Robin était mort. Deux jours que Regina avait brisé mon cœur en m’apprenant cette terrible nouvelle. Ses mots résonnaient en moi, mon cœur saignait de douleur. Je m’en voulais. J’avais passé tant de temps à me concentrer sur milles et un stratagèmes pour récupérer l’amour de mon mari que je n’avais pas pris la peine de partir voir mon meilleur ami. J’avais même rit au nez d’Aeline quand elle avait annoncé la disparition de Robin. Si je l’avais écouté j’aurais pu la retrouver. Je serais partie en enfer pour le sauver. J’aurais au moins essayé. Il était mort. C’était trop tard. Il nous avait abandonné, Petit-Jean et moi. Nous avions pris ensemble tous les risques pour reformer notre trio et nous sauver de l’emprise de la reine des glaces et maintenant il n’était plus là. Il était parti pour toujours, j’étais à terre et je n’arrivais pas à remonter. La première nuit après cette annonce, je l’avais passé chez Petit-Jean. Ça m’avait paru naturelle, je savais que si Roméo l’apprenait j’aurais droit à une scène, mais je m’en fichais. Il détestait Robin. Je n’avais pas envie de retourner vers mon mari pour la bonne et simple raison qu’il allait souffrir de me voir ainsi pour un autre.

Le premier jour dans un monde sans Robin, je l’avais passé dans la forêt perchée au sommet d’un arbre, avec pour ami Dawn et une pluie diluvienne qui avait tombé sans discontinuer. Ce jour-là je n’avais pas pleuré, le ciel le faisait pour moi, mais j’avais réfléchi. J’avais tenté d’imaginer un monde sans Robin. Un monde dans lequel il n’était pas là pour me rappeler que cette magie en moi était belle et que je ne devais pas succomber à cet appel maléfique qui nourrissait mes regrets et ma conscience. Une journée de silence, où même Dawn n’osait pas penser de peur de me voir m’effriter et passer dans une phase incontrôlable.

Aujourd’hui j’étais enragée. J’avais passé ma journée à haïr mon meilleur ami pour avoir osé partir en enfer sans Petit-Jean et moi. Pourquoi est-ce qu’il avait fallu qu’il joue les héros ? Son fils était sans père. Il nous avait lâchement abandonné. Il m’avait menti. Il avait promis de ne jamais disparaitre et il l’avait fait. Je le détestais. A l’instar de ma colère, le ciel avait été orageux et l’atmosphère lourde. Comme la veille j’avais passé une partie de la journée dans la forêt là où Robin s’amusait à m’entrainer au tir à l’arc. J’avais continué, jusqu’à ce que je rate la cible et que je ne l’entende pas me reprocher la manière dont j’avais placé mon bras, ou la manière dont j’avais tenu la flèche. Le silence m’avait rendu folle, et j’avais brisé les cibles avec un puissant éclair qui les avaient explosé en milliers de morceaux. Face aux carnages que j’avais fait, j’avais pleuré pendant une bonne heure genoux à terre à supplier Robin de me pardonner. Quand les larmes avaient cessé de couler j’étais partie chercher Rolland à l’école, comme toujours ce dernier m’avait sauté au cou et je l’avais emmené chercher une glace avant de le laisser aux merry-men qui avaient eu la même idée que moi. Malgré leur invitation à rester j’avais refusé et j’étais repartie à l’appartement. Heureusement j’étais seule. Louise était au travail en ce début d’après-midi. Tant mieux parce que j’avais envie de voir personne. Après avoir refermé la porte à clé derrière moi je partais dans la salle de bain et prenait une douche brulante pour essayer de me changer les idées.

Ce n’est qu’une fois que j’étais séchée et habillée d’un sweat que j’avais piqué à Romain et d’une legging que la sonnette retentissait dans l’appartement. Laissant échapper un grognement je restais dans le canapé. La personne allait finir par se fatiguer toute seule, c’était ce que je me disais mais une fois de plus la maudite sonnette résonnait suivit de frappement sur la porte. Sérieux ? On ne pouvait pas avoir la paix ? J’aurais mieux fait de rester à la cime de mon arbre, là au moins j’avais la paix. L’idée que ce soit Romain me traversant, je me décidais à aller ouvrir. Malheureusement, quand j’ouvrais la porte, ce fut Regina qui se trouvait derrière et je me maudissais de ne pas avoir utilisé le maudit judas de la porte d’entrée. Je n’y pensais jamais.

