La ville était un peu en effervescence en ce moment, entre les différentes aventures avec la Reine des Glaces, les nouveaux arrivants et les fêtes de noël qui approchaient à grands pas, c’était un peu trop pour moi. Beaucoup de gens, beaucoup d’émotions et surtout de souvenirs, par moments j’avais l’impression d’être totalement submergée et ça me fichait une trouille folle. J’agrippais alors le pendentif que m’avait donné ma Nina afin de traverser la tempête, il y avait des choses qu’il fallait mieux ne pas connaître sur les autres, vous pouvez me croire… Alors en ce moment je rasais un peu plus les murs que d’habitude, le temps de retrouver mes marques et d’appréhender de nouveau ma magie. J’essayais de rester au calme et seule, le plus possible, me baladant dans les rues de la ville à des heures où je savais qu’il y avait peu ou pas de monde et ainsi je pouvais continuer à mener ma petite vie. Le collège mis à part c’était une affaire qui roulait, en tout cas je faisais tout pour !
Ce soir était un soir particulier toutefois, j’avais sorti tout un attirail pour dessiner, car en effet, cette nuit devait laisser voir une pluie d’étoiles filantes et j’étais tout à fait prête à regarder le ciel et à essayer de capter l’instant dans un dessin. Je m’étais alors assez chaudement vêtue, j’avais même mit un bonnet pour ne pas prendre froid à la tête ! Un gros gilet en laine, des mitaines, des collants et mes affaires et j’étais prête pour la soirée ! Je me rendis alors sur la grande rue, afin d’avoir un peu de luminosité pour mes gribouillages. La nuit était paisible, mais il était également possible que d’autres aient la même idée que moi… Pourquoi pas ? Après tout ce n’était pas un spectacle que l’on pouvait observer tous les jours.
Je me posais par terre, sur le bord du trottoir, sortant mon cahier de dessin et mes crayons, je dessinais tranquillement à la lueur des lampadaires de la ville, regardant le ciel, la bibliothèque et l’horloge. C’était un beau spectacle. Le temps d’un instant j’aperçus quelque chose ou plutôt quelqu’un, puis plus rien, c’était peut-être une vision du futur, plutôt courte toutefois, mais ça arrivait… Je soufflais un peu, puis posa mes affaires dans mon petit sac, le regard rivé vers le ciel, espérant voir au moins une étoile et faire un vœu comme il était coutume. C’était dommage de ne pas pouvoir partager cela avec quelqu’un mais Cly était occupé et je ne voulais pas l’embêter avec ça… Alors, je regardais le ciel, seule et un peu mélancolique, lorsqu’une vision me frappa de nouveau : Le vent était fort, violent même, je ne pouvais rien distinguer, jusqu’à ce qu’il s’arrête brutalement et laisse apparaître une jeune femme....
Je soufflais à nouveau, une chose était sûre, je n’appréciais pas qu’elles surviennent, n’importe où, n’importe quand, alors, ressentant le besoin de bouger un peu, je pris mes affaires, regarda le ciel et me dirigea vers...vers où d’ailleurs ? Vers quelque part, la tête toujours un peu en l’air, ce soir ce serait le ciel qui me guiderait, voilà ! En avant pour une nouvelle grande aventure, je penserai plus tard à ce que j’avais vu, ou plutôt à ce que j’avais cru voir...
Mes visions n’étaient pas toujours claires, elles ne donnaient généralement même pas d’aide pour savoir « quand », juste « comment » et franchement, des fois je préférerai pas savoir. C’était assez dérangeant que ça m’arrive toujours sans prévenir, alors j’essayais de contrôler tout ça, difficilement, mais j’essayais, surtout depuis que la malédiction était levée. Cela devenait de plus en plus important d’apprendre à contrôler mon don. J’avais même commencé à apprendre l’art de fait des barrières magiques, ça non plus c’était pas encore gagné, mais tout le monde avait dû être débutant avant de devenir de fantastiques mages ! Donc je gardais espoir et j’évitais de parler de mes expériences magiques à Cly, il n’était vraiment pas à l’aise avec tout cela et je ne voulais pas qu’il se sente mal. Alors, pour le moment je me débrouillais tant bien que mal.
