Clochette était heureuse, elle se sentait enfin à sa place. Cela faisait quelques semaines maintenant qu’elle était revenue à Storybrooke. Pour le moment, elle ne regrettait absolument pas son choix de revenir et surtout pas tout ce qu’elle avait commencé à construire ici.

Sa petite maison était rénovée comme elle le souhaitait. Elle y avait même ouvert sa petite entreprise qui commençait à se faire connaitre et qui avait l’air de donner du bonheur aux habitants faisant appel à elle.
Regina lui avait pardonné ses écarts, elle avait aussi repris les réunions chez les AA et avait également retrouvé un parrain. Certes, cela devait paraitre étrange à qui connaissait les deux individus, mais la blondinette était persuadée qu’elle pourrait faire du bon boulot avec Hadès.

Seule ombre au tableau, Zelena… Clochette avait évité la méchante sorcière de l’Ouest jusque-là et pourtant, elle savait pertinemment que cette dernière voudrait un moment ou à un autre avoir une discussion avec la jeune fée.
Les sujets ? Multiples et complexes : leur colère respective par rapport à Regina, le passé commun concernant la prise de pouvoir du juge Frollo, mais aussi et surtout pour un passé encore plus ancien que la Fée Verte voulait oublier plus que tout.

Machinalement, elle se dirigea vers sa bibliothèque et alla prendre son petit carnet de son époque d’exil au Pays Imaginaire. Elle le regarda avec beaucoup de mélancolie et de tristesse. Elle se mit à le feuilleter, tomba rapidement sur le chapitre concernant sa formation de fée.
Elle en commença la lecture et tomba sur une des premières leçons de la Fée Bleue qu’elle avait reçue. Leçon qu’elle n’avait jamais oubliée mais qu’elle s’efforçait de ne pas suivre aussi souvent qu’elle le pouvait tellement elle la trouvait injuste.

A l’époque, Clochette était une toute jeune fée, naïve et pleine d’insouciance. Elle devait suivre partout sa professeure où qu’elle s’envolait. Elle avait vu une jeune paysanne poser un panier qui semblait plein au pied d’un arbre.
Avec sa curiosité viscérale, la Fée Verte avait demandé à la Fée Bleue si elles pouvaient observer cette jeune femme qui avait l’air triste et désespéré. La plus âgée des deux fées avait accepté et elles s’étaient installées sur un arbre pour voir toute la scène qui se déroulait sous leurs yeux.

La suite, Clochette ne voulait pas le revivre. Elle faisait encore très souvent ce cauchemar, pourquoi n’avait-elle pas fait plus ? pourquoi sa professeure tenait absolument à ne rien faire pour aider et la jeune femme et son bébé qu’elle abandonnait ? Ce fut à cet instant précis que quelqu’un tapa à la porte d’entrée de la petite demeure.

« Zelena… Je m’attendais à ce que tu viennes me voir, je me demandais juste quand cela arriverait. Entre, je te prie, je crois que nous avons beaucoup de choses à nous dire. » dit-elle quand elle reconnut son invitée surprise sur le pas de sa porte.

Zelena entra dans la maisonnette à la suite de l’invitation de la maîtresse des lieux. Elle confirma en même temps les craintes de la jeune fée. Oui, elle était venue pour lui parler, oui elle comptait bien partir avec des réponses à ses nombreuses questions et non elle n’accepterait pas de dérobade de sa part.

La méchante sorcière de l’Ouest regarda tout autour d’elle. Clochette avait l’impression qu’elle prenait son temps avant de commencer à poser des questions comme si elle se demandait par laquelle commencer, laquelle devait être la plus importante pour elle, quelles était les explications qu’elle attendait le plus depuis tout ce temps.

La Fée Verte écouta son invitée avec attention, elle se sentait coupable depuis tellement longtemps que cette discussion tant redoutée pouvait également se transformer en remède pour elle aussi.

« Oui, Zelena, je crois savoir pourquoi tu es chez moi aujourd’hui. Assieds-toi sur le canapé, je vais chercher de quoi faire du thé, nous risquons d’en avoir pour un petit moment. » lui dit-elle tout en lui indiquant son salon.

En se dirigeant vers sa cuisine, Clochette effaça une petite larme qui pointait au coin de son œil, le stress et la situation non désirée, c’était un peu trop d’émotions pour la jeune fée qui restait encore fragile sur de nombreux points.
« Un verre de rhum, je voudrais tellement un verre de rhum, ça me permettrait tellement d’être plus détendue, oui juste un verre… » Elle se ressaisit et retourna auprès de la rousse incendiaire avec sa bouilloire, des sachets de thé avec des parfums variés et deux tasses avec des jolis motifs floraux dessus.

