Depuis le début de ma vie à New York, on ne peut pas dire que je me sois fait beaucoup d’amis. Des connaissances, des personnes qui me doivent des services ou à qui j’en dois, des personnes qui pensent que m’avoir de leur côté pourrait les aider à obtenir ce qu’ils souhaitent, des personnes comme cela, oui, mon répertoire téléphonique en est rempli.

Je sais pertinemment qui peut m’apporter quoi et ce que je peux apporter à qui. Cela fait des années que j’use et abuse de ces ficelles tirées en coulisse. Néanmoins, un seul nom de mon répertoire ne rentre dans aucune de ces catégories. Une seule personne peut se vanter d’être mon ami, un ami fidèle et très proche.

Il s’agit du non moins célèbre Dylan GREY, le directeur d’un des plus gros musée d’art de la ville. J’adore me balader au milieu des magnifiques expositions permanentes et provisoires qu’il propose dans son établissement.
C’est vrai que l’amitié entre deux directeurs de deux prestigieux monuments de la ville new yorkaise peut paraitre superflu et bizarre pour certaines personnes mais elle est plus que réelle et indispensable pour nous deux.

Cela faisait longtemps que nous ne nous sommes pas vus. Chacun de nous est le confident de l’autre. Chacun de nous profitons de l’autre pour raconter tous nos tracas personnels et professionnels. Pourquoi je pense à Dylan aujourd’hui ? Bonne question. Peut-être parce qu’il me manque et que nos discussions me manquent aussi.

Je suis tranquillement installée dans mon bureau, à pianoter sur le clavier de mon ordinateur. Un nouveau rapport à taper et à rendre au conseil d’administration, un nouveau budget à planifier et à faire voter, toutes les contraintes qui vont avec le poste que j’occupe.
Il se fait tard, c’est la période de la journée où je suis la plus productive car personne n’est là pour m’interrompre. Quelqu’un tape quand même à la porte. Qui cela pourrait être à cette heure-ci ?

« Entrez. » dis-je sans lever le nez de mon écran.

La porte s’ouvre et Dylan apparait avec ce qui ressemble à une bouteille de vin dans une de ses mains. Je souris bêtement en le voyant entrer dans mon bureau. Je suis heureuse qu’il soit là, la soirée s’annonce meilleure que prévue.

« Ah c’est toi Dylan. Je suis heureuse de te voir. Viens ! Entre, fais comme chez toi, prends une chaise. Comment vas-tu depuis tout ce temps ? Il faut absolument que je revienne faire une visite dans ton musée, tes tableaux me manquent. »

Je voyais toujours Uma en coup de vent. Quand je n’étais pas occupé, c’était elle et inversement. Ces derniers temps, ça devenait vraiment de plus en plus compliqué de se voir et je devais bien avouer que nos petites soirées me manquait. Non, ce n’était pas ce genre de soirées, nous étions juste amis et ça me convenait très bien. Mais clairement, j’avais besoin de la voir et de lui parler de Wenda. Cette femme avait bousculé ma vie mais pas seulement, elle m’avait dit que nous ne venions pas de ce monde et très franchement, j’avais besoin de parler de tout ça à une personne de confiance.

J’entrais après que cette dernière m’eut donné la permission et un sourire plus que sincère se dessina sur mes lèvres. « Bonsoir Uma, je suis très content de te voir aussi. Je t’ai apporté une bonne bouteille et je me disais que l’on pourrait se commander de quoi manger ? Car te connaissant, tu dois encore avoir l’estomac vide. Je me trompe ? » J’allais me chercher une chaise puis deux verres et de quoi déboucher la bouteille. Je connaissais la maison par coeur. J’ouvrais la bouteille pour que le vin prenne l’air.

Je me dirigeais ensuite vers elle et j’allais poser mes mains sur ses épaules tout en restant de dos. Je posais un baiser sur sa tempe sans regarder ce qu’elle était en train de faire sur son ordinateur, car ça ne me regardait pas. Je retournais ensuite m’assoir et je servais le vin. « Mais oui avec plaisir, j’ai eu des nouveaux tableaux et je suis certaine qu’ils vont te plaire. Et toi ? Quoi de neuf ? J’ai tellement de choses à te raconter si tu savais. » J’attendais qu’elle termine son rapport avant de tout lui dire.