Ce soir, je n’avais vraiment pas envie de rester là, même avec les étoiles filantes qui devaient passer dans le ciel, il faisait un peu frais et en plus avec cette vision bizarre que je venais d’avoir je préférais remballer mes affaires et me glisser dans la maison de Cly pour la nuit. Il m’avait même donné un double des clefs pour faciliter les choses lorsque je partais de mon foyer. Ainsi j’avais toujours un toit où dormir et un endroit où il faisait chaud et où il y avait toujours pleins de choses à manger. Beaucoup de gâteaux d’ailleurs…
Je repartais alors en direction de la maison de Cly, « normalement », je n’étais jamais sûre de rien, je n’arrivais jamais par le même côté et je ne mettais jamais le même temps de trajet. Nous n’étions pas encore parvenu à faire passer ma capacité extraordinaire à me perdre. On essayait, mais c’est vraiment pas concluant. C’est à se moment là que de la brume apparut et que quelqu’un débarqua, un peu comme lors de ma vision précédente ? Non, c’était pas possible, ça n’arrivait jamais aussi près, sauf pour me prévenir de quelque chose, mais de quoi ? La brume laissa apparaître une jeune femme brune, assez légèrement vêtue vu la température à l’extérieur. Elle était très belle et je devais dire que son arrivée était assez spectaculaire mais ça renforçait mon sentiment de malaise, surtout que nous étions juste toutes les deux et que je n’avais pas la pelle de Cly pour me défendre ! Je savais bien qu’il fallait que je la prenne toujours sur moi ! Mais il paraît aussi que ça ne se fait pas…
Punaise, elle souleva les bras et je la fixais un peu, me préparant à détaller à tout moment, j’évaluais la distance, elle était à peu près à trois mètres de ma position, est-ce que je pouvais courir rapidement et m’enfuir ? Pas sûr, tout dépendait de ses propres pouvoirs… ça se tentait ? Peut-être… Elle ne dit alors de ne pas la craindre et me demanda si j’étais bien Lexie. Sur le coup j’étais tentée de dire non, mais j’étais un peu trop angoissée pour lui répondre quoique ce soit… Ses mots tournaient un peu en boucle dans ma tête, jusqu’à ce que je décide enfin à agir, tout d’abord je me pinçais le bras gauche pour être sûre de ne pas être en plein rêve et/ou vision, puis une fois assurée que la situation était bien en train de se passer, je ne répondis pas à la question de la jeune femme, je lui souhaitais doucement une « bonne soirée » avant de m’en aller dans le sens inverse d’elle et ce à toute vitesse.
Il ne fallait pas parler à des inconnus, encore plus le soir, toute seule. En plus elle avait même pas de gâteaux ou de biscuits ou même du chocolat de ce que j’avais pu constater donc, elle ne faisait pas partie de la règle de Cly. Je n’avais qu’une idée en tête, m’éloigner rapidement, essayer de trouver la maison de Cly et choper ma pelle, je ne sortirais plus tard le soir sans elle… Plus jamais...
C’était vraiment une situation bizarre, comme si dire bonsoir à une personne et courir dans la direction opposée allait arrêter quelqu’un qui semblait me chercher, quelqu’un capable de débarquer du ciel ! Du ciel ! Une dame venant du ciel me cherchait et je m’étais enfuie, pas longtemps d’ailleurs car rapidement elle se retrouva à côté de moi saisissant doucement mon bras pour me faire arrêter. J’étais alors comme statufiée et malgré ses paroles rassurantes je ne savais pas quoi faire, je ne la connaissait pas et franchement à cette heure de la nuit, avec la vision juste avant et cette démonstration de ses pouvoirs, je ne me sentais pas vraiment en sécurité, et je n’étais pas encore assez douée en barrière magique pour en faire une là, maintenant.
Alors que je cherchais un moyen de m’échapper, ce que la dame me dit fini par arriver tout en haut de mon serveur central : « C’est votre père qui m’envoie », ces paroles étaient étranges et pourtant je pouvais ressentir la sincérité dans la voix de la jeune femme. Mon père ? A moi ? Je me sentais bête sur le coup, me calmant un peu, réfléchissant à ses paroles, me demandant si elle pouvait dire vrai, car pour ma part je ne connaissais pas mon père, ni ma mère d’ailleurs, je n’avais connu que Nina, ma Nina, alors mes parents… Je ne savais rien d’eux, Nina esquivant toujours ce genre de question et finalement j’avais arrêté de demander, après tout, nous étions bien, nous étions toutes les deux et elle était tout pour moi.