« Regina… »

Lâchais-je d’une voix éteinte. Je n’avais pas envie de parler encore moins à elle et mon accueil faisait sentir. Désireuse de la voir partir j’ajoutais :

« Louise n’est pas ici si elle n'est pas à son poste de travail faut chercher ailleurs. »

☾ anesidora

La vie était devenu une sorte de parcours du combattant, déjà depuis la séparation avec Robin, et plus encore depuis son décès. Avoir dû annoncer la mort de leur meilleur ami à Juliette et Petit Jean avait été une épreuve extrêmement difficile pour Regina, surtout que ces deux personnes étaient loin de la porter dans leur coeur. Elle avait fait du mal aux deux, mais concernant Juliette, elle n’était pas encore au courant de l’ampleur de ce que la méchante reine avait pu lui infliger, même indirectement. Ce matin-là, madame le maire avait rendu son coeur à Roméo Montaigu, connu à Storybrooke sous le nom de Romain Whitchappel, son garde du corps. Regina n’avait pas faire le rapprochement entre ces deux hommes qui étaient la même personne, focalisée à l’époque de la malédiction sur sa vengeance, ayant donc oublié avec le temps comment elle s’était retrouvé avec Romain à son service et tout ce qu’elle lui avait fait. Ce n’est qu’en retrouvant Robin et Juliette complètement bourrés dans un bar de Storybrooke qu’elle avait compris qui cet homme était pour l’ancienne reine blanche. Mais avant qu’elle n’ait pu réparer son erreur, elle et Robin s’était retrouvés aux Enfers et l’archer qui faisait battre son coeur avait perdu la vie.

A présent de retour à Storybrooke, rongée par le chagrin, Regina s’était mis en tête de réparer ses erreurs passées, du moins de faire de son mieux, afin de ne pas céder aux ténèbres qui menaçaient encore une fois de s’emparer d’elle. L’histoire ne devait pas se répéter, elle était devenue la méchante reine après avoir perdu son premier amour, Daniel. Robin était son âme-sœur, alors le perdre l’avait détruite et il ne fallait pas qu’elle reproduise les mêmes erreurs que par le passé, ne pas céder à la facilité, la haine, la rancune. Elle avait donc rendu son coeur à Romain qui alors lui avait dit qu’il ne lui en voulait pas. La reine tombait des nues, c’était bien la première fois que quelqu’un à qui elle avait fait du mal ne l’accablait pas de reproches. A part peut-être Blanche-Neige, et encore. Cet homme était véritablement un héros et la belle brune admirait la force de caractère qu’il lui fallait pour être capable de lui pardonner. Il lui avait cependant demandé un service : parler à Juliette. Ça lui coûtait, mais avait-elle le choix ? Comment pouvait-elle refuser une faveur à cet homme à qui elle avait tant pris ? Elle avait donc accepté, laissant le temps à Roméo de rassembler ses affaires pour partir temporairement dans son ancien royaume.

C’était le milieu d’après-midi, Regina avait passé une bonne heure dans son caveau à se répéter en boucle de ce qu’elle dirait à Juliette une fois qu’elle l’aurait en face d’elle, mais les choses ne se déroulent jamais exactement comme on le prévoyait. Arrivée à l’appartement que la reine blanche partageait avec Louise, madame le maire sonna. Deux fois, puisque visiblement elle faisait la sourde oreille. Mais Regina sentait la présence de magie, elle savait que Juliette était là. Comme après le second coup de sonnette, la meilleure amie de Robin n’avait toujours pas ouvert, la belle brune se décida à frapper contre la porte. Elle s’apprêtait à lancer un « je sais que vous êtes là ! » quand finalement la porte s’ouvrit, la coupant dans son élan. Juliette n’était plus que l’ombre d’ elle-même, mais Regina ne pouvait prétendre aller mieux. Elle n’avait visiblement pas envie de la voir, ce qu’elle pouvait comprendre, mais il fallait qu’elle lui parle, elle ne pouvait pas se défausser de ce service que lui avait demandé Roméo.

- Juliette… Bonjour…

Sans attendre son invitation, Regina entra, obligeant son interlocutrice à reculer, et ferma la porte derrière elle. Elle essayait de garder contenance, il fallait qu’elle se lance.

