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Nouvelles têtes
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Le retour de Carrie
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- Je ne leur en veux pas… Je comprends tout à fait… Soufflai-je à Mariette qui quittait déjà la cabine.
C’était en partie de ma faute… Il avait fait tout ça pour Pearl, pour la protéger, pour que je ne la perde pas comme j’avais perdu William. Killian avait voulu protéger sa fille, ça lui avait coûté le prix qu’il avait payé. Si je pouvais soigner ses blessures physiques, je n’étais pas certaine de pouvoir guérir son esprit. Je ne savais pas ce qu’il avait vécu, ce qu’on lui avait fait subir, alors j’ignorais comment je pouvais l’aider. Mais avant de s’attaquer au soin de sa psyché, j’allais devoir m’atteler la guérison de son corps. La cuisinière m’avait aidé à nettoyer les plaies, dont certaines qui s’étaient infectées. Maintenant, je pouvais prendre le temps d’y appliquer un peu de salive de loup pour aider à la guérison. Les blessures les plus graves, les plus profondes allaient se rétablir en plusieurs heures. Les plus petites n’étaient déjà plus. S’il commençait à aller mieux, je voyais qu’il souffrait encore. Pensant qu’en retirant ses entraves, je le soulagerais un peu, je fis une grossière erreur qui se retourna contre moi.
A peine fut-il libre de ses mouvements, qu’il se redressa d’un coup. Mon regard croisa le sien. Il était méconnaissable. Empli de haine et de fureur. Je n’eus le temps de rien faire, de rien dire qu’il se jeta sur moi. Ses doigts et son crochet se retrouvèrent sur ma gorge. Avec sa force, il m’avait renversée en arrière, j’étais tombée sur le dos sur le sol de sa cabine. Le souffle coupé, j’eus du mal à articuler ces quelques mots :
- Ar… rête… Je t’en… Pr… ie… C’est… Anne…
J’étais en danger. Malgré son état, il restait plus fort que moi… Je n’en avais pas envie. Je ne voulais pas faire ça, pas comme ça… Mais je n’avais guère le choix.
Les pattes arrière de la louve se glissèrent sous le torse de Killian pour le repousser violemment. J’avais le plein contrôle sur l’animal mais je sentais qu’il avait commis l’irréparable à ses yeux. Il m’avait du mal, et si je savais que le capitaine n’était pas responsable, la louve l’avait vu m’étrangler et c’était suffisant pour le condamner à ses yeux. Il était parvenu à l’apprivoiser et tout venait de voler en éclat.
Un léger hurlement coula le long de ma gorge, James entra avec fracas dans la cabine avec quelques matelots. Je repris alors forme humaine, encore un peu sonnée.
- Rattachez le avant qu’il ne recommence… je pensais que ça irait… Mais ce n’est pas le cas. Ramenez le sur sa couche… S'il vous plait. Murmurai-je.
Le capitaine Crochet était lui aussi un peu secoué par la force de la louve, mais ce ne fut pas simple de le remettre au lit. Je les regardais faire jusqu’au moment où mon second vint me voir.
- Il vous a blessée capitaine… Son doigt glissa sur ma gorge et il me montra le sang qui coulait d’une plaie dont j’ignorais la présence.
- Son crochet surement. Ce n’est rien. J’ai connu pire. Merci, pour l’avoir remis au lit… Vous pouvez nous laisser, je ne le détacherai plus.
Il me salua d’un signe de tête et refis sortir les quelques membres d’équipages. Je pris une chaise pour m’asseoir près du lit. Ne tenant plus, un flot de larmes coula le long de mes joues.
- Je te déteste… On aurait trouvé une autre solution ensemble… Tu m’as dit de ne pas m’inquiéter… Je te faisais confiance… Tu es entrain de m’abandonner… Alors que tu avais promis de ne jamais le faire…
Avait-il fait tout cela en vain ? J’avais cru comprendre que la sorcière n’avait pas tenu parole. Me relevant, je cherchais alors l’amulette et je vis le pendentif d’un bleu éclatant posé sur la table. Il y avait un mot à côté… Ce n’était pas l’écriture de Killian, mais celle d’un homme qui souffrait. Mes sanglots redoublèrent. Je m’en voulais terriblement de l’avoir obligé à tout sacrifier pour nous. Je retournais près du lit afin de m’agenouiller près du pirate.
