La fête battait son plein, nous avions fait une bonne prise et nous voulions fêter ça comme il se le devait. Etant perdus au milieu des océans, nous faisions la fête à bord du Revenge. Il y avait assez de rhum pour satisfaire tout le monde, il y avait des musiciens à bord qui nous jouaient des airs joyeux et qui donnait envie de danser. Nous tournions ensemble, sautions en rythme, rions à en avoir mal aux joues. Les cœurs étaient à la fêter, nous avions besoin de nous faire plaisir, de nous amuser de temps en temps. Il ne fallait tout de même pas tomber dans l’excès, au milieu des mers un faux pas pouvait être dangereux, nous pouvions être à notre tour victime d’un abordage d’un confrère… Cependant, la modération n’était pas quelque chose que les pirates connaissaient, nous étions des passionnés, nous faisions tout avec notre cœur et nous ne faisions jamais rien à moitié. Alors nous faisions la fête sans nous préoccuper des conséquences de nos actes, il fallait espérer que nous n’allions pas nous attirer d’ennuis.
Je devais l’avouer, je n’avais pas fait exception à la règle, j’avais bu. Trop bu peut-être. J’avais mes raisons. Mon cœur était à la fois à la fête et attristé. J’avais eu besoin de rhum pour effacer la peine qui avait envahie mon esprit. Le lendemain, c’était l’anniversaire de William, il aurait eu une quinzaine d’année, il aurait été un jeune homme… Mais je le voyais encore comme un petit garçon de deux ans. C’était à cet âge qu’il m’avait quittée. J’avais besoin, de boire un peu, juste un peu pour tout oublier, au moins ce soir. Malheureusement, le un peu était devenu beaucoup. Je m’étais même retrouvée à danser sur la table du repas avec mes hommes, sautillant comme un biche avec légèreté et adresse malgré les quelques verres de trop…
Bien évidemment, je payais ces verres de trop le lendemain… Mais au moins, je ne pensais pas trop à William, mon esprit était occupé par mon mal de crâne. J’étais allongée dans ma cabine, sur mon lit. Il était étonnant que je sois parvenue à regagner ma chambre sans encombre, à mois que ça soit quelqu’un qui m’est ramenée à bon port. Pour une fois, j’avais envie de rester à l’intérieur, je n’avais aucune envie de rester dans mon lit… Je ne voulais pas affronter le monde extérieur aujourd’hui. Mon mal de tête me coinçait ici, mes peines me retenaient dans ma bulle, dans mon intérieur au je me sentais en sécurité. Non, ce n’était pas le jour pour sortir… Sauf que j’étais capitaine, il fallait que j’assume mon rôle… Je sortis doucement de ma couche pour aller m’asseoir à mon bureau. Sur la table, il y avait mon coffre. Je l’ouvris pour en sortir la couverture de William. Il me manquait terriblement… Être face aux objets de son enfance allait jusqu’à effacer ma migraine, je ne pensais plus qu’au vide qu’il avait laissé.
L’heure n’était plus à la danse et au rire. Toute seule dans ma cabine, face aux objets de mon passé, mon cœur était comme éteint… Comment faire à mes hommes alors que je n’avais envie de naviguer, pas envie de les diriger, pourtant il fallait donner un cap, une route à suivre… j’entrepris donc de me changer, des m’habiller afin d’avoir l’air physiquement présentable… Il fallait au moins ça pour aujourd’hui. Craignant la lumière du soleil, je pris mon plus grand chapeau pour essayer de préserver la sensibilité des mes yeux, tout en sachant que si mes yeux étaient larmoyant, je pourrais le justifier grâce à la soirée de la veille et aux rayons du Soleil.
Essayant d’afficher un air sûr de moi, je croisais la jeune Lucy. Nouvelle petite recrue que j’avais un peu sauvée, dirons-nous. Elle était arrivée il y a quelques semaine.
- Bonjour Lucy, comment vas-tu ? J’espère que la soirée d’hier ne t’a pas effrayée et que tu as pu t’amuser un peu malgré la rudesse de certains hommes. Ils ne sont pas méchants, ils ne te feront rien.
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Dernière édition par Anne Bonny le Sam 16 Déc - 22:24, édité 1 fois
Remember love, remember hate, remember everything they said just to break you again.Le lendemain de soirée avait été quelque peu agité, les marins n’assumaient qu’à moitié leur écart de conduite et le trop plein de rhum qu’ils avaient ingurgité. Ce qui me faisait sourire, malgré la rudesse de ses derniers et leur langage cru, ils étaient ceux qu’ils m’avaient sauvé et qui m’avaient conduite loin de mon sanguinaire mari qui hantait toujours mes nuits. Toutes mes nuits sauf celle que je venais de passer, j’avais ri en voyant la capitaine de ce bateau se déchainer, cela faisait tellement longtemps que je ne m’étais pas laissé aller au rire. Contrairement au reste de l’équipe j’étais restée à l’écart, je n’avais pas osé trop me mêler à la fête certainement, parce que la peur ne m’avait jamais quitté depuis que j’étais arrivée dans ce bâtiment. Mourir deux fois en moins d’un trimestre voilà bien une chose qui m’avait refroidi. J’avais du mal à contrôler ses deux capacités magiques qui m’animait désormais, parler aux morts, voir le passé des gens en un simple touché. Désormais, je portais des gants en cuir, mais le mal était déjà fait je connaissais les secrets de la plupart de l’équipage ce qui me mettait franchement mal à l’aise.