La jeune femme avait réussi à attirer mon attention, à attiser ma curiosité et j’avouais que je voulais savoir ce qu’elle savait, en espérant qu’elle ne mente pas… Mais tout d’abord, je me devais de lui confirmer la situation : « O..Oui...je...je suis Lexie... », lui dis-je alors d’une voix peu sûre, j’étais un peu inquiète, mais surtout j’avais envie de savoir maintenant, mais avant : « Qui...qui êtes-vous ? », lui demandais-je alors tandis que de nouvelles questions se bousculaient dans ma tête. Je la regardais puis me pinçais les lèvres, hésitant à poser la prochaine question, mais je devais le faire… Et si...si tout cela était vrai, alors cela voudrait dire que je ne suis pas seule, qu’il reste quelqu’un de mon sang, mais aussi que cette personne a choisi de ne pas être avec moi, non ? Alors pourquoi revenir ? Pourquoi maintenant ? Je ne comprenais pas… « Je...enfin...vous...vous avez dit que...vous...enfin... », je soufflais un peu puis reprenais… « J’ai un papa ? », lui demandais-je le plus simplement du monde, un peu tendue, j’étais à la fois contente et triste, incertaine aussi, toutes mes émotions se bousculant dans ma tête et me laissant une sorte de cacophonie. « Dites-moi... »
La jeune femme devait me prendre pour une folle incapable de prononcer une phrase correcte de plus de quatre mots. J’étais sous le choc, prise par une émotion que je ne connaissais que trop bien : l’espoir. Je ne devais pas pour autant me laisser enivrer, non, cela n’apportait que de la souffrance au final. Pourtant j’avouais que j’étais curieuse, que je ne m’attendais pas du tout à ce qu’une personne débarque du ciel pour me faire une telle déclaration. Malgré moi, je ne pouvais m’empêcher de me poser tout un tas de questions sur l’identité de celui qui pensait être mon père, sur son apparence, sa personnalité, oh oui, son lien avec ma Nina et avec cette jolie personne… Qui, Quoi, Comment… mais aussi pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi je ne le connaissais pas ? Pourquoi ma Nina ne m’en a pas parlé ? M’avait-il abandonnée ?
Alors que j’étais encore choquée et aux prises avec mille et unes questions, la jeune femme me saisit le droit, je me raidis mais la laissait faire lorsque je vis qu’elle prenait la direction d’un banc. Sa main était chaude comme si le froid ne l’affectait pas, mais là tout de suite, c’était l’une de mes dernière préoccupation. Une fois installées, elle répondit à mes interrogations précédentes, celles que j’étais parvenue à formuler…
Je l’écoutais puis me figeais aussi vite, la regardant avec de grands yeux étonnés, elle s’était présentée comme étant la Reine de Wonderland ! La vraie Reine Blanche ! Du coup, je ne savais pas comment je devais me comporter, j’étais devant une reine tout de même ! Et pourtant je demeurais statufiée, écoutant la suite de son histoire un peu folle, mais qui bizarrement semblait plausible… sans doute parce qu’elle était vraie… Elle me parla alors de ‘mon père’, ce mot semblait encore un peu bizarre, distant à mes oreilles. Cela semblait quelque peu compliqué, mais je retenais tout de même quelque chose : il l’avait appris il y a peu… cela voulait dire qu’avant il n’était pas au courant ?
La charmante Juliette me proposa alors de plonger dans son esprit avant de me dire que c’était un homme formidable.