- Je t’en supplie… Reviens-moi… J’ai tellement besoin de toi…
A aucun moment le visage d’Anne ne se substitua à celui de la Sorcière. Dans son délire elle refusait d’honorer sa part de marché alors que l’amulette se trouvait pourtant belle et bien là. Sur la table. Près du mot écrit par Killian. Soudain, il fut repoussé violemment en arrière et des membres de son équipage accompagnés de James jaillirent dans la cabine pour le maîtriser et le rattacher au lit. Malgré la faiblesse de son corps, il luttait pour se défaire de ses liens, trop solide pour son état. Un regard fou de douleur ravageait ses traits, il demeurait encore prisonnier de son esprit et de ce qu’il avait subi. Ses muscles tremblaient, son dos s’arquait comme s’il était possédé, un rictus de souffrance laissait transparaître les affres qu’il traversait. Pourtant, lorsque la pirate revint vers lui, une étrange accalmie sembla se poser sur lui. Etaient-ce ses paroles qui percèrent les murs de ce cauchemar où il était enfermé ? Est-ce que ce fut la larme qui avait quitté le visage de celle qu’il aimait par-dessus tout et qui s’écrasa sur sa propre joue ? Ses paupières se fermèrent. Il déglutit. Des perles d’eau salée se formèrent à la commissure de ses cils et glissèrent sur sa pommette amaigrie. « Anne… »
Ce ne fut qu’un souffle avant que l’épuisement ne le gagne et qu’il ne sombre dans un sommeil profond. Mais un sommeil calme et dénué de toutes les atrocités qu’il avait vécu, et revécu encore et encore dans son esprit torturé. Le premier depuis qu’il avait été repêché après sa semaine d’esclavage volontaire. Le visage en sueur, ses muscles se délièrent et son corps enfin s’autorisa à un repos serein dont il avait réellement besoin.
Je n’avais pas voulu lui faire du mal, mais l’instinct de survie avait parlé et je l’avais repoussé. La louve faisait moins dans la délicatesse, elle se défendait et n’y allait pas avec des pincettes. Pour éviter le pire, j’avais repris forme humaine et appelé l’équipage afin de m’aider à remettre le capitaine Crochet dans son lit. Je m’étais aventurée à le détacher, je n’aurais pas dû. Je pensais que ça irait, mais ça ne s’était pas bien passé du tout.
Le pirate de retour sur sa couche et sur le lit, j’échangeais quelques mots avec James qui s’inquiétait. Je tentais de le rassurer au mieux avant de les refaire sortir. Je me rappelai de tout l’espoir que Mariette avait placé sur moi pour sauver son capitaine, mais en voyant son état maintenant, je finis par douter de mes capacités à le ramener parmi nous. Je le détestais pour ce qu’il me faisait subir… A cet instant, je le haïssais autant que je l’aimais. J’étais persuadée que nous aurions pu trouver une autre solution ensemble…
Près de sa couche, des larmes se mirent à couler sur mes joues alors que je lui disais tout ce que j’avais sur le cœur sans savoir s’il m’entendait. Non, il ne m’entendait pas. Il m’avait prise pour une autre et s’en était pris à moi… Alors que le désespoir me gagnait, je l’entendis souffler mon nom. Relevant la tête, mes yeux se posèrent sur lui et il semblait aller mieux… Il semblait plus serein. Peut-être était-ce le début d’un mieux… En tout cas, il avait l’air de se reposer. Je repris de la salive de loup pour soigner ses poignes et ses chevilles puisqu’il ne bougeait plus et séchais rapidement mes larmes pour sortir sur le pont. Ce fut mon second qui vint à ma rencontre.