Mes mains posées sur le mat du bateau, je fermais les yeux, laissant l’air marin me réconforter, avant de sursauter en entendant la voix de la capitaine derrière moi. Me retournant avec un sourire aimable, je la saluais en effectuant une brève révérence de la tête :
« Bonjour capitaine, ça va bien merci et vous ? Non, ne vous en faites pas, il en faut davantage pour m’impressionner, ils ne peuvent pas être pire que les autres hommes que j’ai connus … »
Automatiquement, mes pensées dérivèrent vers le magnifique et sanguinaire Dracula avant de passer vers ce mari répugnant et tout aussi sanguinaire qu’il m’avait été obligé d’épouser. Un frisson traversant mon corps je sentais mes bras se refermer sur mon buste avant de serrer mes lèvres l’une contre l’autre pour ajouter :
« Je suis navrée, je ne suis pas très joyeuse depuis que vous m’avez recueilli mais je vous jure que je vous suis entièrement redevable. »
En prononçant ses mots je revoyais le passé que j'avais entrevu dans l'esprit d'Anne le jour où elle m'avait touché. Toutes cette souffrance, toute cette colère, j'avais de la peine pour elle, je voulais l'aider, mais j'ignorais encore comment m'y prendre pour lui parler de mes facultés magiques. J'avais sans doute peur qu'elle me rejette, pourtant je savais qu'elle était doté du gène du loup-garou, elle connaissait la magie elle aussi. 2981 12289 0
Le Soleil commençait tout juste à se lever, me faisant sortir de mon lourd sommeil… J’avais sans doute exagérer hier… J’avais dû boire un, ou deux, ou trois verres de trop… Ou plus encore. Mais ça m’avait permis d’oublier un instant l’absence de mon fils. Aujourd’hui, c’était son anniversaire. Cette date me faisait toujours beaucoup de peine, elle me rappelait que je n’avais pas vu mon fils grandir, je n’avais pas pu le voire changer pour devenir un jeune homme. A mes yeux, il était toujours un petit garçon de deux ans, il n’avait jamais grandi. Dans mon esprit, il était tel qu’il était le jour où on me l’avait enlevé. Malheureusement, je ne pouvais pas rester cachée dans ma cabine à broyer du noir. Il fallait sortir pour veiller sur mes hommes et sur le cap à suivre. Peut-être que j’allais devoir diriger un abordage alors que mon cœur et mon esprit n’étaient pas du tout disposer à s’occuper de ces choses là. Mon cœur pleurait, mon esprit était ailleurs. Aujourd’hui, je n’avais aucune envie d’être une capitaine pirate. Je voulais avoir du temps pour moi, pour pleurer un instant, pour être de nouveau la mère que j’avais été et que j’étais toujours. Nous disions d’une femme qui avait perdu son époux qu’elle était une veuve, mais il n’y avait pas de mot pour définir une mère qui avait perdu son ou ses enfants. Nous restions mère malgré tout, nous pensions toujours à nos enfants, même quand ils n’étaient pas avec nous.
Si j’avais envie de rester loin du monde et loin de tout, je ne pouvais pas. Alors je me levais machinalement pour m’habiller, prenant de soin de glisser un petit paquet dans la poche de mon long manteau noir. Il faisait encore frais le matin, je ne voulais pas attraper froid en plus de mon chagrin à surmonter. A chaque jour suffisait sa peine, la peine de cette journée était déjà suffisante sans avoir à rajouter une maladie. Je pris tout de même soin de cacher un minimum mon visage des rayons du soleil et de mon équipage. Je ne voulais pas qu’il me voie en position de faiblesse, même si nous avions tous un peu éméchés, ça n’aurait pas été surprenant de me voir avec la gueule de bois. Mais tout de même, j’étais leur capitaine, il fallait que je tienne mon rôle comme il se le devait. Je n’avais pas le droit à des moments de faiblesse.
Je sortis de ma cabine une fois correctement habillée. En passant, je saluais les matelots qui se trouvaient sur mon chemin. Je tombais d’ailleurs sur Lucy, une demoiselle que j’avais sauvée que j’avais embarquée sur mon navire avec son autorisation. Je lui avais demandé son avis avant de l’emmener. Je lui avais proposé de la débarquer dans un grand port, mis elle avait refusé. Avec l’accord de tous les autres membre du Revenge, nous l’avions prise sous notre aile et doucement, elle s’adaptait à la vie à bord. Comme les autres, je la saluai, tout en lui demandant comment elle allait. Je voulais également la rassurer sur le fait qu’elle était en sécurité, et que mes hommes ne lui feraient rien. Ils étaient un peu rudes, mais ils obéissaient à mes ordres. Ils avaient interdiction de toucher à Lucy, alors il ne lui ferait rien.
- Je vais bien… Les conséquences de notre fête de la veille devraient rapidement s’estomper. Quand c’est une femme qui commande, les hommes sont de véritables agneaux, tu ne crains rien ici. Je lui fis clin d’œil. Je suis désolée pour ce qui a pu t’arriver… ça n’a pas dû être simple.
Nous avions tous un passé qui était plus ou moins lourd. Lucy avait l’air d’avoir vécu mille et une aventures peux amusantes. J’espérais qu’ici, elle pourrait se relever et aller de l’avant, qu’elle parviendrait à se reconstruire et à trouver sa place. Comme je l’avais fait. J’étais une pirate maintenant, et je me sentais bien, malgré quelques moments de détresses que je pouvais traverser. Je n’avais pas encore dit à Lucy que j’avais une petite idée sur le secret qu’elle gardait si bien… Elle sentait la magie à plein nez. Je savais qu’elle avait quelque chose de magique, mais je ne savais pas ce qu’elle était. Ça faisait quelques semaines qu’elle était ici, elle devait me dire qui elle était, pour savoir si elle pouvait être un danger pour nous. Comme je pouvais l’être parfois. Elle s’excusa pour son manque de joie, rajoutant qu’elle m’était redevable. Je lui fis un petit sourire.
- Ne t’excuse pas… Ce n’est rien, je comprends. Prends le temps qu’il te faut pour t’habituer aux lieux et à ce style de vie. Tu veux bien venir avec moi ?
Sans attendre sa réponse, je partis vers la poupe du navire. Elle suivrait sans doute, si ce n’était pas le cas, j’irais la chercher ensuite. Sans rien dire, je sortis le petit paquet que j’avais mis dans ma moche en sortant pour le lancer le plus loin possible dans l’océan. Joyeux anniversaire mon chéri. Je t’aime. Pensai-je. Chaque année, je lui faisais un cadeau à ma manière. Je lui envoyais un petit présent grâce aux océans. C’était sur les mers que nous avions été séparés, c’était à la mer que demandais de lui offrir ses cadeaux. Cette année, je lui avais offert une petite figurine de dauphin en bois. Il aimait beaucoup les ces animaux, et c’était la dernière chose joyeuse qu’il avait vu avant que notre enfer ne commence.
Les humains étaient assez imperméables à certaines choses, les animaux sentaient des présences invisibles aux communs des mortels. Et chaque année, j’avais l’impression que mon fils était avec moi l’espace d’un instant, comme pour me dire merci… Ou quelque chose comme ça. Cette présence avait quelque chose de réconfortant et de douloureux à la fois. Prenant sur moi, je me tournais vers Lucy avec un léger sourire.
