Un monde de débauche, de sexe et de dépendance. Un monde sans le moindre sourire où j’étais le maître. Un monde infernal dans lequel j’évoluais lentement mais sûrement et dans lequel je sombrais. C’était mon propre enfer que j’avais creusé. J’avais détruit mon existence moi-même en me refusant une once de bonheur. Je n’y croyais absolument plus. Je ne croyais plus aux sourires et aux rires. Je ne croyais qu’en ma propre déchéance de plus en plus sombre. Je ne voulais rien ressentir. Je me refusais de pleurer ma rage. Je me contentais de vivre comme je l’avais toujours fait dans la décadence et l’opulence. Je ne comptais plus le nombre de kilos de cocaïne que je m’étais enfiler dans ma vie, les litres d’alcool et depuis quelques mois l’héroïne qui prenait de plus en plus de place. J’avais l’argent pour le faire et, par miracle, rien de paraissait sur mon corps. Je semblais peut-être un peu plus fatigué mais le monde de la nuit était le mien.

Kelly pensait que je parlais de notre «relation», mais je ne parlais pas de ça. Je préférais lui faire croire que c’était le cas cependant, Je n’étais pas du genre à me livrer à mes émotions ou ce genre de trucs. La main de la rousse se posait contre la mienne et je retirais ma main pour venir poser un baiser dans le creux de la sienne.

- Personne ne peut être bien avec moi Kelly. Personne. On ne peut être bien avec une personne qui se déteste autant elle-même. Tu devrais partir. Je te rappellerai un autre soir.

Ne plus penser … Ne plus rien ressentir. Je me levais comme un robot. Je prenais mollement mon étui de cuir noir avant d’aller dans la salle de bain. Je fermais la porte et je m’appuyais sur le rebord du lavabo de marbre blanc. Je levais la tête pour me regarder dans la glace. Mon frère devait être fier. Sans trop me poser de question, j’ouvrais mon étui et je prenais le sachet et la cuillère avec le briquet. Je m’assoyais le sol avant de faire chauffer la drogue pour la faire fondre. Je prenais ensuite le contenu avec la seringue. Un bout du garrot dans la bouche alors que je le serrais en mettant mon bras en extension. Je m’injectais ma drogue avant de relâcher la pression du garrot.

Je fixais le plafond sans trop me soucier si je venais de m’en injecter trop. Je partais sur un nuage de bonheur artificiel qui me faisait du bien. Je ne me rendais pas compte que j’avais glissé sur le dos et je fixais le plafond d’un regard livide et sans vie. La seringue était encore dans mon bras. Dans mon étui il y avait une seringue d’adrénaline au cas où mais je ne voulais pas arrêter. Ma vie c’était ça. Ma vie c’était un vide infernal et sans fond que rien ne pouvait soulager. Pas même elle avec ses yeux verts magnifiques et ses cheveux roux sublimes. Je fermais les yeux sur le visage de Zelena. Un petit tour en enfer peut-être qui sait?

La vue de mon corps inerte avec le regard dans le vide devait être totalement horrible. Kelly avait beau me parler, j’étais incapable de réagir. J’étais dans un monde aussi vide que ce que je pouvais ressentir à l’intérieur de moi. Un monde froid et désolant où régnait la mort en maître. Les secours avaient été appelés pour tenter de me sauver la peau. Les journalistes devaient déjà avoir eu vent de ce qui se passait alors qu’elle passait l’appel. Ils n’attendaient que ça en fait. Ma déchéance la plus pure pour vendre davantage d’articles et de bout de papier parfait pour se torcher le cul.

Kelly me demandait de rester avec elle, mais je fermais les yeux dans l’inconscience la plus complète. Je ne me rendais pas compte de l’arrivée des secours qui tentait de me mettre des capteurs pour mon coeur vide. Je restais inconscient durant tout le trajet. Un masque à oxygène sur le visage alors que les sirènes m’amenaient au grand centre hospitalier. J’étais amené dans la salle de traumatologie. On m’injectait des doses d’adrénaline de malade avant d’utiliser le défibrillateur sans le moindre succès. J’étais cliniquement mort à ce moment en fait. Harry Olympus n’existait plus.

Soudain, les médicaments firent effet d’un coup et je me redressais en poussant une infirmière beaucoup trop près de moi à mon goût. Je prenais de grandes bouffées d’oxygène avant que l’on ne me donne un sédatif pour que je reste docile durant le reste des soins. J’étais trop agité avec l’adrénaline qui coulait dans mon sang. Il y avait une tonne de journalistes devant la porte des urgences attendant que quelqu’un vienne se délier la langue sur mon état. Mon assistante arrivait en panique et on lui indiquait Kelly comme étant ma fiancée. Elle haussa un sourcil avant de s’asseoir avec elle dans le silence. Elle reportait mes rendez-vous et tout le reste.

Le médecin arrivait après que j’ai été amené dans une chambre privée. Je somnolais dans le lit avec le moniteur cardiaque branché sur moi , une perfusion et des lunettes d’oxygène. J’étais entre-deux et j’entendais la voix de mon assistante fendre l’air. Là, je grognais après elle sans parler. Je voulais avoir la paix.