- Il a l’air de se reposer… Il a l’air plus calme. Je reste ici pour la nuit, afin de veiller sur lui, mais au levé du jour, je retournerai sur l’île pour aller rassurer Pearl… - Très bien capitaine… Allez-vous lui parler de l’accident ? De ce qu’il vous a fait ? - Non, il culpabiliserait et je doute qu’il ait besoin de ça. - Et que pense la louve de cette histoire ? - Rien de bon… Mais je saurais la calmer. Ce n’était qu’un accident, il n’y est pour rien. - Ne serait-ce pas plus sage de le lui dire, pour qu’il soit plus prudent ? Et pour qu’il l’apprivoise de nouveau ? - Je verrai en temps voulu… Je retourne veiller sur lui. - Un peu de repos, ne vous ferait pas de mal à vous non plus. - Mmh…
Je tournais les talons et retournais dans la cabine du capitaine. Je pris une chaise pour m’installer et veiller sur Killian. J’essayais d’être le plus silencieuse possible pour le laisser dormir. Il avait besoin de dormir et je ne voulais pas l’en empêcher. J’espérais pour qu’il aille mieux. Je priais pour que tout s’arrange au plus vite… Pour retrouver l’homme que j’aimais.
J’avais cru mourir. J’avais souhaité mourir. Appelant la faucheuse de toutes mes forces. Ne supportant plus de souffrir encore et encore. Prisonnier de ce que m’avait fait vivre la sorcière. Même s’il s’agissait d’un marché que j’avais moi-même demandé, souhaité, après avoir obtenu l’amulette je ne me sentais plus la force de lutter, de résister à l’appel de la mort. La sorcière se nourrissait de la souffrance morale et physique des êtres qui lui tombaient entre les mains et l’élixir qu’elle tirait par sa magie de la douleur était d’autant plus puissant si la victime était forte de caractère et consentante. J’étais les deux. Je lui avais tout donné. Durant une semaine. Esclave volontaire. Mais j’en avais perdu l’esprit, elle m’avait pris mon âme, mes pensées, tout. Je lui avais abandonné ce que j’étais pour sauver notre enfant. Bien sûr, je l’avais fait en toute conscience, connaissant les conséquences, mais c’était la seule solution. Pour Pearl. Pour Anne. Tout en sachant que la louve m’en voudrait d’avoir donné autant de ma personne, bien que si cela avait été elle, elle en aurait donné autant. Personne n’aime voir souffrir ceux qu’on aime. L’impuissance est le pire des maux.
Mes paupières papillonnèrent, la lumière me faisait mal aux yeux. J’avais l’impression d’avoir été prisonnier durant une éternité. La douleur me vrillait la nuque, la tête, le corps. Attaché, je tirai sur mes liens. Pourquoi donc étais-je attaché à mon lit ? C’était pourtant bien ma cabine. J’étais à bord du Jolly Roger. Et cette silhouette. Mes sourcils se froncèrent, provoquant une nouvelle décharge fulgurante de douleur au niveau de ma tête. « Anne ? »
Etait-ce elle ou une nouvelle chimère ? Une nouvelle torture de la sorcière ?
Pourquoi ne pouvais-je fermer les yeux et m’endormir. M’endormir à tout jamais. Cesser de souffrir. N’avais-je pas assez donné ? Je n’étais plus qu’une coquille vide. Qu’on me laisse glisser dans un repos éternel. Je n’en demandais pas plus.
Que s’était-il donc passé pour qu’il soit dans un tel état ? Qu’avait donc fait cette sorcière pour qu’il ne me reconnaisse pas ? Si Pearl avait été avec moi, lui aurait-il fait du mal à moi aussi ? Même si ça n’était pas responsable de ses faits et gestes, je lui en aurais voulu pour avoir touché à notre fille. James avait bien fait de me préciser de venir seule. Ça aurait brisé le cœur de Killian d’avoir fait du mal à sa petite fille. Ça aurait brisé le cœur de mon louveteau de voir son père blessé ainsi. Méconnaissable.