- Je ne viens pas pour Louise, mais bel et bien pour vous. Je dois vous parler, c’est très important.

Elle jeta un œil sur le canapé.

- Il serait préférable que vous vous asseyiez. Ce que j’ai à dire ne va pas vous plaire, mais rassurez-vous, personne n’est mort.

Elle n’irait pas jusqu’à dire que quelque part, c’était une bonne nouvelle, puisque même si Roméo avait retrouvé son coeur, à présent il était parti, mais de manière temporaire seulement.

- Ecoutez, je vous ai menti. Pas de manière intentionnelle, mais j’ai fait une terrible erreur. Vous vous souvenez quand nous nous sommes rencontrées dans la forêt de Storybrooke et que vous cherchiez votre mari ? Je vous ai dit que je ne savais pas où il était. Je n’avais pas fait le rapprochement entre Roméo votre mari et Romain qui travaille pour moi ici.

Regina prit une grande inspiration. Le plus dur restait à venir.

- Asseyez-vous, répéta-t-elle.

☾ anesidora

Regina était en face de moi et je savais que j’avais une tête à faire peur. J’étais vêtue, … Aucun adjectif ne permettait de décrire on style vestimentaire qui consistait à mettre le sweat de mon mari et un pauvre leggin. Je n’étais pas d’humeur. Même si Regina faisait autant pitié que moi à voir, je n’étais pas d’humeur à tenter de la réconforter ou encore à me montrer cordiale. Si ça avait été mon mari je me serait sans doute effondré dans ses bras, mais ce n’était pas le cas. L’ancienne méchante reine s’invita sans le moindre problème chez moi et je la fusillais du regard avant de répondre sur le même ton sans émotion et vidée que la dernière fois :

« Je ne suis pas disposée à vous parler, mais visiblement vous en avez rien à faire »

J’étais la reine de la mauvaise foi quand j’étais de mauvaise humeur et que je n’avais pas envie de faire quelque chose. Regina de son côté semblait ne pas en faire cas et je soupirais en refermant mes bras autour de ma poitrine sans la lâcher du regard. De toute manière elle était aussi bornée que moi donc autant qu’elle dise ce qu’elle avait à dire et qu’elle se barre pour me laisser tranquille. Elle me conseilla de m’asseoir et j’haussais les sourcils. Je n’allais pas m’assoir non, si je restais debout elle partirait plus rapidement. Sans compter que le simple fait que ce soit elle qui me l’ait demandé me poussait à le refuser. Oui vous ne rêvez pas je m’étais à nouveau transformer en Juliette Capulet en pleine crise d’adolescence.  Silencieuse, je la regardais attendant qu’elle passe à table. Elle parla et j’haussais les sourcils avant de répondre :

« Je sais que vous m’avez menti. Je le sais depuis le jour où Romain m’a dit pour qui il travaillait. J’ai préféré en déduire que s’était parce que vous ne connaissiez pas la véritable identité de Romain. »

Une fois de plus, elle me demanda de m’asseoir et je laissais échapper un soupir en laissant mes fesses se poser sur le rebord de la table de la salle à manger.

« Asseyez-vous si vous voulez moi, je suis très bien là. Si c’est ce que vous voulez entendre, je ne vous en veux pas pour avoir été dans l’ignorance d’où était mon mari alors qu’il était sous vos yeux. Si j’ai préféré me taire c’est parce que je ne voulais pas faire, …. »

Je m’arrêtais la voix brisée par un sanglot. Prenant une inspiration je m’humectais les lèvres :

« Je ne voulais pas faire souffrir Robin en vous affligeant d’un crime commis par ignorance. »

Passant une main dans mes cheveux j’ajoutais rapidement :

« Et si vous vouliez me parler de Robin, je ne suis vraiment pas prête. Je suis désolée d’avoir été cruelle avec vous l’autre jour. Vous ne le méritiez pas. »

☾ anesidora

Juliette pouvait vraiment se montrer désagréable, Regina en venait parfois à se demander comment Robin avait pu devenir ami avec une telle femme, et plus encore la considérer comme sa sœur. Mais elle se rappelait bien vite, chaque fois que cette pensée lui traversait l’esprit, que l’archer avait été capable de faire table rase du passé de la méchante reine pour ne voir que le bon en elle. Robin de Locksley avait été un véritable héros.