« Demande moi ce que tu veux, je n’éluderai aucune de tes questions. Tu as souffert dans ton enfance et personne n’a jamais voulu te dire pourquoi ta mère t’avait abandonné comme ça au pied d’un arbre dans un simple panier ni pourquoi ce sont ces gens qui ont été choisi pour te recueillir quand tu étais bébé. »

Autant être sincère avec elle, Zelena avait beaucoup souffert de la situation, des choix de personnes qui étaient censées prendre soin d’elle et qui ne l’avaient pas fait. Clochette était présente dans beaucoup de ces moments compliqués, comme simple spectatrice.
Elle se l’était reprochée très longtemps et se le reprochait toujours. Elle n’avait rien fait et en cela elle pouvait aussi être considérée comme coupable des malheurs de la sorcière, de la grande sœur de son amie.

Elle servit de l’eau chaude dans les deux tasses et se choisit un sachet de thé noir à la vanille. Elle commença à touiller doucement avec sa petite cuillère prête à recevoir la salve de questions qu’allait sans aucun doute lui poser Zelena.

L’invitée surprise du jour se mit donc à poser toutes les questions qui devaient lui passer par la tête. La plus importante était « pourquoi ? », Clochette regarda avec tristesse son interlocutrice, cette dernière, à la fin de sa diatribe, se mit à pleurer.
La Fée Verte s’en voulait de voir dans quel état toutes ces mauvaises décisions avaient mis Zelena. L’histoire aurait certainement pu être différente si Cora n’avait pas abandonné sa première fille. Mais le mal était fait depuis très longtemps, à Clochette d’essayer de réparer ce qu’elle pouvait.

« Laisse-moi tout reprendre depuis le début si tu le veux bien. » Clochette prit le temps de prendre une gorgée dans sa tasse de thé et de rassembler en même temps tous ses souvenirs.

« A l’époque, je venais de débuter ma formation de fée. Je suivais à peu près partout ma professeure, la Fée Bleue. J’étais très naïve et je ne comprenais pas forcément toutes les décisions que les personnes autour de moi prenaient.
Un jour, alors que nous volions dans la Forêt Enchantée, j’ai aperçu ta mère, Cora, avec un panier à la main dans lequel tu te trouvais. J’ai demandé à la Fée Bleue si nous pouvions nous arrêter et voir ce que cette jeune paysanne faisait. »

La blondinette fit une nouvelle pause, elle essayait de réfléchir à la meilleure façon de raconter l’histoire en étant factuelle et sans prendre de parti.

« Une fois que j’ai compris que ta mère t’abandonnait, j’ai regardé avec stupeur ma professeure. Je lui ai demandé pourquoi elle avait fait cela, laisser ainsi son enfant sans défense face à la nature et aux risques que pouvait comporter la forêt. Elle a commencé à me raconter l’histoire de Cora.

Elle était fille de meunier et une voyante un jour lui a prédit un destin de reine. Elle a cru y parvenir avec ton père qui lui avait fait croire qu’il était le prince du château voisin. Il s’est révélé n’être que son jardinier mais le mal était fait. Ta mère était enceinte de toi.

Tu représentais pour elle un obstacle à ce destin royal, elle avait tellement horreur de son statut de fille de paysan, du mépris des gens envers elle. Elle avait une telle soif de pouvoir qu’elle ne voulait pas avoir un bébé à s’occuper. C’est ce que la Fée Bleue finit par me dire. »

La Fée Verte fit une pause afin de laisser le temps à son interlocutrice de digérer les premières informations qu’elle venait de lui donner. Elle en profita pour prendre à nouveau une gorgée de thé.

« Une fois ta mère partie, j’ai demandé à ma professeure ce que nous allons faire pour toi, pour ce petit bébé sans défense que sa mère laissait sans se retourner et sans remords. La réponse ne m’a pas plus et je ne la comprends toujours pas aujourd’hui.

Elle voulait qu’on te laisse là où tu étais car, d’après elle, ce n’est pas le rôle d’une fée d’élever un enfant, surtout celui d’une sorcière en puissance. C’est plus tard, en cherchant des informations sur ta mère que j’ai découvert qu’elle était déjà à l’époque l’élève du Ténébreux. »

Clochette frissonna rien qu’à l’évocation de cet horrible personnage. Elle avait eu affaire à lui plus d’une fois et ne s’en était jamais remise tellement il l’avait effrayé.