Doucement, les rayons du Soleil commençaient à entrer à l’intérieur de la cabine. Killian dormait encore. Je sortis sur le pont afin d’aller à la rencontre de mon second. Le jour pointait le bout de son nez : je devais retourner sur l’île pour le réveil de ma fille. Ce fut James qui me débarqua sur la plage. Il en profita pour me sermonner sur le fait que je commençais à avoir des secrets pour le capitaine Crochet. Ne l’écoutant qu’à moitié, je bondis hors de la barque dès que je pus, je me changeai en louve et regagnai la maison.
Arrivée, je repris forme humaine et rentrai silencieusement. Dans la chambre, Pearl était encore dans les bras de Morphée. Doucement, je retournais m’allonger près d’elle et la pris contre moi. Sa présence m’apaisa et me fit un bien fou. Elle apporta toute la tendresse dont mon cœur avait besoin. Ses yeux s’ouvrirent doucement, un sourire ensommeillé se dessina sur ses lèvres. Je déposai un baiser sur son front.
- Bonjour ma chérie.
Je la laissais se réveiller avant de lui expliquer que son papa était rentré, mais qu’il était blessé. Pour le moment, elle ne pouvait pas aller le voir parce qu’il était fatigué, mais je m’occupais de lui. Par conséquent, pour l’instant, elle devait rester à la maison avec Eyris. Déçue de devoir renoncer à ma présence, et inquiète pour son père, elle me laissa partir en me promettant d’être sage et de faire de beaux dessins pour son papa.
L’esprit de la nature et Pearl était en train de petit déjeuner lorsque que je quittai la demeure. Sur mes quatre pates, je filais aussi vite que possible à travers la forêt afin de regagner le Jolly Roger. James m’avait attendue sur la plage et me ramena sur le navire. Cette fois, il ne dit rien. Dans ses quartiers, Killian avait toujours les yeux clos et semblait calme. Je profitais de son sommeil pour soigner la paie sur mon cou avec le reste de salive qu’il y avait dans mes fioles. Ainsi, il ne saurait rien. Plus aucune preuve de cet accident.
Assise sur une chaise près de la couche du pirate, je veillais sur lui ; alors que la fatigue commençait à se faire ressentir, je crus rêver au moment où j’entendis mon prénom. Regardant vers le lit, je vis Killian les yeux ouverts, un masque de souffrance posé sur son visage.
- Killian ? Tu… Comment te sens-tu… ?
Je me levai pour m’approcher, tout en restant prudente au cas où…
- Tu es sur le Jolly Roger… Ton équipage t’a ramené sur le dos de Kala. Dis-je doucement.
(c) sweet.lips
Dernière édition par Anne Bonny le Dim 6 Jan - 15:26, édité 1 fois
Ce n’était pas un rêve. J’étais de nouveau au refuge. Avec Anne. Avec Pearl. J’étais revenu de l’enfer.
Tentant de me relever je fus retenu pas mes liens. Mes sourcils se froncèrent.
« Pourquoi ? »
Je reconnaissais bien ma cabine et le doux visage de ma chère Anne. Mais pourquoi donc étais-je attaché à mon lit. Je n’avais aucune trace de blessure. Immédiatement je me doutais que la salive de la louve avait dû agir. Des bribes de souvenirs me revinrent. Les coups, les tortures, morales et physiques. C’était le prix demandé.
« L’amulette ! »
Je tournais le visage vers la table. Avait-elle lu mon message ? Oui. Sûrement. Mon visage s’échauffa soudain. J’avais voulu l’abandonner. Me pardonnerait-elle ? Sur le moment je n’avais pas vu d’autre solution. Mes forces m’abandonnaient, je n’étais que souffrance. Mon esprit semblait perdu dans les affres du cauchemar que la sorcière m’avait fait subir. Je vivais l’horreur absolue.
En étais-je venu aux mains ? Etait-ce pour cela que l’on m’avait entravé ? Lui avais-je fait du mal ?
Le rouge quittant mes joues, c’est une soudaine nausée qui m’envahit. Je me dégoûtais de n’avoir pas été plus fort.