La Capulet parut bien mécontente de voir l’ancienne méchante reine entrer sans permission mais Regina avait peur de voir son courage s’envoler, alors elle s’empressa de dire à son interlocutrice que c’était important et qu’il fallait qu’elle s’asseye. Egale à elle-même et telle une adolescente qu’elle n’était plus, Juliette se renfrogna. Madame le maire n’en fit pas cas et commença à parler de Romain, qu’elle ignorait être Roméo, son Roméo. Jamais elle ne pourrait lui dire jusqu’où elle avait été. Tout lui revenait en mémoire et la brune n’osait plus regarder la blonde.

- S’il vous plaît, laissez-moi parler ! Je ne suis pas venue chercher un quelconque pardon de votre part, je sais que vous ne pourrez pas me pardonner une fois que je vous aurai tout dit.

Elle sentit son coeur se serrer à l’évocation du prénom de son amour défunt et se mordit la lèvre inférieure.

- Vous n’avez pas à vous excuser… souffla-t-elle. Et je ne viens pas pour parler de Robin. Nous verrons plus tard si vous daignez toujours m’adresser la parole, nous en parlerons.

Elle savait mieux que personne ce que c’était que de souffrir de la perte d’un être cher et combien l’on pouvait être sur les nerfs et vindicatif.

- Romain, enfin, Roméo… C’est à cause de moi que vous ne parveniez pas à le trouver. Je l’ai rencontré avant de lancer le Sort Noir, je lui ai arraché le coeur pour me servir de lui et ensuite, comme tous les personnages présents dans mon royaume au moment de la malédiction, il s’est retrouvé à Storybrooke. Je suis désolée, j’ignorais qui il était pour vous, j’ignorais jusqu’à son prénom dans l’autre monde, parce que je n’en avais rien à faire à cette époque, rien d’autre ne m’intéressait que ma vengeance.

Regina prit une grande inspiration et leva les yeux vers Juliette. Sans aurait-elle envie de l’étriper, mais ce n’était pas fini. Il fallait à présent qu’elle lui dise pour son coeur, et le départ de Romain.

- Ce n’est que lorsque nous sommes venus vous récupérer dans ce bar, vous et Robin, que j’ai réalisé qui il était, quand je vous ai entendus parler. J’ai donc pris la décision de lui rendre son coeur, me rappelant que je le lui avais ôté. Seulement après, tout s’est enchaîné si vite, Robin et moi nous sommes retrouvés aux Enfers avec d’autres… et comme vous le savez, je ne suis revenue que récemment...

☾ anesidora

S’il y avait une chose que je ne pouvais pas enlever à Regina c’était sa ténacité et également le fait qu’elle se sentait relativement mal face à moi. Cette lueur dans ses pupilles, je la connaissais par cœur. Elle avait le cœur brisé. Elle aimait Robin, qu’importe ce que je peux en dire, elle l’aimait. Peut-être pas de la manière dont je l’aurais voulu, mais elle l’aimait et elle avait perdu son amour. Même si Roméo n’était jamais mort, je savais combien il était douloureux de perdre l’homme de sa vie. Sa douleur devait même être plus intense depuis qu’elle savait qu’elle n’aurait pas le moindre espoir de le rejoindre un jour. Qui y avait-il de douleur plus horrible ? C’est ce sentiment qui me poussa à l’excuser pour son ignorance et à m’excuser pour mon comportement d’y a deux jours quand elle m’avait annoncé la mort de mon meilleur ami.

Regina me demanda de me taire et j’haussais les sourcils pour une fois que j’acceptais de présenter des excuses, merci du remerciement. Généralement il n’y avait qu’envers mon mari que je m’excusais et encore c’était quand j’étais vraiment ne tord et que j’avais vraiment abusé. Mes bras toujours croisés, je pinçais mes lèvres retenant une remarque sarcastique, en me retenant sur l’odeur du sweat de Romain. Pourquoi voulait-elle que je ne veuille plus y parler ? Déjà que je n’y parlais pas beaucoup. J’avais du mal à imaginer que ça puisse être pire. Obéissante (pour une fois) j’attendais qu’elle me dise pourquoi elle était là. Après tout si aucune de mes suppositions étaient bonne j’avais pas d’autre solution que d’attendre et d’écouter.
Je fus rapidement servie, cette dernière commença a parler de Romain et je comprenais que ça n’allait pas passer. Mon attention s’arrêta au fait qu’elle lui avait arracher le cœur. Mon cerveau tournait en boucle sur cette phrase et je la fusillais du regard. Comment avait-elle osé ? Le ciel grondait sans s’obscurcir tandis que ma mâchoire se contractait. Je ne parlais plus. Je l’écoutais tout en essayant de contenir ma rage. Je l’avais toujours soupçonné, mais par amour pour Robin je n’avais jamais rien dit. J’aurais dû me fier à mon instinct. Passant une main dans mes cheveux, je continuais à la regarder d’un air ahuri :