J’allais devoir tout lui raconter dans l’ordre. Ma rencontre avec elle, ce que j’avais ressenti, ce qu’elle m’avait dit à propos d’un autre monde. Franchement, j’étais un homme relativement ouvert d’esprit et il y avais des fois où je ne me sentais pas à ma place. Est-ce que c’était vrai ? Est-ce que j’étais trop surmené ? Je n’en avais aucune idée. Tout ce que je savais, c’est que j’avais besoin qu’Uma m’aide sur ça. Pour moi, elle avait toujours été de bons conseils et c’était aussi pour ça que je ne me confiais uniquement à elle et à personne d’autre.

Plus je le regarde, plus je le trouve préoccupé. Même s’il ne dit rien, son visage ne me trompe pas. Je suis habituée à ce qu’il passe me voir en soirée à l’aquarium mais en général, il m’envoyait un petit message pour me prévenir de son arrivée.
Ce soir, c’est différent, qu’il vienne sans m’en informer, c’est qu’il a soit une grosse annonce à me dire ou vraiment que quelque chose le tracasse. Déjà, il n’arrive pas les mains vides, une bouteille de vin blanc, mon préféré et il le sait parfaitement.

Il me propose de commander de quoi manger car il sait très bien que j’oublie souvent de me nourrir quand j’ai la tête plongée dans les papiers. Plus il parle, plus l’idée me semble bonne et j’ai une soudaine envie de sushis. Je sens que la soirée va être agréable. Je le regarde prendre deux verres, une chaise et venir s’installer à mon bureau.

Il me rejoint de mon côté et vient déposer un baiser sur la tempe comme un frère à sa sœur, comme un collègue qui comprend très bien les difficultés de mon poste car il a les mêmes. J’attrape mon téléphone et me dépêche de commander deux plateaux de sushis variés au traiteur du coin.

« Les sushis arrivent dans vingt minutes. » lui dis-je en raccrochant le combiné. « Je vais bien merci et dès que je peux, promis, je vais venir voir tes nouveaux tableaux. »
Je m’affale dans mon siège et attrape mon verre, je le porte à mes lèvres et en savoure la première gorgée.

« Tu sais ce que ce poste incombe comme désagréments surtout pour les fin d’années, tous ces bilans à clôturer, ces budgets à prévoir. Le plus chronophage en ce moment, ce sont les préparatifs pour la soirée caritative de l’aquarium. J’espère que tu viendras, je compte sur toi ! »
Je le regarde en disant cela et je le vois sourire. Je sais très bien qu’il sera là, il est toujours là pour moi et pour m’épauler quand les circonstances le nécessitent.

« Si tu es venu à l’improviste ce soir, c’est que tu as quelque chose de très important à me raconter ou à m’annoncer. Quelque chose à avoir avec ta dernière conquête peut-être ? »

Je reprends une gorgée dans mon verre. Bien sûr que je suis au courant de sa liaison avec Wenda Darwin. Je sais tout ce qu’il faut savoir sur les plus grands de cette ville. Je ne l’ai jamais rencontrée officiellement, je ne connais d’elle que les photos et les portraits qu’on trouve dans tous les magazines du pays.

Elle me fait penser à une jeune fille que j’ai pu croisé ou dont j’ai entendu des histoires quand je vivais encore dans la Forêt Enchantée. Je n’arrive pas à me rappeler son nom, mais ça reviendra, ça revient toujours.

Je me sens vraiment soulagé d’avoir Uma dans ma vie. Cette femme connaît toute ma vie comme je connais toute la sienne et il en sera toujours ainsi. J’avais donc prit la décision d’aller la voir car j’en avais vraiment besoin. C’était d’ailleurs pour cette raison que je n’étais pas arrivé les mains vident. Je savais qu’elle avait la tête sous l’eau avec tout le travail qu’elle avait à faire, je ne connaissais ça que trop bien. Je savais aussi qu’Uma était trop fière pour me demander de l’aide. Alors, j’avais décidé de lui imposer un break. Car moi aussi, il m’arrivait d’oublier de manger quand j’étais plongé dans le travail.