Je restais alors quelques instants en silence, essayant de digérer un morceau de ce qu’elle venait de me dire mais lorsque j’essayais de reprendre la parole, je refermais la bouche quasiment tout de suite. J’avais beaucoup de choses à demander mais aucun son ne voulait sortir. Je soufflais alors un peu, fermant les yeux une seconde ou deux avant de me retrouver un peu. « Désolée... », lui dis-je alors, j’avais vraiment beaucoup de mal à imaginer tout cela. Certes j’étais assez contente, mais dans un sens je trouvais cela bizarre. Et puis… malgré sa proposition… « Je...je ne peux pas entrer...dans votre esprit... », lui dis-je alors, je ne me contrôlais pas et puis, j’avais toujours vu mon don comme une façon de visiter le passé et le futur et non comme une intrusion visée dans la tête de quelqu’un. « Vous...vous dites qu’il l’a apprit il y a peu...mais...comment il peut savoir...que je suis sa fille ? », lui demandais-je alors malgré le fait que j’avais peur, peur d’être déçue, peur de m’accrocher à un espoir qui n’est pas le miens… « Ma Nina ne m’a jamais parlé de lui... », ajoutais-je alors. J’avais toute confiance en ma Nina, mais la Reine Blanche, mon ‘père’, eux, je ne les connaissais pas et puis Cly m’avait déjà mise en garde à plusieurs reprise sur les gens. Les gens ne sont pas tous gentils… alors peut-être que c’était une arnaque… une des plus douteuses et très méchante, mais on ne sait jamais ce qu’il se passe dans la tête des autres...
J’avais que je doutais un peu, Cly m’avait apprit à ne pas trop faire confiance aux gens. Il m’avait dit que je pouvais faire confiance aux personnes qui offraient des gâteaux et des sucreries car ces personnes ne pouvaient pas être mauvaises ! Les gâteaux sont bons donc les gens sont bons. Or dans notre cas, je ne pouvais pas me fier à cette règle de mon papa de coeur, non, car la Reine Blanche n’avait visiblement pas de gâteaux sous son manteau et semblait malgré tout, terriblement sérieuse. Même si j’avais une furieuse envie de m’enfuir en courant, j’étais également une personne très curieuse et en apprendre plus sur ma famille avait été pendant longtemps un doux rêve. J’avais imaginé un tas de choses, comme ma Nina ne voulait rien me dire… Mais jamais au grand jamais je n’aurai pensé qu’un jour on vienne m’annoncer que j’avais un père, que cette personne était vivante et je crois, qu’elle voulait me rencontrer.
C’était étonnant, douteux, stupéfiant, terrifiant. Juliette répondit alors à quelques unes de mes interrogations, mon potentiel papa avait donc un don similaire au mien et apparemment le contrôlait bien mieux que moi et il m’avait retrouvée par hasard. Un hasard bien relatif d’après mon expérience du destin, mais je restais silencieuse, assez captivée par l’histoire de la jeune femme. Puis elle me demanda qui était Nina, elle ne semblait pas la connaître, ce qui en soi ne m’étonnait pas vraiment, mais bon, si mon ‘père’ m’avait retrouvée, il savait aussi qui était Nina non ? Il aurait pu prévenir sa messagère non ? Et puis, je me demandais quel était leur lien, en considérant que cette histoire était vraie et que j’étais bien la personne recherchée…
Je soufflais un peu avant de lui répondre, c’était encore douloureux de parler de ma Nina à d’autres personnes, pour moi c’était toujours comme si elle m’avait quitté la veille alors qu’objectivement ce n’était pas le cas. « Ma Nina est...était la personne qui m’a élevée dans la forêt enchantée. », je fis une pause avant de reprendre, « Je l’ai souvent interrogée sur mes parents mais elle ne voulait rien me dire ou restait muette sur le sujet... », souriant à la Reine, j’ajoutais « C’était une femme formidable vous savez… mais je me demande quel était donc son lien avec... votre magicien... ».
Pour l’instant tout cela était encore très flou, même très très mystérieux. Et j’espérais que la jeune femme saurait m’éclairer sur la question, mais pour l’instant, il était temps de penser au présent et à la froideur de l’hiver. Je souris alors un peu à la belle Reine, avant de lui répondre : « J’ai une bonne veste, mon bonnet et mes mitaines, je n’ai pas trop froid pour l’instant. Merci. », je la regardais avec une pointe de curiosité, je me décidais à lui demander, « Comment ça se fait que vous ne sentiez pas le froid ? », trouvant déjà que sa tenue était très très légère...