- On a tous nos secrets… Mais sur un navire… Certains secrets doivent se savoir pour que nous soyons tous en sécurité. En t’engageant avec nous, je t’ai prévenu que j’étais une lycanthrope pour te dire qu’il y avait des fois où tu pourrais être en danger à cause de moi, qu’il fallait te cacher avec les autres. Être louve implique autre chose que le fait de me transformer en animal, je sens des choses que les humains ne sentent pas… La magie a une odeur, et tu portes cette odeur. Je ne t’accuse pas… Je ne te juge pas. Je ne t’abandonnerai pas. J’ai juste besoin de savoir, si tes dons peuvent mettre l’équipage en danger… Si ce n’est pas le cas, tu n’es même pas obligée de me dire ce que tu es.
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Dernière édition par Anne Bonny le Dim 17 Déc - 22:23, édité 1 fois
Remember love, remember hate, remember everything they said just to break you again.Malgré la fatigue dans ses yeux Anne était magnifique. Je savais qu’aujourd’hui c’était le jour de l’anniversaire de son fils et mon cœur se serrait de tristesse à cette idée. Il était fort possible que comme chaque année elle avait le cadeau qu’elle lui aurait offert sur elle et elle le jetterait à la mer quand elle sera à l’abri des regards de son équipage. Son mensonge sonnait donc faux dans mon esprit mais je ne relevais pas, je n’avais pas à savoir cela. Je me devais de garder le silence. Je lui devais à elle. Souriant gentiment à sa remarque sur sa gueule de bois, je jetais un regard aux hommes qui trainaient les pieds, mais qui tenait leur poste avec fierté.
« Chacun à sa croix à porter »
Lâchais-je avec une voix basse, presque un murmure douloureux englobant ma peine, celle d’Anne mais également les membres de son équipage à croire que pour s’enrôler dans la piraterie fallait avoir perdu une part de soi. Je savais qu’un jour j’allais devoir parler de ce que j’avais vu à Anne, elle m’avait fait confiance avec son gène de la lycanthropie, mais je ne savais toujours pas comment entrer sur le sujet. C'était quand même terriblement délicat, j'avais pénétré dans son intimité et au vu de la fierté d'Anne je savais qu'elle n'apprécierait pas cela. Aussi je m'excuser pour mon manque de joie et elle balaya mes promesses rapidement comme si cela n'avait aucune importance avant de me demander de la suivre. Hochant la tête, je la suivais donc docilement, avant de la voir jeter le fameux cadeau à l'eau. Fermant les yeux un instant je souhaitais silencieusement un joyeux anniversaire à son fils. Anne finissait par d’arrêter non loin du gouvernail et je faisais de même, face aux premières phrases de la capitaine, je me sentais rougir un instant avant de détourner le regard. Ne dis jamais que tu es une sorcière Lucy, jamais tu m’entends.C’était le dernier conseil que ma mère m’avait donné. Cette femme qui était morte par ma faute. Peut-être aurait-elle fini pendue au bout d’une corde ou brûlée vive avec moi à ses côtés mais rien ne pouvait me confirmer cela. La culpabilité de sa mort ne m’avait jamais quitté. Revenant à l’instant présent je reportais mon attention sur les mots prononcés par Anne avant de poser mes mains sur les parois en fer du bateau, mes yeux posés sur mes gants de cuir. Sa question était légitime. Elle était la capitaine, elle était garante de la sécurité de ses hommes.
« Je l’ignore, pour l’instant ils ne sont pas offensifs, mais je ne sais pas comment ils évolueront »
Mon introduction était bancale, mais je ne savais pas comment répondre de manière plus explicite. Mettant la voix de m mère de côté, je relevais mes grands yeux bleus vers Anne avant de tout lui raconter. Je voulais qu’elle ait confiance en moi et je savais que pour cela je devais lui prouver que j’étais capable de lui parler à cœur ouvert :
« Je suis une sorcière de Salem. Ma mère était la chef du clan et au moment du procès des sorcières de Salem elle a quitté son clan pour me sauver. En tant que chef de clan elle était la femme la plus rechercher et si elle était attrapée elle aurait été pendu ou brulé et on m’aurait réservé le même sort. »
Marquant une pause je sentais la présence de ma mère m’envahir, je sentais ses mains se poser sur mes épaules avant d’entendre sa voix dans le creux de mon esprit. Tu peux y aller ma chérie, cette femme t’as sauvé la vie, tu peux lui faire confiance. Souriant tristement, je posais ma main sur mon épaule comme pour essayer de rendre la délicatesse à ma mère, mais naturellement je ne parvenais pas à la toucher.
« Mes pouvoirs ne sont pas offensif, mais d’après mes ancêtres et ma mère, je suis la sorcière aux sept vies. Je suis déjà morte deux fois. La première en Transylvanie, j’avais été vidé de mon sang par un homme qui m’avait abusé. A mon réveil dans mon cercueil, j’avais eu le don de communication avec les morts. Ma seconde mort a eu lieu un peu plus d’un mois après et c’est le jour où vous m’avez trouvé. Je ne savais pas nager, mais je savais quel sort mon mari réservait à ses épouses, je ne voulais pas être tuée et clouée aux murs de son établi pour plusieurs de mes vies. Je préférais encore mourir noyer et c’est ce qui s’est passée. Je suis morte et ma dépouille a dérivé jusqu’à la rive où vous m’avez trouvé. »
Marquant une pause, je prenais une grande inspiration avant de passer au vif du sujet, détournant mon regard de celui de la pirate je poursuivais :
« C’est grâce à vous que j’ai découvert ma nouvelle capacité magique. Je vois le passé des Hommes et des objets en les touchant. »
Nouvelle pause, c’était le moment où jamais :
« Quand vous m’avez touché, votre passé m’a submergé et je n’ai pas compris au départ. Mais l’opération s’est réitéré à plusieurs reprises et c’est pour cela que je vous ai demandé des gants en cuir en mettant en avant le fait que j’avais froid. »
Attendant sa réaction, je préférais lui laisser un peu de temps avant de lui parler de son fils, c’était peut-être beaucoup d’information d’un coup.