« Qu’est-ce que vous lui avez fait faire ? »

Je retenais ma colère. Je la retenais du mieux que je pouvais, mais j’avais réellement envie de la tuer. Prenant une grande inspiration, je m’appliquais à me maintenir aux calmes et à ignorer les fourmillements dans mes doigts.

« Vous y avez rendu ? »

☾ anesidora

Regina savait, en arrivant chez Juliette pour tout lui raconter, que ce serait difficile. Elle ne s’était pas trompée, ça l’était. Tous les méfaits qu’elle avait pu commettre dans son ancienne vie lui revenait en pleine figure, toutes ces choses qu’elle avait essayé d’oublier, non pas pour minimiser l’ampleur des dégâts infligés, mais plutôt pour essayer de repartir du bon pied. Elle réalisait combien il fallait de force pour arriver à lui pardonner, et combien Robin était incroyable d’avoir pris le parti de ne pas tenir compte du passé. Pour Juliette, ce serait sans doute différent, elle était touchée au premier plan. Bien maladroitement, la maire de Storybrooke lui fit injonction de se taire pour la laisser parler. Cet ordre n’était pas donné gratuitement, l’ancienne méchante reine avait besoin de pouvoir parler sans être interrompue, sinon, connaissant la miss météo, elle ne pourrait jamais finir. Elle avoua donc son crime, celui d’avoir arraché le coeur de Roméo pour le contrôler, l’avoir gardé également à Storybrooke sans avoir fait l’effort de se souvenir de sa véritable identité. Lorsque sa femme avait voulu le retrouver, Regina était donc bien incapable de lui dire où il était, alors qu’elle l’avait sous le nez tous les jours au travail.

A voir le visage de Juliette, sans parler des bruits causés par les éléments déchaînés à l’extérieur, Regina savait qu’elle avait raison : la meilleure amie de Robin n’était certainement pas en mesure de lui pardonner quoi que ce soit. Et elle le comprenait. Le pardon était une notion qu’elle-même avait eu jusqu’à récemment du mal à assimiler concernant une certaine princesse à la peau pâle. Le fait que, soudain, Juliette soit bien moins loquace et se contente de phrases simple, ou plutôt de questions courtes, démontrait de son énervement, tout-à-fait compréhensible. Regina restait concentrée sur ce que lui avait confié Romain, ce qu’elle devait dire à Juliette, et elle savait que si elle répondait à son interlocutrice sur tout ce qu’elle avait fait ou fait faire à Roméo, elle ne la laisserait plus parler. Elle se contenta d’une petite moue en détournant le regard. Elle n’avait qu’une envie, disparaître.

- Bien sûr que je lui ai rendu. C’est ce que j’ai fait ce matin avant de venir vous voir. Si je suis là, ce n’est pas seulement pour vous dire la vérité sur ce qui s’est passé, c’est aussi et surtout parce qu’il m’a demandé de vous donner un message, déclara-t-elle en la regardant à nouveau dans les yeux.

Regina reprit une inspiration. Juliette allait sûrement s’énerver davantage en apprenant que Roméo était reparti et qu’il ne voulait pas qu’elle la rejoigne tout de suite.

- Il m’a demandé de vous prévenir qu’il doit réfléchir un peu de son côté. Il est reparti là où tout a commencé, ou fini en fonction de ce que vous préférez penser, que vous comprendriez. Il vous y attendra mais il faut lui laisser un peu de temps.