- Où est Kelly? …

- Kel … Oh la fille heu juste dehors, mais je … Écoutez monsieur Olympus vous

- Faites entrer Kelly et fichez-moi la paix le temps que je suis ici …

Mon assistante était surprise et sortait. Elle mentionnait à Kelly que je voulais la voir. Je somnolais encore et j’avais les yeux dans mon lit d’hôpital. J’en étais donc là? Vraiment?  

Une overdose importante. J’aurais pu crever dans cette salle de bain, mais il semblait que les enfers ne voulaient pas d’un homme comme moi. J’étais donc si déchu que même les abysses me refusaient leur accès? J’étais complètement crevé et la douleur qui envahissait mes muscles était importante. J’étais dans une position plus que vulnérable et je savais que la presse allait jouir de ce moment comme jamais. Je toussais un peu en ayant les yeux fermés. J’avais demandé à mon assistante d’aller chercher Kelly. La pauvre femme avait eu la malchance de me retrouver sur le carrelage de la salle de bain à moitié mort. Je ne souhaitais cela à personne en fait.

J’entendais la porte s’ouvrir et se fermer, mais je ne me sentais pas la force d’ouvrir les yeux tout de suite. J’avais plus ou moins entendu les coups à cause du bourdonnement dans mes oreilles. J’entendais finalement la voix de Kelly et j’ouvrais péniblement mes yeux. Je tournais la tête vers elle. Elle me demandait vraiment comment je me sentais celle-là? Seigneur elle était sérieuse en plus? Je souriais un peu en coin avant de lui répondre.

- Comme une jeune vierge le jour de son mariage. J’ai connu mieux et je connaîtrai pire le soir de mes noces quand mon mari viendra me dépuceler sans la moindre préparation.

Kelly ne s’était pas changé. Elle prenait la peine de tirer le fauteuil pour s’asseoir près de moi. Je la regardais croiser les jambes avec un autre sourire. Je toussais ensuite un peu et je soupirais.

- Un peu courte la jupe non? Tu aurais dû me piquer mon pantalon. De toute façon, je crois qu’il l’on découper… ah non … J’étais nu c’est vrai … Je crois … Putain je me souviens plus.

Je me passais une main dans le visage avant de ramener mon regard sur la rousse. Pourquoi était-elle encore là en fait? Pourquoi avait-elle choisi d’appeler les secours alors qu’elle aurait pu me regarder crever et me pisser dessus par la même occasion? Je lui faisais signe de s’approcher de moi. J’avais envie de sentir sa chaleur contre moi et je me fichais bien d’avoir un moniteur cardiaque en place avec une perfusion et de l’oxygène.

- Vient ici Kelly.

Je lui faisais un peu de place en posant ma main sur le drap sans assouplissant qui sentait le javellisant. Je regardais la rousse dans les yeux. Ces yeux d’un vert si magnifique et parfait.  

Oui, la question avait été certes un peu ridicule mais en même temps, je ne savais pas vraiment quoi dire d’autre une fois entrée dans la chambre. J’avais vraiment eu peur pour lui et je n’avais encore jamais vécu quelque chose comme ça. J’espérais que ce serait la dernière fois en tout cas. Je souriais en secouant négativement la tête. Même dans les pires situations, Harry faisait tout pour dédramatiser. Mais il avait quand même faillit mourir, ce n’était pas rien. En revanche, je ne savais pas s’il s’agissait de sa première tentative ou non. Je n’étais pas ici pour le juger de toute façon.

« Je vois ça, je suis ravie que tu reprennes du poiles de la bête en tout cas. Je n’ai pas vraiment pensé à ça pour tout te dire et oui, tu étais nu quand tu es parti dans la salle de bain. Ma robe ce n’est qu’un détail tu sais. »

Harry me faisait signe de venir m’assoir à côté de lui. Je décroisais mes jambes et je me levais pour m’y rendre. Je retirai mes chaussures et je m’allongeais à côté de lui en prenant soin de ne pas me prendre dans les fils. Je posais doucement ma tête contre son torse et je fermais les yeux. Mon Dieu, c’est fou à quel point j’avais eu peur de le perdre. Je n’avais plus envie de le quitter mais je savais que j’allais me prendre un vent si j’abordais ce sujet. Je me contentais simplement de rester contre lui et d’écouter son coeur qui était si fragile.

Quelque chose m’attirait chez lui, quelque chose que je ne savais pas expliquer. J’avais l’impression de le connaître et d’avoir déjà vécu une situation similaire. J’avais peut-être rêvé de quelque chose comme ça et j’avais l’impression que ça se réalisait ? Je ne savais pas vraiment comment je devais interpréter tout ça. Tout ce que je voulais pour le moment, c’était prendre soin de lui et rester avec lui le plus longtemps possible. Mais le connaissant, il me dirait certainement de m’en aller. Il faisait toujours ça quand je me rapprochais trop de lui. Il faisait peut-être ça pour se protéger ? Il avait peut-être souffert en amour. Je ne le connaissais pas encore assez pour répondre à cette question. Je me sentais bien contre lui et je souriais en gardant mes yeux fermés. Il ne devait plus recommencer.
 