Mes paupières se fermant pour cacher la honte que je ressentais et retenir les larmes qui venaient à naître, je murmurais dans un souffle.
« Je suis désolé. Pardonne-moi de ne pas répondre à tes attentes. De ne pas être assez fort. »
Les yeux toujours fermés je ne voulais pas me résoudre à lire dans son regard la colère, la déception, voire pire le mépris. Pourtant, je ne regrettais rien. Mon but étant atteint.
« Mets cette amulette au cou de Pearl, elle pourra alors quitter cette île et voyager à tes côtés sans risques. »
Au moins même si je perdais le respect et l’amour d’Anne, notre fille serait sauvée.
Je vis que Killian voulut se lever, mais c’était impossible à cause de ses liens. Je m’approchais un peu plus et commençais à défaire les cordes.
- Tu… Tu délirais… Tu voyais des choses et tes hommes avaient peur que tu te fasses du mal alors ils t’ont attaché. Expliquai-je posément.
Ils avaient aussi peur qu’il fasse du mal à un tiers. J’avais été plus naïve et j’avais voulu le détacher trop tôt. A présent, il semblait être de nouveau lui. Enfin, presque. Alors je me décidais à le libérer de nouveau. La louve tapit au fond de mon cœur était plutôt pour le laisser attacher pour ne prendre aucun risque, mais je préférais ne pas l’écouter.
Soudain, le pirate s’écria. Se rappelant de la raison qui l’avait poussé à partir : l’amulette. Posant doucement mon regard sur lui, je lui fis un léger sourire qui se voulait réconfortant.
- Chut… Je l’ai vue… Elle est bien là. Tu as réussi à l’avoir. Je n’ai pas encore pris le temps de la regarder de près… J’ai voulu m’occuper de toi d’abord.
J’avais vu le bijou mais aussi le mot. Mais je préférais l’oublier. Je préférais ignorer sa volonté de nous abandonner. Il avait certes tout fait cela pour nous, sauf que je restais persuadée qu’il y avait une autre solution… Que nous aurions pu protéger Pearl autrement. Je n’avais aucune envie de le culpabiliser alors je préférais taire ses pensées là. Les garder pour moi.
Je ne savais à quoi il pensait… J’eus l’impression qu’il allait soudainement moins bien. Il s’excusa alors et me demanda de lui pardoner. Je m’assis doucement sur le bord du lit et lui pris la main.
- Pourquoi es-tu désolé ? Pour avoir sacrifier une partie de toi pour que je puisse être avec notre fille ? Mes attentes ? De quelles attentes parles-tu ? J’ai simplement besoin que tu sois toi… Et que tu me reviennes… tu es revenu et tu es plus fort que ce que tu crois…
Je n’oubliais pas avoir dit que je le détestais… C’était faux, bien sûr. Je détestais simplement l’idée qu’il ait pu nous laisser. Mais il était revenu… Je l’aimais pour la personne qu’il était, pour tout ce qu’il faisait. Parfois ses choix, ses réactions me dépassaient, mais je l’aimais. Je l’écoutais, et fronçais légèrement les sourcils.
- A « mes » côtés ? Pourquoi ? Tu ne veux plus voyager avec nous…?
Finalement, est-ce que ce n’était pas lui qui me détestait ? Avait-il l’impression que je lui en demandais trop ? Que j’en attendais trop de lui justement ? Etait-il fatigué de supporter tous mes besoins ? De supporter cette peur incontrôlable de perdre ma fille, comme j’avais perdu mon fils ? Ou était-ce la sorcière qui avait fait en sorte qu’il ne nous aime plus comme avant ?
- Est-ce là ton cadeau d’adieu ? Cette amulette. As-tu cessé de nous aimées… ? Veux-tu partir ? Demandai-je doucement.