« Attends Vingts minutes ? C’est quoi ton secret pour en avoir aussi rapidement ? Ah, mais j’espère bien que tu vas venir le voir ! J’en ai emprunté un au musée du Louvre de Paris et je suis certain qu’il va t’intéresser. Il s’agit du radeau de la méduse. Il est vraiment incroyable. Il va attirer beaucoup de monde j’en suis certain. » Je buvais une gorgée de vin tout en écoutant ce qu’elle me disait. Je ne pouvais qu’approuver. « Ah ça, je veux bien te croire. Je connais ça très bien. »

Quand elle me demandait si je viendrai à la soirée, je m’étais simplement contenté de lui faire un joli sourire. Car oui, bien sûr que j’allais m’y rendre. Pour rien au monde je ne manquerai cet évènement. Je savais à quel point son aquarium était important pour elle et je trouvais aussi important de protéger les espèces marines en voient de disparition. Je prenais une gorgée de vin avant de lui expliquer la raison de ma venue. Je ne savais pas vraiment par quoi commencer. Est-ce qu’elle allait rire de moi ? Non, je savais qu’elle serait compréhensive.

« Tu me connais vraiment trop bien Uma. Oui, en effet, il s’agit de Wenda que je fréquente depuis un certain temps à présent. Je ne sais pas, mais je ressens quelque chose d’étrange quand je me trouve en sa présence. C’est un peu comme si je l’avais déjà connue dans une autre vie. Je ne sais pas si c’est possible. Tu vas peut-être me prendre pour un fou je sais pas, mais ça me perturbe vraiment, elle m’est vraiment très familière et j’ai l’impression d’avoir vécu des choses avec elle mais avant aujourd’hui. Je ne sais pas si tu vois ce que je veux dire. »

Je souris quand je vois Dylan impressionné par la vitesse à laquelle notre commande va arriver jusqu’à mon bureau. Etre la directrice puissante et redoutée de l’Aquarium de New York a ses avantages. Je sais bien entendu en user et en abuser.
Pour ce qui est des restaurants et des traiteurs autour de mon bureau, je commandais assez souvent chez les uns ou les autres. Ils savent très bien que me contenter bien et rapidement était aussi important pour eux. Avec peu de mots, je pouvais et je peux toujours faire et défaire une réputation. Et puis, je n’aime pas attendre, c’est de notoriété publique !

« Tu sais que je suis très persuasive comme femme ! » lui réponds-je avec un petit côté taquin dans la voix. «  Le radeau de la Méduse, je l’aime tellement ce tableau depuis que je l’ai vu dans la Grande Galerie du Louvre. Tu l’as dans ton musée ? C’est vrai ? Alors, sois sûr que je vais venir très vite le voir ! »

Je le regarde pendant qu’il boit une gorgée de vin. Il réfléchit à sa réponse à ma question concernant sa présence dans mon bureau. Ce n’est pas que sa présence m’embête bien au contraire, mais je suis vraiment intriguée par sa venue ce soir.
Qu’avait-il à m’annoncer qui ne pouvait attendre ou qu’il ne pouvait me dire par téléphone ? J’ai hâte d’avoir le fin mot de toute cette histoire. Je croise mes jambes sous mon bureau, me recale bien au fond de mon siège et prend doucement une gorgée dans mon verre.

Dylan m’explique enfin qu’il s’agit de Wenda. De qui d’autre aurait-il pu me parler ? Il commence à me dire que quelque chose de bizarre se passe dès qu’il est en sa présence. Je lève un sourcil d’étonnement. Ne reconnait-il pas ses propres sentiments amoureux ?
Il continue en s’embrouillant un petit peu dans ses explications. J’ai du mal à le suivre d’ailleurs. Il a le sentiment de la connaitre depuis longtemps, dans une autre vie, elle lui semble si familière comme s’ils avaient un passé commun.