☾ anesidora

Les aveux de Regina mettaient mon contrôle à rude épreuve. Si je m’écoutais je l’aurais déjà tué juste pour avoir osé toucher à Romain. Il y avait qu’une seule personne qu’il ne fallait pas menacer sur cette terre et s’était lui et elle, elle le menaçait sans le moindre état d’âme. Elle avait fait de lui son pantin lui enlevant son identité, une partie de son âme, comme elle l’avait fait avec moi sur les terres du nord pour me contrôler. Cet acte, je lui avais pardonné, parce que Robin avait fini par me raisonner en mettant en avant le fait qu’il était essentiel et que sans ça je nous aurais tous tuer. Calmement, peut-être trop d’ailleurs, je demandais si elle lui avait rendu son cœur. Lorsqu’elle m’apprit que c’était le cas, je comprenais que cela n’était pas une aussi bonne nouvelle que ce que je pouvais l’espérer. Contrairement à ce que j’aurais fait si j’avais été à sa place et si j’y avais fait ce qu’il m’avait fait endurer pendant ses six derniers mois, il n’était pas revenu illico vers moi. Il n’était pas revenu pour me dire que tout était fini. Non, il avait demandé à Regina de me passer un message pour lui. Une larme roulant sur ma joue je sentais mon cœur se briser, à chaque fois que je pensais qu’il ne pouvait pas me faire plus de mal qu’il en avait déjà faite il trouvait un moyen de me prouver le contraire. Silencieuse, je gardais mon regard dans le sien, incapable de retenir mes larmes. Il était parti. C’était bien la seule chose que je retenais. J’étais restée dans cette ville où tous mes démons n’avaient de cesse de m’assaillir à chaque coin de rue pour lui. Parce qu’il voulait que je reste et maintenant il était parti alors que Robin était mort. J’avais tout perdu cette fois. Le vent cessa de taper contre les vitres et une pluie diluvienne s’abattait sur la ville.

« Il est parti »

Murmurais-je complètement dépassée et brisée. Soudainement, j’avais froid, pas le froid dû aux températures je savais que dans mon appartement Louise mettait un point d’honneur à ce qu’il fasse toujours chaud. J’avais froid à l’intérieur. J’avais l’impression que j’étais morte, il n’y avait plus d’espoir, plus de lumière rien, sans lui je n’étais rien d’autre qu’une coquille vide. Je redevenais cette Juliette qui avait été brisé par la maison des cygnes. Relevant la tête vers Regina, je séchais mes larmes, je savais qu’il n’y avait plus la moindre étincelle dans mes yeux. Je n’avais pas besoin de me regarder dans la glace pour ça, je sentais déjà les ténèbres me saisir. J’étais seule.

« Vous n’avez pas répondu à ma question, qu’est-ce que vous lui avez fait. Il est resté pratiquement trois semaines sous votre contrôle dans notre monde. Qu’est-ce que vous l’avez obligé à faire ? »

Le calme avec lequel je m’exprimais n’annonçait rien de bon. En temps normal j’aurais explosé de colère, mais là il n’en était rien, ma voix n’exprimait aucune émotion. Aucune colère, aucune tristesse, aucune haine, j’étais passée en mode pilote automatique. Le mode le plus dangereux qu’il pouvait exister parce qu’il signifiait que je n’avais plus rien à perdre. Vivre, mourir, je m’en fichais, je n’avais plus rien à quoi me rattacher.

« Après tout ce que vous m’avez fait subir, j’ai le droit de savoir. »

☾ anesidora

Le boulet de canon était parti sans possibilité aucune de le retenir. Regina avait tout dit ou presque à Juliette, elle avait avoué qu’elle était responsable tout ce temps de l’absence de Roméo, et qu’à présent son coeur retrouvé, il avait besoin de temps. La jeune femme semblait bouleversée et cela se comprenait. Mais elle agissait comme si elle ne pourrait plus jamais le revoir, hors, c’était faux. Contrairement à Robin, Romain était bien vivant, et il reviendrait. Il avait juste besoin de temps, était-ce si difficile à comprendre ? L’ancienne méchante reine sentit une pointe d’agacement l’envahir mais elle se maîtrisait, elle n’avait pas le droit de blâmer cette pauvre fille qui souffrait à cause d’elle et de celle qu’elle avait été par le passé.

- Il est parti, mais il va revenir, il me l’a certifié. Comprenez qu’il ait besoin de temps. Sa mémoire était affectée, et à présent, tout lui est revenu. C’est compliqué à gérer. Quand la malédiction a été rompue, les habitants de Storybrooke ont tous mis quelques temps avant de se remettre de tout ça.