Avec la magie, tout était possible. A force de souffrir, les gens changent… Peut-être que les choses avaient fini par changer pour lui. Mes sentiments n’avaient pas tari. Je l’aimais toujours autant. Plus même. Pour tout ce qu’il avait fait, je lui étais redevable. Quant à la confiance de la louve, je savais qu’il parviendrait à la récupérer. J’y travaillerais…
- Si ce n’est pas le cas… Epouse-moi… Je ne veux plus être séparée de toi… Je ne veux pas te perdre… Je suis prête à tout abandonner pour toi et être à tes côtés…
L’image d’Emma me traversa l’esprit et je regrettais aussitôt mes mots. Je n’étais pas passée à côté de l’attirance qu’ils avaient l’un pour l’autre. Et si Killian éprouvait toujours autant d’affection à mon égard, je n’étais pas persuadée qu’il refuserait ma demande.
- Je… Je n’aurais pas dû… Nous sommes très bien ainsi, n’est-ce pas ? Cela fait des années que nous vivons ainsi et que cela nous convient. Je suis désolée… Je ne voulais pas te mettre dans cette situation… Il était temps de changer de sujet. As-tu faim ? Tu devrais manger… Tu as beaucoup maigri.
Anne pouvait se montrer redoutable. Pourtant avec moi elle avait la plupart du temps agit avec une douceur incomparable. C’est encore ce qu’elle faisait en cet instant, en défaisant mes liens. Ainsi, je délirais et mes hommes avaient eu peur que je ne me blesse ? Je décelais dans ses paroles l’ombre d’un demi-mensonge.
« Ais-je blessé quelqu’un ? »
Voire pire ?
Rassuré sur la présence de l’amulette, je me calmais un peu mais bien vite la honte me submergea devant ma faiblesse. Le désarroi m’envahit, je ne me sentais plus le droit d’être à ses côtés. De quelques questions elle balaya mes craintes, mes croyances, elle avait plus confiance en moi que moi-même. C’était incroyable de posséder une telle foi en quelqu’un. Quoi que moi j’avais cette même certitude à son égard. Alors que toutes ces pensées me chamboulaient, elle se mit elle-même à poser des questions sur des doutes qui n’avaient pas lieu d’être. Je rouvris les yeux, posant mon regard sur son doux visage où se lisait une indicible souffrance. Causée par mes propos qui avaient étés mal compris. Soudain elle me fit une proposition qui me laissa pantois. La bouche ouverte, je sentis mon cœur s’emballer. Ma gorge se nouer. Je me redressais. Avant que je n’aie pu dire quoi que ce soit, elle se ravisa. Avant de changer complètement de sujet. M’asseyant au bord du lit, je lui pris les mains.
« Anne…. »
Ma voix me semblait lointaine. Je ne la reconnaissais pas. Avalant ma salive pour l’éclaircir, je repris avant qu’elle ne se fasse de fausses idées.
« Anne. Je ne voulais pas vous quitter. Je pensais que tu préférerais être seule avec Pearl. Je ne voulais pas être un poids. J’avais l’impression de n’être plus que l’ombre de moi-même et je ne voulais pas t’imposer ça. Ni à toi, ni à Pearl. »
Jamais je n’avais cessé de l’aimer, elle et notre fille. Au contraire. C’était elles qui m’avaient fait tenir jusqu’à ce jour.
« Vous quitter ? Si tu le veux, si tu l’acceptes, je ne vous quitterai plus, nous nous marierons, nous formerons ensemble la plus belle des familles et nous serons enfin réunis pour toujours. »
L’idée de l’épouser ne m’avait pas traversé l’esprit car je savais qu’elle tenait à sa liberté et qu’elle avait souffert de son premier mariage, mais oui j’étais prêt à faire ce serment car c’était ce que voulait mon âme, mon cœur, même si jusqu’à présent j’avais refusé de voir cette évidence.
- Oui… Tu as blessé quelqu’un, mais rien de grave. Ne t’inquiète pas. Je pense que c’est déjà oublié. Personne ne t’en veut.
Ce n’était pas un mensonge, je disais la vérité. Rien n’était de sa faute, c’était la sorcière qui était la cause des derniers événements, c’était à cause d’elle que Killian avait perdu l’esprit. De façon temporaire. Heureusement. Que serait-il passé sinon ? Je préférais ne pas y penser.