« Je ne pense pas que tu sois un fou. Ce sont des choses que l’on peut ressentir quand on aime profondément une personne. Tu ne crois pas ? »

Un voile d’angoisse passe malgré tout dans ma voix. Et si ? Et si j’avais raison. Ce serait tellement fou et parfaitement impossible ! Serait-elle une personne provenant du Monde des Contes ? Serait-elle une personne comme moi ? Comment est-elle arrivée ici ? A-t-elle tous ses souvenirs ? Quelle est sa véritable identité dans ce cas-là ?
Même si j’ai raconté à Dylan toute ma vie ici à New York, je ne lui ai jamais parlé de ma vie d’avant. Personne n’est au courant de mon véritable nom et de ma véritable origine. Pourrait-il comprendre ? Je ne sais pas, l’avenir me le dira…

Tout comme Uma, j’avais la chance d’être une personne de pouvoir qui pouvait avoir beaucoup d’influence et tout comme elle, il m’arrivait parfois d’en abuser pour obtenir certaines choses. Je lui rendais son sourire et je levais mon verre en lui faisant un petit signe de tête. Je buvais une gorgée de mon verre. Ce vin était vraiment délicieux. Je faisais mon possible pour lui apporter de bonnes bouteilles à chaque fois que je venais la voir. Je trouvais ça normal et à force, je connaissais ses goûts par coeur. J’acquiesçais.

« Oui, il se trouve dans mon musée. Si tu veux, je pourrais te le prêter pour un certain temps. Il pourrait t’attirer du monde et tu aurais ainsi le loisir de pouvoir le contempler tous les jours. »

Bon, le côté moins drôle, ça allait de passer par toute la paperasse pour que je puisse le lui prêter. Car il allait falloir des assurances en cas de souci. C’était quand même un tableau d’une très grande valeur et il ne fallait pas plaisanter avec ça. Je savais très bien qu’elle en prendrait soin, ce n’était pas elle qui m’inquiétait mais plutôt les touristes qui se fichaient bien de savoir qu’il fallait y faire attention.

Je savais que je pouvais tout lui dire, je savais qu’elle ne me jugerait jamais tout comme je ne la jugerai jamais. Franchement, ça me faisait du bien d’avoir une personne à qui parler en qui je pouvais avoir confiance. Elle disait que je n’étais pas fou, avait-elle déjà vécu la même chose ? Mais ce que je ressentais, ça allait au-delà de ça. Je me passais une main dans les cheveux et je posais mon verre. Je me levais et je faisais les cents pas dans son bureau. Je voulais lui dire tout ce que j’avais sur le coeur. J’allais me mettre en face d’elle et je plongeais mon regard dans le sien.

« Si, mais ça va au-delà de ça. Elle m’a dit qu’un autre monde existait. Un monde où on aurait tous une identité différente. Je ne sais pas trop ce que je dois en penser Uma. Mais je dois bien avouer qu’il y a des fois ou j’ai l’impression de ne pas faire parti de ce monde. Est-ce que tu as déjà ressenti ça toi ? »

J’attendais qu’elle me réponde et qu’elle me donne son point de vue sur la question.

Dylan, toujours aussi galant, me propose de me prêter le fabuleux tableau que j’admire tant et qu’il venait de recevoir dans son musée. La tentation de dire oui est grande, très grande même. Rien que penser que je vais posséder ne serait-ce quelques jours « Le Radeau de la Méduse » me procure un sentiment de joie incommensurable.

« La place d’une œuvre telle que celle-là a sa place dans un musée, j’aurais tellement peur de l’abîmer si je le prenais ici ou même dans mon loft. Je te remercie de ta proposition mais je vais plutôt venir l’admirer dans ton établissement. Ça me donnera une occasion de sortir de mon bureau et d’aller voir ce qu’il se passe en dehors de ces quatre murs. »

Nous voilà repartis à parler de Wenda et des tracas qu’elle lui cause par ses dernières révélations. Je vois Dylan en train de réfléchir, sûrement à se demander ce qu’il peut me dire ou non, ma réaction à ses propos.
Je le vois se passer une main dans ses cheveux, signe chez lui d’une profonde réflexion. Il a vraiment l’air soucieux et préoccupé. Madame Darwin avait vraiment dû lui dire quelque chose à laquelle il ne s’attendait pas et il a dû mal à mettre ses pensées en ordre pour tout m’expliquer.