« Pour ce qui est de ta famille adoptive, de mémoire, je crois que ta mère avait prié l’étoile du soir de lui donner un enfant car elle et son mari n’y parvenaient pas. La Fée Bleue lui permit de te trouver. Je ne pense pas qu’elle se doutait du côté violent de ton père adoptif. Enfin, je l’espère… »

La jeune femme arrêta son récit et regarda son invitée pour essayer de lire un peu sa réaction sur son visage. Elle avait du mal à déchiffrer les émotions de Zelena tellement elle passait de la tristesse à la colère à la tristesse à nouveau. Ça devait être le bazar dans la tête de la méchante sorcière de l’Ouest. Il n’y avait aucun doute possible là-dessus.

Des larmes coulaient sur les joues de la jeune femme sans qu’elle chercha à les dissimuler ou les retenir. Cette partie de son passé n’était pas celle dont elle gardait les meilleurs souvenirs. Au contraire, cela l’avait profondément changé. A partir de ce moment-là, elle décida de faire en fonction de ce que lui dictait son cœur et plus du tout en fonction des ordres de la Fée Bleue.
Clochette avait l’impression que Zelena mêlait un peu tout ce qu’elle lui racontait afin d’entretenir sa colère contre la fée et contre beaucoup d’autres personnes. La méchante sorcière de l’Ouest se remit à crier sur son hôte, la tenant encore et toujours pour responsable de son enfance malheureuse.

« Même si la Fée Bleue m’a dit qu’on ne devait pas t’élever car ce n’était pas notre rôle, elle a veillé à ce que tu ne restes pas seule trop longtemps dans cette forêt. Je suis restée à te surveiller jusqu’à ce que ta mère adoptive te trouve. Il ne s’est même pas écoulé plus d’une demie journée entre l’abandon de ta mère biologique et l’arrivée de ta nouvelle mère.
Comprends moi Zelena ! J’étais une toute jeune fée, je commençais à peine ma formation, je croyais tout ce que me disait la Fée Bleue et jusqu’à ce jour-là, je n’avais jamais pensé me rebeller contre elle ! »

Clochette se leva du canapé et commença à faire les cent pas dans son salon. Elle luttait contre plusieurs envies, contre plusieurs démons. Le plus gros, elle voulait un verre de rhum là, maintenant, tout de suite. Elle prit son téléphone et voulut appeler son parrain.
Elle arrêta son geste en se souvenant qu’Hadès était le fiancé de la rousse incendiaire présente chez elle. La blondinette se demanda s’il était au courant de sa présence ici et si Zelena était au courant du lien qui les unissait.

« Tu ne risquais rien du tout ! On avait mis en place une barrière magique qui te protégeait de tout être qui serait venu pour te faire du mal. Même si on ne pouvait pas s’occuper du toi et de t’élever nous, on avait fait attention à ta sécurité ! Nous ne sommes pas des monstres que tu penses !
Que tu sois en colère, je le comprends et je le conçois très bien. Mais tu te trompes de coupable. Ce n’est pas moi qui t’ai abandonné dans un panier, ce n’est pas moi qui t’ai battu car j’avais peur de tes pouvoirs parce que je ne les comprenais pas.
La seule chose dont tu peux m’accuser, c’est de ne pas avoir pris de tes nouvelles après ton arrivée dans ta famille adoptive. Si j’avais su ce qu’il se passait, j’aurai tout fait pour te sortir de là ! Tu peux me croire Zelena ! J’aurai tout fait… »

Les sanglots brisèrent la voix de la jeune femme. Revivre tout ce moment et ces mauvaises décisions était très difficile pour la Fée Verte. Elle sentait que Zelena n’était pas encore prête à lui pardonner toute cette histoire et elle sentait que sans ce pardon, elle ne continuera pas à guérir.
Clochette lui avait promis de répondre à toutes ses questions. Et jusqu’à présent, elle s’y tenait. Quoi que cela pouvait lui coûtait, elle répondait aussi sincèrement que possible à toutes les interrogations de la rouquine.

Cette dernière se mit à parler de Rumplestiltskin et ne comprenait pas le lien entre sa mère, le Ténébreux et elle. Clochette ne savait pas si elle connaissait réellement la bonne explication à donner.