Nous avions tous vécu des choses plus ou moins graves, plus ou moins douloureux. Rares étaient ceux qui s’engageaient dans la piraterie sans raison. Certains avaient quelque chose contre la loi, certains avaient des choses à fuir ou à oublier, alors il se perdait dans le danger de la piraterie au risque de leur vie. Personnellement, j’en avais contre les lois officielles qui n’avaient rien fait pour m’aider quand j’en avais besoin. Par conséquent, j’avais choisi de faire justice moi-même. Si personne ne voulait mettre Flint derrière les barreaux, si personne ne voulait le faire pendre, j’avais décidé de le faire toute seule. Il était aujourd’hui mort, je l’avais tué, lui et tout son équipage. Jamais je ne regretterais cet acte, jamais je ne me repentirais pour ce que j’avais fait. Il avait mérité ce qu’il lui était arrivé. Je réservais le même sort à celui qui avait commandité l’enlèvement de mon petit garçon. Je trouverais de qui il s’agissait, je le retrouverais pour le tuer ensuite… Donc, oui, chacun avait sa croix à porter. De toute évidence, Lucy avait une croix lourde à porter sur ses épaules… J’espérais que le temps ferait son œuvre pour la soulager, pour atténuer ses peines et ses souffrances, comme il l’avait fait pour moi. Même les douleurs étaient atténuées, plus simples à affronter, le chagrin n’en était pas moins absent. Surtout en ce jour particulier. J’invitais le jeune matelot à me suivre alors que j’offrais à William son cadeau d’anniversaire comme je le faisais chaque année. Comme à chaque fois, j’avais l’impression de sentir sa présence à mes côtés, comme s’il venait me remercier. Avoir l’impression qu’il était près de moi m’arracha un sourire triste. Cependant, je ne pouvais me permettre de me laisser aller devant mon équipage, et il y avait de questions que je devais régler avec ma jeune recrue. Je savais qu’elle était un être magique, sans savoir ce qu’elle était précisément. Je devais savoir pour la sécurité de mes hommes. Retournant vers le gouvernail alors qu’elle était sur mes talons, je lui exposais mes interrogations sans ménagement, expliquant tout de même les raisons qui me poussaient à la question.
Je la sentis alors gênée, voire même coupable. Mais coupable de quoi ? De n’avoir rien dit ? Ce n’était pas un véritable problème, elle avait ses secrets et je comprenais. J’avais tout de même précisé que si ses pouvoirs n’impliquaient pas de danger pour mes hommes, elle pouvait rester silencieuse sur ce qu’elle était. Elle avait sa vie, et moi la mienne. J’avais mes secrets et elles les siens. Chaque homme avait également des choses qu’ils gardaient pour eux. Tant que ça ne mettait personne en danger, ils pouvaient rester discrets sur ce qui ne devait pas ce savoir. Le début des explications de Lucy me semblait tout de même flou. Elle ignorait quels étaient ses pouvoirs… Tout ce qu’elle savait c’était qu’ils n’étaient pas offensifs, mais peut-être qu’ils évolueraient… Sa réponse ne me rassurait pas beaucoup… elle devait m’end dire plus. Je la laissais trouver ses mots, ses explications sans la brusquer. Je l’écoutais avec attention. Elle expliqua alors qu’elle était une sorcière de Salem, sa mère était la chef du clan et s’était retiré pour sa vie, ainsi que celle de sa fille. Il y eut une petite pause avant qu’elle ne reprenne. Elle serait peut-être la sorcière aux sept vies, elle était morte deux fois, et je l’avais trouvé le jour de sa seconde mort… Sa première vit avait été affreuse, tout comme la deuxième. J’espérais que sa troisième vie parmi nous serait un peu plus agréable. Même si j’étais un peu choquée par ce qu’elle me disait, je restais impassible. Mon visage n’exprimait rien, il restait neutre. J’avais simplement l’air sérieuse et à l’écoute.
Encore une pause… Elle prit une grande inspiration avant de détourner son regard du mien. J’étais celle qui lui avait permis de découvrir son nouveau don. Elle pouvait voir le passé des personnes et des objets en les touchant. Ces quelques mots firent un rapide tour dans mon esprit. Je l’avais touchée, ma peau s’était retrouvée en contact avec la sienne. Elle expliqua alors que mon passé l’avait submergée sans qu’elle comprenne, c’était par la répétition de cette situation qu’elle avait fini par comprendre. Son don était la raison pour laquelle elle m’avait demandé des gants… Si les autres l’apprenaient, certains voudraient lui faire la peau. Certains avaient de très noirs secrets à cacher, ils ne voulaient que personne ne sache quoi que ce soit sur leur passé. Je le savais, parce que j’étais le capitaine et que je devais savoir quels dangers ils pouvaient présenter… Maintenant, je devais savoir ce que son don représentait pour moi. Pour mon passé. Pour la première vie que j’avais menée. Personne ne devait savoir. J’en avais parlé à des personnes en qui j’avais confiance, ou parce que les événements l’exigeaient… Mais ça devait rester un secret.
Je restais un long moment silencieuse avant de prendre la parole. Je devais mettre de l’ordre dans mes idées. Il fallait que je trouve quelque chose à dire.
- Tu ne dois rien dire aux autres à propos de tes capacités magiques. Pour certains, tu représenterais un danger pour eux, parce que tu pourrais les dénoncer sur leur passé… Beaucoup d’entres eux ont leur tête mise à prix pour autre chose que la piraterie, ils risquent pire que la mort. Alors ne leur dis rien… Sinon, ils te tueraient… Et même si tu pourrais sans doute revenir à la vie, je doute que ça soit agréable de mourir…
Voila un premier point d’aborder… Il y avait quelque chose à d’autres à dire. A propos de moi, d’Anna MacGregor et de sa famille. Cette vie lointaine que j’avais rejetée, cherchée à oublier me revenait en pleine figure… Il fallait pourtant que je lui expliquer quelques points à ce propos.
- Quant à mon passé… Il appartient bel et bien au passé. Qu’importe ce que tu as vu, qu’importe si tu as tout vu. Personne ne doit savoir… ça deviendrait une faiblesse, et un capitaine ne peut avoir des faiblesses qui peuvent être utilisées contre lui… ça me ferait perdre une certaine crédibilité, et je risquais d’être victime de mutinerie… Personne ne doit jamais rien savoir sur mon passé… Je suis pirate, c’est tout ce qui compte…
Mon passé avait fait de moi celle que j’étais aujourd’hui, mais personne ne devait rien savoir. Il fallait qu’elle tienne sa langue. Si mes hommes étaient capables de mettre fin à ses jours à cause des ses pouvoirs, j’étais capable de faire de même. Surtout que je savais que je devais la tuer plusieurs fois pour être persuadée qu’elle garderait tous mes secrets jusque dans sa tombe définitive.