Je surpris soudainement la honte qu’il ressentait. Je ne comprenais pas pourquoi un tel sentiment l’avait envahi. Il n’avait rien fait qui puisse être blâmable. Il avait tout fait pour nous. Il était prêt à tout sacrifier pour nous. Je tentais de lui faire comprendre qu’il n’avait rien à regretter, rien à se reprocher. Je l’aimais, et c’était tout ce qui comptait à mes yeux. Je l’aimais parce qu’il était Killian Jones et personne d’autre.
Si l’idée m’avait traversé l’esprit, jamais je n’aurais pensé la formuler à haute voix. Encore moins aujourd’hui. Le capitaine Crochet, marié ? Qui l’aurait cru. Qui y aurait songé ? Pendant un court instant, je me sentis bête de l’avoir demandé en mariage, et je me ravisais vite. Voulant faire en sorte qu’il oublie cette étonnante question, je l’interrogeai sur sa faim. Je n’eus pas le temps d’aller bien loin qu’il m’attrapa la main en m’interpellant. Mes yeux se posèrent sur lui et j’attendis la suite de ses paroles. Je doutais qu’il souhaitait parler du repas que Mariette lui proposerait. Alors, j’écoutais.
- Un poids pour nous ? Mais nous avons tant besoin de toi… Nous aurions tout fait pour que tu retrouves toute ta personne… Nous aurions pris tout le temps qu’il aurait fallu…
Les mots qu’il prononça ensuite firent bondir mon cœur. Il acceptait ma demande… Il acceptait de m’épouser.
- Bien sûr que je le veux… Bien sûr que je l’accepte… Je ne veux plus être loin de toi.
Mes lèvres se posèrent doucement sur les siennes et un sourire se dessina sur mes lèvres.
- Mais avant tout ça… Tu dois reprendre des forces. J’ai dit à Pearl que tu étais blessé, qu’elle pourrait te voir une fois que tu seras remis.
J’avais blessé quelqu’un. C’était bien ce que je pensais. Rien de grave ? Etait-ce la vérité ?
« Qui était-ce ? »
Mon intuition me disait qu’il s’agissait d’elle. Me trompais-je ?
Oui, j’avais pensé être un poids. Je n’étais plus moi-même, je n’étais que souffrance et chaos. Le trouble qui m’avait envahi avait transformé l’homme que j’étais. La preuve, j’avais blessé quelqu’un et je ne m’en souvenais même pas. Et si j’avais blessé Pearl ? J’aurais peut-être même pu la tuer. Je ne me le serais jamais pardonné.
Son baiser sur mes lèvres mit fin à mon tourment. J’aurais pourtant voulu faire une demande différente, elle méritait mieux que ça, quoi qu’en fait ce n’était pas moi qui avais demandé. Tous les codes étaient bouleversés. C'était ainsi avec Anne. Cela faisait partie de son charme.
Finalement, peu importait la demande, le tout était que nous allions nous unir, former une vraie famille et donner à Pearl un père et une mère qui seraient à ses côtés tant qu'elle en aurait besoin.
Je lui rendis son baiser. Puis j’en volais un nouveau. J’en voulais plus. Toujours plus mais oui elle avait raison. Mon estomac se manifesta bruyamment. Effectivement, je mourrais de faim. Je souris pour cacher ma gêne. Depuis quand n’avais-je pas manger ? Et bu ?
« J’ai surtout soif. »
Ma gorge était sèche. Ma voix rauque.
Ses doigts sur ma joue râpeuse furent happés par ma main qui les porta à mes lèvres pour me permettre de les embrasser. La gorge nouée, j’articulais péniblement.
« Si tu savais combien tu m’as manqué… »
Moi aussi j’avais eu peur. De la perdre. De les perdre. Toutefois je n’avais pas eu le choix. Il fallait que je le fasse pour que Pearl soit à l’abri.
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Lun 17 Déc - 10:35