Mon propre enfer dans mon propre monde. Une déchéance qui était la mienne et qui me tirait vers le fond. Je ne cherchais rien ou peut-être que je cherchais tout en fait ? Je voulais Kelly soit près de moi. Je tentais de banaliser les choses comme je le faisais tout le temps. C’était la beauté de la chose. Cette fâcheuse tendance que j’avais à prendre les choses à la légère. Je laissais la femme s’installer près de moi et je passais mon bras autour de son épaule délicate. Je fermais les yeux en sentant sa chaleur réchauffer mon corps. J’étais bien en ce moment, mais je savais que ce n’était que temporaire. Je savais que mon overdose allait faire la une des journaux à nouveau et que mon avocat allait se rappeler pourquoi je le payais si cher. L’argent n’achetait clairement pas le bonheur, j’en étais la preuve vivante.

- Super, les ambulanciers ont pu se rincer l’oeil sur mon anatomie divine.

Je souriais en coin en gardant les yeux fermés. Mon coeur battait à un rythme régulier et j’avais un peu mal à la tête. J’avais envie que Kelly reste et en même temps, je voulais qu’elle fiche le camp. Je devrais peut-être lui signer un rapport de confidentialité ? Comme ça, je serais certain qu’elle ferme sa grande gueule ? Je portais une main à ma tête en poussant un soupir. J’avais besoin d’une dose merde ! Je voulais me faire un rail ou un shoot le plus rapidement possible.

- Je veux partir de ce putain d’hôpital … Fais-moi sortir Kelly.

Un ordre plutôt qu’une suggestion. Je ne voulais pas et je n’allais certainement pas rester ici. Je regardais la jeune femme dans les yeux. Elle allait clairement vouloir me tuer sur place. J’avais besoin d’aller dans mon bar. J’avais besoin de me défoncer encore plus pour profiter de la vie ou étais-ce plutôt pour creuser plus profondément ma tombe ? Je grognais un peu en me raclant la gorge.

- S’il te plaît bébé. Fais ça pour moi ok ? Je ferais ce que tu veux, mais tu me sors d’ici le plus rapidement possible.

Oh, j’allais probablement refaire une overdose dans les semaines à venir. J’allais sombrer dans les enfers le plus profondément possible et le pire … J’adorais ça. J’adorais la sensation que ça me donnait de quitter le monde des vivants pour atteindre celui des morts. Cette sensation de flotter et de partir. Putain, j’en étais complètement accro ! Je voulais crever ! Je devais crever …
 

Je désirais une seule chose : sortir de ce putain de lit et rentrer chez moi. Je m’en foutais d’elle au fond. Je m’en foutais de ma putain de vie. Je tentais de regagner mon monde comme je le pouvais au fond sans vraiment le savoir. Kelly me regardait dans les yeux en me disant qu’elle ne pouvait pas. On ne pouvait pas envoyer quelqu’un en désintoxication comme ça. Je n’avais commis aucun crime en dehors de pousser trop de bouchons. Je la laissais parler en la regardant dans les yeux.

- Je n’irai pas dans une putain de cure de désintoxication. Je n’ai pas envie d’y aller et je n’ai pas envie d’être sobre ! Quand comprendras-tu que je ne changerais pas hein ? J’ai peut-être bien envie de crever au sommet de ma putain de gloire Kelly alors trouves le moyen de me faire sortir d’ici… Si tu tiens à moi, même si c’est juste un peu, tu vas faire ce que je te demande.

J’avais parlé calmement, mais j’étais hautement sérieux. Je prenais sa main et j’y posais un baiser. Mon assistante entrait au même moment et je lui lançais un regard qui en disait long.

- Hum c’est que j’ai un attaché de presse qui voudrait savoir ce qu’on va dire aux médias.

- Dites que je vais parfaitement bien. Que ce n’était qu’un malaise de surmenage. Je sors dans quelques heures et putain de merde trouver moi un médecin que je signe ce refus de traitement !

Mon assistante partait immédiatement. Je me redressais avec la tête dans le cul. J’avais vachement mal comme toujours et je poussais un soupir. Je retirais moi-même ma perfusion et mes électrodes pour le coeur. Rien à foutre. Je n’avais pas envie d’avoir cette conversation avec Kelly. Déjà, je lui en avais dit trop. Je lui avais dit que je voulais crever et partir de ce putain de monde infâme dans lequel j’évoluais. Les machines bipaient comme jamais et je m’en foutais. Je regardais Kelly dans les yeux.

- Donne-moi mes vêtements s’il te plaît Kelly. Je ne vais pas sortir de ce trou cul nue …

Mon choix était fait. Je ressentais quelque chose pour la rousse, mais c’était minime. Déjà, je lui avais fait confiance en lui parlant ainsi et en m’ouvrant à elle. Je portais une main à ma poitrine. Mon coeur n’aimait clairement pas l’effort que je faisais en ce moment. Je grimaçais en me massant et en respirant profondément. J’étais en sueur.