Il finit par arrêter de bouger dans tous les sens et vient se placer sur la chaise en face moi de l’autre côté de mon bureau. Il me regarde droit dans les yeux et commence enfin à me dire ce qui le tracasse depuis son arrivée dans les locaux de l’aquarium.
Wenda lui a tout raconté sur notre monde, sur le Monde des Contes. Je suis sidérée qu’elle lui en ait parlé. Elle doit vraiment l’aimer et lui faire confiance pour lui avouer quelque chose d’aussi sensible que celle-là.

Cette révélation me perturbe également. Je suis contente de savoir que quelqu’un d’autre que moi venant de la Forêt Enchantée se trouve aussi dans la ville de New York. D’un autre côté, que dois-je dire à Dylan ? Dois-je lui raconter toute la vérité ? Est-il en état et assez fort pour l’entendre, la comprendre et la digérer ?
Il me demande mon avis sur ce qu’il vient de me raconter. Il me fait confiance pour m’avouer tout cela. Je dois lui faire autant confiance pour tout lui dire. Je prends une gorgée dans mon verre, une profonde inspiration et je me lance.

« Je suis obligée de reconnaitre que Wenda a raison, Dylan. Il existe effectivement un autre monde, enfin plusieurs autres mondes, dans lequel vivent les personnages des contes et légendes de ce monde ci. Je ne t’ai pas dit toute la vérité sur moi, mon identité et mon histoire. »  

Je marque une pause afin de mettre un peu d’ordre dans mes idées et trouver les mots les plus justes pour lui expliquer ma vie.

« Je m’appelle Ursula Darkwater, je viens du Royaume des 7 Mers qui se trouve dans le Monde des Contes. Mon père n’est autre que le dieu Poséidon. Je peux comprendre que cela soit difficile à croire mais c’est pourtant la vérité. »

De lui avouer ma véritable identité m’a bizarrement enlevé un énorme poids de mes épaules. Je regarde Dylan à la suite de mes premières révélations et je vois dans ses yeux son cerveau en pleine ébullition et en pleine réflexion.

« Je suis prête à répondre à toutes tes questions, car je pense que tu dois en avoir beaucoup. »

Je lui faisais un petit sourire en coin. J’avais totalement confiance en elle et je savais très bien qu’elle ne ferait rien pour abimer ce tableau. Et puis, toutes les précautions seraient prise pour que ce dernier reste à l’abri. Il serait protégé par une vitre car les touristes sont de véritables crétins. Il m’est arrivé de trouver un chewing gum coller sur un tableau datant du 16ème siècle. Je l’aurai volontiers étranglé de mes propres mains. Non mais franchement, comment peut-on être aussi irrespectueux ? « Oh tu sais, toutes les précautions seraient prise. Il serait présenté sous verre. Si tu changes d’avis, fait moi signe que je puisse commencer à remplir la paperasse. »

Je termine de lui dire tout ce que j’ai sur le coeur et je dois bien avouer que je me sens soulagé. Je ne sais pas si elle va me prendre pour un fou ou non mais j’ai besoin de parlé de tout ça à une personne de confiance et je tiens vraiment à Uma. Elle seule peut me comprendre et elle a toujours été là pour moi. Devant elle, je peux faire tomber mon masque. Elle est la seule à m’avoir vu faible à certains moments.

Je la laisse parler et je fais des yeux ronds quand elle me confirme que tout ça est vrai. Au fond de moi, je me sens un peu vexé étant. Je suis déçu et blessé qu’elle ne m’ait rien dit. Mais je me contente de l’écouter. J’ai appris que moi aussi je fais parti de ce monde de Conte. Mais je n’arrive pas encore à me souvenir de qui je suis. Je ne sais pas par quoi commencer. Je termine mon verre cul sec et je plonge mon regard dans le sien. En effet, j’ai beaucoup de questions.