- Ne parle jamais de William… A personne. Sans le vouloir, mon ton était menaçant…
Remember love, remember hate, remember everything they said just to break you again.Mes lèvres se dénouaient sur mes capacités magiques je me livrais sans faire l’impasse sur le moindre détail, la présence de ma mère avait disparu. Je me retrouvais seule devant la capitaine de ce bâtiment. Le regard de cette dernière était devenu dur, elle n’appréciait pas mes révélations, aussi je sentais mon estomac se tordre, je lui avais révéler l’existence de mes sept vies, si elle le souhaitait elle pouvait me tuer sept fois d’affilés, enfin cinq désormais. Mes pouvoirs pouvaient éventuellement me sauver, mais rien ne m’en assurer. Comme je l’avais dit aucune sorcière de Salem n’avait eu sept vies à vivre. Je n’avais aucune référence sur laquelle me baser. C’était sans doute le plus effrayant dans toute cette histoire, mais Anne sortie de son mutisme assourdissant et les premiers mots qu’elle prononça étaient évident. Je n’avais pas besoin de son conseil, les secrets que je connaissais sur l’équipage de ce bâtiment étaient passible de la peine de mort et ils en étaient tous capable, car ils avaient déjà donné la mort et pas qu’une fois. Malgré tout j’hochais la tête :
« Je sais, ce n’est pas pour rien que j’ai demandé cette paire de gant et oui mourir est un processus douloureux, presque autant que celui de revenir à la vie… »
Mon murmure, se confondait avec les clapotis du navire sur les vagues, je ne savais pas comment Anna MacGregor dite Anne Bonny allait réagir. Elle savait que je connaissais tout de son passé. Sa vie n’avait pas été simple, mais je lui avais confié la mienne. En mon sens c’était un juste retour des choses, mais je ne savais pas si elle voyait les choses de la même manière que moi.
« Vous n’avez pas besoin de me le dire, je le savais déjà. Si j’avais eu le choix, j’aurais préféré ne jamais m’immiscer dans votre passé. On ne m’a pas demandé mon avis, ça m’est tombé dessus sans que je ne puisse rien n’y faire. Naturellement, je ne parlerais jamais de votre fils à personne. J’ai essayé de me montrer honnête avec vous en vous révélant des choses qui peuvent courir à ma perte. »
Marquant une pause, je sentais mes doigts tapoter mon pantalon de cuir avec nervosité avant que je ne réponde :
« Vous dites que votre passé est passé, mais vous savez au fond de vous que ce n’est pas le cas… »
Je parlais de ses recherches contre les meurtriers de son fils, ses lâches qui s’en étaient pris à un enfant sans défense. J’avais toujours eu envie de l’aider à les trouver, c’était le moment de lui proposer, mais je savais que je marchais sur des œufs en abordant le sujet le plus sensible chez la capitaine.
« William a apprécié votre cadeau, quant à moi je pourrais mettre mes compétences à votre disposition pour atteindre la mission secrète que vous vous êtes fixée … »
J’écoutais Lucy avec beaucoup d’attention. Essayant de comprendre le moindre de ses mots, le sens de chacune de ses phrases. Tout me semblait ahurissant, impossible même. Comment peut-on revenir ainsi à la vie ? Comment peut-on parler aux morts ? Mais qu’avais-je donc à dire à ce sujet ? Je me changeais en louve géante et ma bave pouvait soigner les plaies les plus profondes. Plus rien ne devrait me surprendre aujourd’hui. Je voyageais sur les Sept Mers, j’avais vu plein de choses étonnantes, surprenantes, irréelle. Pourquoi rencontrer une fille qui revenait à la vie, et qui avait un lien avec la mort me surprenait ? Dans ce monde, rien ne semblait impossible, toutes les histoires les plus loufoques pouvaient être réelles. Certaines choses pouvaient même défier les imaginations les plus productives. Cependant, ce n’était pas ces deux dons là qui me gênait le plus, c’était celui qui faisait qu’elle pouvait voir le passé de toutes les personnes qu’elle touchait. Mon passé était mon passé, elle n’avait pas le droit de s’immiscer à l’intérieur, elle n’avait pas aucunement le droit de savoir ce que j’avais traversé… J’essayais tant bien que mal de garder la vie d’Anne MacGregor secrète. Certes, j’en avais parlé à quelques personnes, mais à des personnes en qui j’avais confiance… Le fait d’être une louve n’était pas un secret, ça ne l’était plus. Des légendes courraient à mon propos, parfois j’étais nommé la Louve des Sept Mers, alors qu’on sache que j’étais ne lycanthrope n’était pas un problème, je le disais d’ailleurs à mes matelots pour qu’ils sachent qu’il peut y avoir des moments de danger à bord, parce que j’étais un danger. Mais ma vie passée devait rester un mystère, je ne voulais pas que ça se sache. Je perdrais une certaine crédibilité, on m’attribuerait une certaine sensibilité qui n’était pas permise aux pirates sanguinaires. Certes, on se doutait que j’avais traversé quelque chose d’horrible pour m’être engagée dans la piraterie, mais on ne savait pas quoi. Personne ne devait pirate sans raison, et les raisons de ce choix de vie était rarement un fait joyeux ou heureux. Le bonheur ne pousse pas à devenir un hors la loi, l’injustice, la colère, le désespoir pouvaient nous faire emprunter ce chemin glissant et dangereux. Pas la joie et le bonheur.