« Je pense que pour ma professeure, ce lien entre ta mère et le Ténébreux signifiait qu’elle avait peut-être pratiqué de la magie noire sur toi. Elle avait sûrement senti aussi que tu avais des pouvoirs et devait s’inquiéter de la noirceur de ton cœur si les pratiques de ta mère s’étaient révélées exactes. »

La Fée Verte se concentra énormément pendant qu’elle donnait cette réponse. C’était vraiment un point qu’elle n’avait jamais réussi à éclaircir avec la Fée Bleue et qui lui posait toujours question aujourd’hui.
Zelena repartit de plus belle en désignant cette fois comme coupable la Fée Bleue et se demanda si Clochette était une victime elle-aussi. Elle finit par demander à son hôte ce qu’elle aurait fait si elle avait été toute seule ce jour-là.

« Non, je ne suis pas une victime comme toi Zelena. J’ai été un témoin passif dans cette histoire, je le regrette tous les jours depuis. La Fée Bleue n’est pas la seule coupable. Arrête de croire qu’il n’y en a qu’un. Ce qu’il t’est arrivé est malheureusement l’addition des mauvais choix de plein de personnes.
Tu veux savoir ce que j’aurais fait si j’avais été toute seule ? Je ne sais rien car c’est facile de parler après. J’espère juste ne jamais avoir à revivre cette situation… »

Clochette se rassit sur le canapé et se resservit de l’eau chaude dans sa tasse afin de se faire un nouveau thé. A défaut de boire de l’alcool, elle se contenta du thé noir.

Les larmes roulaient à torrent sur les joues de la jeune fée. Elle commençait à ressentir un certain soulagement après toutes les révélations qu’elle venait de faire à Zelena. Sa culpabilité s’en allait un petit peu plus à chaque minute qui passait, son chagrin était sincère et le venin qui la rongeait depuis tellement d’années partait avec ce flot salé.

Elle écouta encore la Méchante Sorcière de l’Ouest la traiter de coupable au même titre que les autres. Ce fut un coup de couteau de plus reçu dans le cœur déjà bien meurtri de la jeune femme. Mais elle ne répondit pas à cette attaque directe.
Peut-être qu’au fond d’elle, Clochette se sentait plus coupable qu’elle ne l’avait imaginé jusque-là. Cette discussion venait peut-être de lui ouvrir les yeux sur ce sentiment peu agréable, voire pas du tout agréable.

La rouquine revint sur le fait que la Fée Verte avait continué à vivre comme si de rien n’était et sans prendre à un seul moment de ses nouvelles surtout pendant toute sa période très compliquée dans sa famille d’accueil, notamment après le décès de sa mère adoptive.
Si elle avait pris le temps d’aller voir comment la petite fille grandissait, elle aurait découvert l’horreur qu’elle subissait. Les coups toujours plus importants de la part de son père adoptif au fur et à mesure que ses pouvoirs grandissaient.

« Oui, j’ai continué à vivre sans prendre de tes nouvelles, enfin presque. J’ai demandé plusieurs fois pendant les semaines qui ont suivi à la Fée Bleue ce que tu étais devenue. Elle n’a pas arrêté de me dire que cela ne me regardait plus, que je devais me concentrer davantage sur mes leçons, qu’elle avait fait ce qu’il fallait pour que tu vives. Je l’ai cru, avec le temps, je m’aperçois que je n’aurai pas dû… »

Zelena n’en revenait pas des révélations concernant Rumple, elle pensait qu’il avait un minimum de considération pour elle. Elle avait l’impression qu’elle s’était trompée une fois de plus sur la nature des gens. Elle trouva à nouveau son coupable idéal : sa sœur Regina.

« Rumple n’avait de la considération que pour lui et pour personne d’autres. Il cherchait uniquement quelqu’un d’assez désespéré avec quelque chose à perdre pour lui faire lancer sa satanée malédiction.
Tout ce qui l’intéressait, c’était de trouver un moyen de venir dans ce monde. Pourquoi ? Aucune idée. Ta sœur n’est pas coupable, elle a été victime elle-aussi de ses manigances et de ses manipulations. »

La rousse incendiaire finit par se lever et remercier Clochette de sa sincérité envers elle. Elle ne souhaitait pas la déranger plus longtemps. La jeune femme ne pensait pas que l’entretien allait se terminer de cette façon. Elle se leva également et attrapa la main de son invitée surprise.

« Attends Zelena, ne t’en vas pas comme ça s’il te plait. Je voudrais que tu me racontes ton histoire, je voudrais savoir comment tu as réussi à t’en sortir malgré tout, comment tu as atterri ici, si le cœur t’en dit. Mais si tu ne le souhaites pas, je ne te retiens pas.
Sache que malgré tout ce que tu peux penser de moi, la porte de ma maison te sera toujours ouverte. Si je peux t’aider pour quoi que ce soit, n’hésite pas. » finit-elle par lui dire en esquissant un timide sourire.