Regina voulait rassurer la meilleure amie de Robin, mais elle se doutait bien qu’elle serait la dernière personne de qui recevoir du réconfort serait acceptable.

- Ecoutez, il tient à vous, il a juste demandé quelques jours, vous pourrez le rejoindre ensuite, ce n’est pas comme s’il vous abandonnait pour toujours.

Le regard vide d’émotion que Juliette lançait désormais à Regina avait de quoi faire froid dans le dos. Elle semblait éteinte.

- Juliette ? Hasarda-t-elle avant que finalement celle-ci ne reprenne la parole.

Regina regretta immédiatement d’avoir sollicité une réaction de la part de son interlocutrice. Voilà qu’elle insistait pour savoir ce que la méchante reine avait pu lui faire faire durant les trois semaines de captivité avant que le Sort Noir ne soit lancé.

- A quoi bon vous le dire, ça vous fera du mal pour rien. C’est du passé… tenta-t-elle.

En vain, Juliette insistait. Regina se mordilla la lèvre inférieure, détournant le regard.

- Ecoutez… Vous devez comprendre que j’étais une personne différente d’aujourd’hui. Vraiment très différente.

Regina hésita l’espace d’un instant à faire un champ protecteur autour d’elle. Finalement, elle trouva que c’était une bonne idée. C’était invisible, et au moins, si miss météo s’amusait à vouloir la foudroyer ou lui jeter des choses dessus, la maire de Storybrooke ne se verrait pas obligée de riposter pour se défendre, et on ne l’accuserait pas d’avoir blessé une innocente. Discrètement, elle tourna ses paumes de mains tandis qu’un champ magique invisible l’entoura tel une bulle.

- Je suis vraiment désolée, Juliette, à cette époque, j’étais d’un égoïsme sans nom et je me fichais du mal que je pouvais faire, je ne pensais qu’à moi et ma vengeance. Je n’hésitais pas à me servir des autres contre leur gré pour mon bon plaisir. C’est ce que j’ai fait à Roméo… Je comprends que vous soyez en furieuse, je le serais aussi à votre place.

Plus elle y pensait et plus elle se disait qu’en fait Romain s’était bien vengé en l’envoyant parler à sa furie de femme. Il tenait là la revanche parfaite.

- Je vous renouvelle toutes mes excuses, comme je l’ai fait ce matin avec lui.

S’il disait être capable de lui pardonner, à défaut de le faire, au moins pourrait-elle juste éviter de faire flamber toute la maison ou la ville ?

☾ anesidora

Elle ne comprenait pas. Le simple fait que Romain me tourne le dos était la preuve qu’il ne reviendrait pas. Il était parti pour réfléchir. Jamais j’aurais fait ça. Jamais Roméo n’avait fait ça au pire des cas il partait faire une balade à cheval mais il ne changeait pas de royaume avec une devinette à la con qui pouvait indiquer deux endroits en même-temps. Il se rappelait que j’avais choisi la violence à l’amour. Il se rappelait que je l’avais laissé seule fait face au décès de notre fils et celui de ma sœur. Déjà sans sa mémoire, il savait me faire remarquer que mon crime était impardonnable, mais le simple fait qu’il doive réfléchir après avoir retrouvé son cœur et ses souvenirs, me montrait que s’était à cause de ce fameux crime. Elle ne pouvait pas comprendre et j’en avais que cure qu’elle comprenne. Plus les secondes passaient et mon esprit et mon cœur se muraient d’une armure puissante inébranlable. C’était le seul moyen pour que je puisse tenir face à la mort de Robin et de départ de Romain.

« Ça sert que j’ai envie de savoir ! Dix de mes soldats ont disparu ce jour-là et vous avez retiré son libre arbitre à mon mari. Je suis en droit de savoir ce que vous avez fait ! J’en ai que cure de savoir que ça va faire vingt-neuf ans que c’est arrivé. Je veux savoir. »

Déclarais-je en lui lançant un regard noir. Comment osait-elle encore me contredire ? Se rendait-elle compte que c’était déjà un miracle qu’elle soit pas foudroyer. J’en avait tué pour moins que cela. Dépourvu de toutes émotions, je la regardais sans sourciller, elle me demandait d’être conciliante en gardant à l’esprit qu’elle était une personne différente d’aujourd’hui et je restais de marbre. Elle n’était pas fatiguée de répéter ça en boucle ? Je ne la voyais pas se protéger, j’étais encore bien trop occupé à me contrôler moi-même pour ne pas exploser. Les mots de mon mari tournaient et retournait en boucle dans ma tête.