J’avais choisi de sauver Lucy il y avait quelques semaines de cela. Jusqu’à aujourd’hui, elle n’avait fait de tord à personne. Elle se faisait discrète et faisait tout ce qu’on lui disait. Elle n’avait réclamé qu’une paire de gants que je lui avais accordée. Elle avait eu raison de me le demander au vue de ce qu’elle m’avait expliqué. Je n’avais aucune raison de la jeter par-dessus bord, ou de la tuer. J’avais fait en sorte de lui sauver la vie et de lui garantir une place à bord du Revenge, je tiendrais mes engagements. A moins qu’elle ne fasse quelque chose qui ne me plaise pas et qui mette en danger la vie des mes hommes. La sécurité du plus grand nombre avant tout. Pour commencer à délier ma langue, je me contentais de lui donner un conseil évident : parler de ses dons à personne. Certains pourraient la tuer pour préserver le secret, comme je le ferais si elle venait à en parler, surtout qu’il ne devait pas être agréable de mourir et de revenir à la vie ensuite. Tout avait un prix, et on payait souvent les miracles dans la douleur et la souffrance. Bien évidemment, Lucy savait qu’elle devait garder le secret sur ses facultés magiques, rajoutant qu’il était en effet douloureux de passer d’une vie à une autre. Face à ses dires, j’hochais simplement la tête, je n’avais rien d’autre à dire à ce propos. Si elle savait qu’elle devait faire ou non, c’était très bien. Elle devait maintenant tenir parole. Il fallait aussi qu’elle tienne sa langue sur ce qu’elle avait vu de mon passé. Je me fichais de ce qu’elle avait vu, si elle savait tout. Tout ce qui comptait, c’était qu’elle n’en parle pas, qu’elle ne dise rien à personne. Il y avait quelques mois, j’avais rencontré Killian Jones, et je lui avais parlé de celle que j’avais été, parce que je lui faisais confiance, que je savais qu’il me comprenait, j’étais persuadée qu’il n’en parlerait pas Mais je ne connaissais pas Lucy… Avant aujourd’hui, je ne savais pas qui elle était, ce qu’elle était. Je n’avais pas besoin qu’elle sache ce que j’avais traversé. Je ne le voulais pas. La situation étant ce qu’elle était, il fallait qu’elle laisse mon passé là où il était. Elle expliqua tout de même que si elle avait eu le choix, elle aurait préféré ne rien savoir de ma vie, ça lui était tombé dessus comme une mauvaise surprise de la vie. Cette dernière pouvait être une véritable garce. J’en savais personnellement quelque chose. Elle me promit de ne jamais parler de William à personne. Elle avait voulu se montrer honnête envers moi en me révélant des choses qui auraient pu la perdre. J’hochai de nouveau la tête.
- La vie nous réserve de belle surprise parfois… Fis-je remarquer avec ironie. Quant à ton honnêteté, je l’aurais su si tu avais menti. Le fait d’être louve nous permet de sentir certaines choses : l’angoisse d’être pris, de savoir qu’on peut être découvert. Mais je te remercie pour ta franchise.
Il y avait des inconvénients à être une lycanthrope, mais je devais noter qu’il y avait aussi beaucoup d’avantage à avoir les sens exacerbés, d’avoir un instinct plus développé que les simples humains. Par contre, je ne m’attendais absolument pas à la réplique de Lucy. Je ne pensais pas qu’elle se permettrait une telle remarque envers moi. Me contre dire ainsi, sans ménagement. Si elle avait vu mon passé dans son intégralité, elle savait très bien que je n’avais pas tourné la page. Pas complètement. Rien que le fait de continuer à faire des cadeaux à William, de rêver de lui, de penser à lui jour et nuit faisait comprendre que je n’avais pas fait mon deuil. Que je n’acceptais toujours pas sa disparition. Mais surtout, je cherchais encore à le venger. J’avais tué l’équipage pirate qui s’en était pris à nous. Maintenant, je désirais retrouver celui qui avait commandité ces meurtres… Mon passé faisait mon présent, et c’était mon désir de vengeance qui faisait que j’avançais encore, qui faisait que je n’avais pas sombré dans le désespoir, qui faisait que je n’avais pas encore mis fin à mes jours…
Pour une fois, je devais avouer que je ne savais pas quoi répliquer. A quoi bon mentir ? Elle savait sans doute tout. Il n’y avait sans doute rien à dire. Rien à ajouter puisqu’elle savait tout. La suite me déconcerta encore d’avantage. Elle déclara que William appréciait mon cadeau. Pendant un instant, j’avais oublié qu’elle parlait à ceux qui nous avaient quittés. Je ressentis alors une certaine jalousie, une certaine injustice : pourquoi pouvait-elle parler à mon fils et pas moi ? Elle ne le connaissait pas, de quel droit avait-elle la possibilité de lui adresser la parole, de l’entendre ? Qu’aurais-je été capable de faire pour l’entendre encore une fois ? J’aurais sans doute été capable de tout. Je rêvais souvent de lui. Dans cet autre monde qui appartenait à l’imaginaire, je pouvais le prendre dans mes bras, jouer avec lui, prendre soin de lui comme par le passé. Je pouvais de nouveau me sentir bien… Mais ce n’était que des rêves, des chimères qui brisaient mon cœur à chaque réveil. A bord du Jolly Roger, navire de Killian, Charles Vane s’était invité avec son équipage. L’un de ses matelots m’avaient grièvement blessée, j’avais perdu connaissance. Pendant ce moment où j’étais encore perdu dans mes rêves, j’avais retrouvé mon William, et il avait exigé que je me réveille. Au moment où mes yeux s’étaient ouverts, j’avais eu un certain regret de m’en être sortie. Une part de moi aurait aimé abandonné les arbres pour rester avec mon fils. Mais pareil, ce n’était qu’un rêve. La volonté de la partie de mon être qui voulait encore rester en vie. Ma vengeance n’avait pas été accomplie. Je n’avais pas le droit de passer l’arme à gauche. Pas encore.
- Je suis contente que ça lui plaise… J’ai pris un certain pour le choisir. Pourquoi veux-tu m’aider ? Ce n’est pas un tâche aisée, ça fait maintenant treize ans que je cherche en vain.
Killian m’avait aussi proposé son aide, j’avais accepté en échange de mon aide en retour pour trouver le Crocodile qui avait tué sa Milah devant lui. Je ne comprenais pas pourquoi Lucy voulait me proposer son aide, utiliser ses dons qui semblaient difficile à supporter pour m’aider. Je n’avais fait que la repêcher sur la plage pour lui proposer ensuite une vie de hors la loi. D’ailleurs, elle savait qu’elle n’était pas obligée de rester avec nous, elle avait le droit de nous quitter à tout instant, afin de trouver une vie plus tranquille. Elle avait le temps pour y réfléchir, le droit de peser le pour et le contre. Pour l’instant, elle faisait parti de mon équipage, et je la protégerais comme n’importe lequel de mes matelots. Malgré le sujet important que nous abordions, il y avait une question qui m’avait toujours inquiétée depuis ces treize longues années. Et peut-être que grâce à elle, j’aurais enfin la réponse à mes interrogations.
- Sais-tu si William est bien là où il est ? S’il est seul, ou avec son père, ou encore des membres de l’équipage de notre navire ?