« Et pourquoi tu ne m’as rien dit ? A ce qu’il paraît, je suis Dorian Gray mais je n’arrive pas encore à me souvenir de qui je suis. Pourquoi tu arrives à te souvenir et moi non ? Pourquoi on est piégé ici ? Comment peut-on faire pour retourner dans notre monde ? »

Il faut que je calme toutes les interrogations que j’ai car sans ça, elle n’aura pas le temps de me répondre. C’est fou de me dire que le monde dans lequel je suis n’est pas ma vie et que tous les souvenirs que j’ai de mon enfance ne sont pas vrai. Qui est à l’origine de tout ça et pourquoi ?

Au fur et à mesure que je lui donne les premières révélations, le visage de Dylan se décompose sous mes yeux. Je peux comprendre que tout ça doit être dur à comprendre et à digérer. Tout ce qu’il prenait pour acquis et sûr jusqu’à maintenant vient de voler en éclats.
Il avale son verre de vin cul sec comme s’il cherche à digérer ce que je viens de lui confirmer et ce que lui avait raconté Wenda. Il reprend la parole et commende à se mettre en colère contre moi car il pense que j’aurais dû lui en parler depuis longtemps.

A cet instant précis, je prends conscience de tout le poids que ce mensonge par omission faisait peser sur mes épaules. Oui, c’est vrai, je ne lui ai jamais dit toute la vérité me concernant jusqu’à maintenant. Pour quelles raisons ? Je ne sais pas trop, l’habitude, l’appréhension de sa réaction, l’envie d’oublier ce que j’ai vécu avant d’arriver à New York.
Un peu des trois sûrement et peut-être une demi-douzaine d’autres raisons que je ne veux pas m’avouer jusque-là. Dylan continue de se poser des tonnes de questions, il m’en pose certaines au passage notamment sur le fait que je me souvienne toujours de qui je suis contrairement à lui.

« Calme-toi, calme-toi Dylan, pardon Dorian, vu que c’est ton véritable prénom. » Je m’avance sur mon bureau et lui attrape la main afin de la garder dans la mienne et essayer à l’aider à se concentrer sur ce que je m’apprête à lui dire. « Je ne t’ai rien dit car je suis bloquée dans cette ville et dans ce monde depuis très, voire trop longtemps et que je ne voulais pas perdre toute la vie que je me suis construite. Ce n’est pas une raison valable, je m’en aperçois ce soir avec cette discussion. »

Je lui lâche la main, attrape mon verre et en bois une gorgée. J’ai besoin de ces quelques secondes pour remettre mes idées en ordre afin d’être la plus claire et la plus précise possible. Je ne voudrais pas qu’il me prenne, je veux dire nous prenne avec Wenda pour des folles.

« Comme je te l’ai dit tout à l’heure, je viens du Monde des Contes. Tu dois venir d’une ville répondant au nom de Londonia, c’est dans un des autres mondes dont j’ai commencé à te parler. Les quelques jours avant que je quitte le Royaume des 7 Mers, je cherchais avec deux de mes consœurs à éviter qu’une terrible malédiction s’abatte sur la Forêt Enchantée.
Le destin et la magie d’un Apprenti m’ont propulsé à New York avant que le Sort Noir ne soit lancé. Je pense que c’est pour cela que je me souviens de qui je suis. Tu as dû perdre ta mémoire quand tu es arrivé dans ce monde après cette malédiction.

Ce que je ne comprends pas pour le moment, c’est comment tu as pu arriver dans cette ville. La malédiction qui devait être lancée prévoyait de créer une nouvelle ville pas de faire venir les habitants des Mondes Enchantés dans une ville déjà existante.
Je ne peux pas t’en dire plus sur ta présence à New York. Peut-être que Wenda pourra t’en dire davantage après votre départ de nos mondes respectifs. Que t’a dit précisément ta chère amie madame Darwin sur tout ce sujet ? »