« Pour votre bon plaisir ? »

Des images me venaient à l’esprit, des images sordides où le bon plaisir de la méchante reine était du sexe. Un haut le cœur me saisissant, je laissais échapper un léger rire :

« Et je suppose que vous auriez tué la personne à l’origine de votre malheur … »

Mon ton n’était même pas sarcastique, c’était un constat rien d’autre.

« Et ses hommes à Romain, quand je vais retourner à Wonderland leur femme, ou dans le meilleur de cas leurs amis me demanderont si je les ai retrouvés. Je dois savoir ce qu’ils leur aient arrivés. »

J’étais pragmatique. Dès que j’avais eu le malheur de remettre un pied dans mon royaume le lendemain on venait me demander si j’avais pu retrouver les disparus. Tout le monde savait qu’ils n’auraient jamais laisser le roi seul.

☾ anesidora

Regina avait avoué, à mi-mots, ce qu’elle avait fait subir au mari de Juliette. Au départ, elle ne le voulait pas, mais la meilleure amie de Robin avait insisté, arguant qu’elle le lui devait, et qu’elle voulait savoir. L’ancienne méchante reine ne voyait pas l’intérêt d’autant vouloir se flageller avec des méfaits passés, mais après tout, si elle le voulait… Voilà, c’était dit. Non pas que Regina en soit fière, loin de là, surtout maintenant, mais au moins, elle avait dit la vérité. Juliette était telle une statue de marbre, c’était presque inquiétant. La maire de Storybrooke la regardait fixement, l’air un peu penaud.

- Je suis désolée, souffla-t-elle encore une fois alors que Juliette répétait certains de ses mots.

La belle brune déglutit en baissant momentanément le regard sur ses chaussures. C’était vrai, à une certaine époque, elle aurait tué la personne à l’origine de son malheur. N’avait-elle pas essayé de tuer sa propre mère ?

- J’en conviens, l’ancienne moi l’aurait fait. Pas la nouvelle, répondit-elle d’un ton neutre.

A présent, elle demandait des nouvelles des hommes d Roméo, ceux qui avaient accompagné leur roi sur les terres de la méchantes reine, dans le royaume de la Forêt Enchantée. Une dizaine d’hommes. Regina essayait de se souvenir de ce qu’elle avait bien pu leur faire. Elle se rappelait avoir fait exécuter son bras droit, mais les autres…

- Je vous dois la vérité, et la vérité, c’est que je ne sais plus ce qui s’est passé avec ces hommes venus du Pays des Merveilles. Je crois avoir fait exécuter l’un d’entre eux, un général. Les autres ont été mis aux fers, je ne sais pas ce qui est advenu d’eux. J’étais trop occupée pour aller voir ce qui se passait dans les cachots.

Soit ils avaient été pris par la malédiction, ce qui était tout à fait envisageable en étant enfermés dans le Palais Sombre, soit ils s’étaient enfuis avant que la malédiction ne soit lancée, et si par chance ils avaient pu atteindre un autre royaume, alors la fumée du sort noir les aurait épargnés.

- Il se peut qu’ils soient ici, s’ils étaient toujours enchaînés au moment de la malédiction. Sinon, ils sont toujours dans le monde des contes. Peut-être ont-ils regagné leur contrée. Je ne saurai vous le dire, Juliette.

Regina prenait la pleine mesure de son égoïsme passé et se demandait de plus en plus comment Robin avait pu tirer un trait sur tout ça. Sans doute ne savait-il pas tout.

- Si je puis me permettre, Juliette, respectez la volonté de votre mari. Attendez quelques jours, puis allez le retrouver au Pays des Merveilles. Arrangez les choses entre vous, vous vous aimez, cela se sent. Faites table rase du passé et vivez votre amour, soyez heureux, puisque vous pouvez l’être.

Elle se mordit la lèvre. Elle-même ne pourrait plus prétendre au même bonheur. Les choses étaient différentes. Elle, elle aurait ses enfants.

- Avez-vous d’autres questions ? Sans quoi je… je vais prendre congé.

☾ anesidora