Il n’avait que deux ans lorsqu’il m’a été enlevé, et je m’étais toujours demandé s’il allait bien, s’il ne manquait de rien, s’il y avait quelqu’un pour s’occuper de lui. James et moi, nous ne nous aimions pas. Il s’agissait d’un mariage arrangé, mais nous nous entendions et je savais qu’il avait beaucoup aimé William. Il aurait tout fait pour lui. S’ils étaient ensemble, ça me rassurerait. J’avais toujours eu peur d’imaginer mon fils tout seul entrain de vagabonder de « l’autre côté »… S’il était avec quelqu’un, je me sentirais sans doute un peu mieux. Moins inquiète. Il m’arrivait de sentir la présence de William à mes côtés, le jour de son anniversaire, le soir du réveillon de Noël, ou d’autres occasions particulières. Mais je n’avais jamais senti James…
Remember love, remember hate, remember everything they said just to break you again.Les mots que j’avais prononcé et les révélations que j’avais fait me donnait l’impression d’avoir perdu quelque chose avec Anne. Cette dernière m’apprenait le fait qu’elle était un détecteur de mensonge sur pattes et j’haussais la tête. J’avais bien fait de ne pas lui mentir, c’était sans doute pour cela que ma mère m’avait murmuré de tout révéler avant de disparaitre tout bonnement de la circulation. Je ne savais pas comment fonctionnait les fantômes, je ne savais pas les appréhendais et je savais que tout serait compliqué. Tant qu’on était tranquillement en train de s’avouer nos capacités magiques j’en profitais pour annoncer à Anne que son fils avait apprécier son cadeau. Il n’était pas resté longtemps. J’avais compris que s’était lui parce qu’il tournait autour d’Anne et avait suivi l’objet dans les flots.
« Un enfant ne devrait jamais être arraché à sa mère. Vous ne méritiez pas cela et lui non plus c’était un être innocent et sans défense. Je n’aime pas les lâches. Je me fiche pas mal que ce soit compliqué, ça ne peut pas l’être plus que ce que j’ai déjà vécu. Je peux entrer dans la tête des suspects Anne, je peux leur faire dire ce qu’ils ne veulent pas avouer ! »
Je savais que je pouvais l’aider, et mettre fin à sa quête de treize années plus rapidement. Utilisé mes compétences magiques m’épuisaient, je le savais chacune de mes visions, me hantais, je vivais chaque souvenir comme si c’était les miens et généralement j’en gagnais l’honneur d’avoir de puissante migraine, mais j’en avais que cure.
« Je l’ignore, je n’ai pas eu le temps de communiquer avec lui, mais s’il était seul il serait constamment avec toi. Du peu que j’ai pu ressentir il ne semblait pas malheureux. »
Je savais que cela serait insuffisant pour la mère éplorée qu’elle était. Cependant, je refusais de lui mentir uniquement pour la libérer de ses craintes. Je ne voulais pas lui mentir et être une diseuse de bonne aventure. Je n’étais pas une imposture, et je refusais de jouer sur ses faiblesses pour gagner sa confiance.
« Si je le recroise, je pourrais lui demander si tu le désires… »
Attendant sa réponse je posais mes mains gantées sur le bois du bateau et regardais les flots avant de me souvenir de ma dernière mort. Je devais apprendre à nager.
« Penses-tu qu’il serait possible que j’apprenne à nager ? »
Le fait d’être une louve avait de nombreux avantages, même s’il y avait aussi un lot d’inconvénients. Ça me permettait de savoir quand on me mentait… Enfin, je pouvais au moins percevoir le sentiment d’angoisse de la proie qui avait peur d’être prise au piège. Les animaux avaient un instinct plus affuté que celui des humains, il me permettait de sentir des choses que les simples Hommes ne pouvaient pas sentir. Alors j’étais ravie de voir que Lucy avait été sincère et honnête. Depuis le début, j’avais senti son odeur qui était mêlé au parfum sucré de la magie. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle ait le pouvoir de voir le passé des autres, et de communiquer avec les morts. Si je l’avais su, je n’étais pas sûre que je lui aurais permis de rester avec nous. Mais ce qui était fait, était fait. Je devais accepter sa présence à bord. Et sa compassion avait quelque chose de réconfortant.
Ses paroles montrèrent toute sa gentillesse et sa générosité. Elle avait raison, les enfants ne devraient pas être arrachés à leur mère. J’avais à peine connue la mienne, et ça avait eu quelques conséquences. Quelqu’un m’avait pris mon fils, et ça m’avait rendue folle de chagrin. Qui savait ce que j’étais capable de faire par vengeance aujourd’hui ? Je serais capable de tout pour tuer celui qui m’avait fait le plus de mal. Et non, William ne méritait pas ça, il n’avait que deux ans… Il avait encore toute une vie devant lui, pour grandir, vivre de grandes aventures… Mais tout n’était plus qu’un mirage, un souvenir et des souhaits du passé. La jeune femme me proposait son aide, et malgré mon pessimisme face à l’affaire, elle insistait pour m’aider. Grâce à ses dons, elle pouvait avoir des informations que j’arriverais jamais à obtenir. Je ne savais pas quoi répondre… Il me fallut quelques instants pour rassembler mes idées.
- D’accord… J’accepte ton aide. Mais personne ne doit jamais rien en savoir…
Comment pouvais-je refuser une aide aussi précieuse ? Personne ne pourrait m’aider comme elle le pouvait… Ses dons étaient très utiles, alors je ne pouvais qu’accepter son aide, et je la savais assez sincère pour m’aider sans rien demander en retour. Elle avait déjà ma protection, mon navire pour abri, elle était payée pour son travail de pirate. Et si elle voulait quelque chose, tout était négociable. Mais d’autres questions m’effleuraient l’esprit. La vengeance n’était plus le sujet, la mère inquiète que j’étais voulait être rassurée, qu’on calme ses angoisses. J’avais toujours eu peur que William soit seul de l’autre côté, qu’il soit malheureux ou encore qu’il souffre de je ne savais quels maux. Malheureusement, Lucy ne savait rien, elle n’avait pas eu le temps de lui parler. Elle expliqua tout de même que s’il était seul, il serait toujours avec moi, et il ne lui avait pas semblé qu’il était malheureux. William avait toujours été un garçon très joyeux, curieux. Il ne pleurait que rarement. Savoir qu’il n’était pas pris par le chagrin me rassurait, même si ce n’était que des suppositions. J’espérais qu’il était avec James. S’il n’était pas très bon époux, il était un bon père et il s’occupait à merveille de son fils. J’espérais qu’ils étaient tous les deux ensembles. Lucy me proposait de poser les questions à William si elle venait à le revoir.
