le faisais jamais en réalité. Je m’étais habillé et je sortais avec la belle rousse alors que je voyais parfaitement les regards qui se retournaient sur son passage. Elle était magnifique ma belle Kelly et elle avait un petit quelque chose que les autres n’avaient pas. Voulais-je devenir sobre pour elle ? Hors de question. Je serais sobre une fois que je serais mort. Je haussais la tête alors qu’elle appelait un taxi et je sortais mon cellulaire en me disant que j’aimerais bien fumer une clope et profiter de la vie un peu. Je n’allais pas faire ça devant la dame sans quoi j’allais vivre un enfer bien différent de celui dont j’ai l’habitude.

- Une dizaine de minutes ? Bordel de merde ! Il vient d'Afrique ?!

Je m’installais sur un banc pour patienter. Cette simple marche m’avait fichu la migraine et je sentais la pompe de nitroglycérine dans mes poches de pantalon. Je restais silencieux avant de voir mon assistante du coin l’oeil. Je voyais parfaitement les flashs des photographes. Encore et toujours ces gros connards. Je sortais finalement en voyant le taxi. Je gardais ma main dans celle de Kelly en sachant que nous allions faire la une des journaux le lendemain. Olympus a une nouvelle copine et termine à l’hosto… Ouais, je le voyais venir le gros titre. Je gardais étonnamment la main de Kelly dans la mienne.

- Donne ton adresse au taxi.

Changement de plan. Si j’allais à mon penthouse, nous allions nous faire voir par les journalistes. Je n’avais pas envie de répondre aux questions. J’avais envie d’être au calme. Je laissais donc la jeune femme donner son adresse. Ce serait la première fois que nous irions chez cette dernière et, honnêtement, je trouvais ça un peu exotique.

Je me surprenais moi-même. J’avais demandé à Kelly d’aller chez elle au lieu de mon mythique appartement dégueulasse et froid. J’avais envie de voir un autre décor et d’éviter les journalistes au maximum. Je ne savais pas de quoi demain serait fait, mais je comptais me reposer cette nuit dans la mesure du possible. Je montais avec la belle et je regardais les lieux sans rien dire dans un premier temps. Je déclinais d’un signe de tête sa proposition de boire ou de manger. Je n’avais pas faim ou soif. Je ne savais simplement plus où j’en étais. Je ne me montrais jamais vulnérable devant personne et pourtant, c’était ce que j’avais fait devant elle sans réellement le vouloir. Mon overdose aurait pu me tuer et j’aurais tellement aimé crever dans un certain sens. J’étais bon pour refouler mes sentiments au maximum. Je n’aimais pas me montrer à tous comme si de rien n’était. J’étais dans ma petite bulle alors que je me rendais dans le salon et je m’assoyais dans le canapé. Elle avait touché mon torse et moi, j’avais simplement pris sa main pour y poser un baiser avant de me déplacer.

Je me prenais la tête à deux mains sans rien répondre à ce qu’elle m’avait dit. Je sentais cette rage et cette douleur qui me prenaient encore aux trippes. Je ne voulais pas craquer ou pourtant … Pourtant, j’avais envie de chialer comme un enfant sans avoir à me soucier à quel point je souffrais et que j’avais l’air con.

- Comment peux-tu endurer un type comme moi Kelly ? Comment peux-tu accepter que je vienne chez toi alors que je viens de te faire vivre un véritable enfer alors que tu n’avais rien demandé ?

Je restais dans ma position en sentant ma vue se brouiller rapidement. Des larmes. Des larmes qui tombaient sur mes cuisses alors que j’étais dans le salon de la ravissante rousse. Je me sentais con et comme une merde.

- Je ne devrais pas être ici. Je devrais être dans mon putain de bar à gérer mes affaires ou à mon restaurant.

Je relevais la tête et j’essuyais mes yeux d’un revers de la main sans oser me lever. Je joignais mes mains ensemble. Je ne méritais pas une seule seconde la bonté dont elle venait de faire preuve. Je ne méritais pas la moindre considération d’une femme exceptionnelle comme Kelly. Elle avait son petit caractère, mais c’était peut-être ce dont j’avais besoin au fond. Une présence soutenante et qui me ferait oublier tout la merde qu’était ma vie.