- Si tu le peux, je veux bien. Je veux juste être sûre qu’il est bien là où il est… Qu’il ne manque de rien, et surtout savoir qu’il n’est pas tout seul… Il ne doit pas être tout seul.
On ne devait pas être tout seul à deux ans. Certes, il devait avoir quinze ans aujourd’hui, mais il était parti à deux ans. Et j’avais toujours l’image d’un petit enfant dans mon esprit. Pour moi, il n’avait pas grandi. Je doutais fortement que les fantômes puissent grandir. Ils étaient coincés dans le temps, perdu dans un autre monde où ils ne pouvaient changer. J’aimerais tant pouvoir reprendre mon fils dans mes bras… Mon petit garçon. Mais ce n’était pas aujourd’hui que ça arriverait. Ça serait possible le jour où je passerais moi-même l’arme à gauche. Et avant que ça n’arrive, je devais arriver à bout de ma vengeance…
La question posée par Lucy était complètement hors contexte, et me surprit grandement. Je ne m’y attendais pas. Mais en réfléchissant, je comprenais qu’elle ait envie d’apprendre à nager. Je l’avais retrouvé sur une plage, presque noyée. Enfin, d’après ce que j’avais compris, elle s’était vraiment noyée et était revenue à la vie. Pour que ça ait moins de chance d’arriver, elle devait apprendre à survivre en mer. Les choses étaient parfois étranges, nombreux étaient les marins qui ne savaient pas nager… Je lui fis un petit sourire.
- Oui bien sûr. Je t’apprendrais à nager. Mais il serait préférable d’attendre d’accoster quelques parts et de trouver des eaux calmes pour ça.
Elle m’aidait, en retour je pouvais bien lui apprendre à faire la brasse. On trouverait toujours le temps pour ça, c’était un enseignement utile pour une vie en mer. Je me mis aussi à regarder l'océan… Indomptable et maître de lui-même. Personne ne pouvait le défier, il pouvait donner et prendre. Il était l’image du calme et du danger. Il était un véritable reflet de la vie : imprévisible.
- Cherches-tu quelqu’un aussi ? Pourquoi t’être engagée dans la piraterie ?
Remember love, remember hate, remember everything they said just to break you again.La vérité avait éclaté et j’étais encore en vie. Ce qui en mon sens était une bonne chose, nous en vîmes même à parler ouvertement de William sans qu’Anne ne se braque totalement. Ce pauvre enfant a peine sortie de l’ère du nourrisson avait v sa vit lui être arraché et se retrouvait pour l’éternité dans l’esprit et le « corps » d’un bébé. Je n’avais jamais eu l’occasion de converser avec des personne aussi jeune. J’ignorais même s’il savait parler, à cet âge-là un enfant savait-il parler ? J’en savais foutre rien, j’étais fille unique et je n’avais jamais eu l’occasion de côtoyer des enfants. D’ailleurs ils me fichaient la trouille, ils étaient beaucoup trop fragiles et je crois que j’ai toujours eu peur de les briser en faisant quelques choses qui pourrait les mettre en danger. Quoi qu’il en soit que je comprenne leur fonctionnement ou pas, les fait restait les mêmes ils ne méritaient pas de finir ainsi. La capitaine finissait par écouter la voix de la raison et m’autorisa a l’aider dans sa quête sous couvert de ne rien dire à personne. Hochant la tête en signe d’accord je me retenais pour ne pas lâcher que j’avais pas envie que tout le monde sache ce que je savais faire donc qu’elle pouvait être certaine que j’allais me taire.
« Je tenterais d’en savoir plus alors. Mais je dois te prévenir Anne, je ne contrôle pas les allées et venues des esprits, la réponse peu prendre du temps … »
Je tenais à la prévenir. Je ne souhaitais pas qu’elle se mette à espérer une chose en pensant qu’elle aurait la réponse dès le lendemain ou dans la semaine suivante. J’avais dit cela avec précaution et tact, j’arrivais à comprendre qu’elle puisse désirer cela, mais malheureusement je n’étais pas assez expérimenté en magie et dans le contrôle de cette dernière pour l’exercer dans les meilleures conditions. Généralement je subissais tout ce qu’il m’arrivait, j’étais encore l’instrument de mes pouvoirs, pas le maitre suprême. Mes mains posées sur le bois du bateau je regardais les eaux agitées, mon esprit se perdait dans l’immensité de ses étendues, mais il angoissait toujours à l’idée que je puisse mourir une seconde fois par la noyade. Pour tout dire c’était beaucoup plus douloureux de se retrouver les poumons gorgés d’eaux que de se faire vider de son sang. Dans un élan de confiance, je demandais à Anne s’il serait possible qu’elle m’apprenne à nager, j’avais demandé cela sans la regarder, certainement par honte. Je n’avais pas pour habitude de demander de l’aide, encore moins pour ma survie, mais en l’occurrence faire ça je ne pouvais apprendre toute seule. Finissant par me retournait, je m’adossais au rebord du bateau et aperçu son sourire avant qu’elle n’accepte. Un sourire naissant à mon tour sur mon visage je la remerciais d’un geste de tête :
« Oui naturellement, merci »
Anne reportait son attention sur les eaux de l’océan et je me retournais moi aussi. Même si je trouvais le spectacle magnifique, cela m’angoissait. Certainement à cause de mon incompétence à nager d’ailleurs. La capitaine me posa de nouvelles questions et je sentais un frisson me parcourir lorsque les réponses me parvenaient :
« Non, je n’ai personne dans ma vie, et personne n’attend après moi »
Pur vérité, triste certes, mais c’était la vérité à la mort de ma mère l’unique personne qui me restait était Camilia mais elle m’avait enterré et depuis je ne pouvais revenir vers elle sans compter que j’ignorais bien si elle avait réussi à échapper à Dracula. Son cas était certainement déjà clos.
« La piraterie est ma meilleure option pour le fuir. Il sait que je connais tout désormais et il fera tout pour me retrouver et finir le travail. »
Je restais vague volontairement. Parler de Barbe Bleue n’était pas aisé pour moi, sans compter que je ne savais pas si Anne voulait entendre l’histoire de ma pitoyable vie ou si elle avait demandé ça par pur curiosité. Libre à elle de me demander plus ample information sur le sujet qui entouraient la seconde vie.